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Appel au "Peuple de Paris !" du 25 juin 1940

Le 25 juin 1940, soit trois jour après la signature de l'armistice franco-allemand, le Parti communiste lance un Appel au "Peuple de Paris !". (Doc. 1)

Dans ce tract, il condamne le Général de Gaulle et son Appel à poursuivre le combat contre les envahisseurs allemands, se félicite d'avoir défendu la Paix pendant la guerre de 1939-1940 et enfin plaide pour la constitution d'un Gouvernement communiste " décidé à maintenir la paix " avec l'Allemagne nazie.

Cet Appel au Peuple de Paris est le premier texte du Parti communiste faisant référence au Général de Gaulle et ce... pour le condamner.

Après avoir décrit la situation politique de la France en juin 1940 (I), on analysera le contenu du tract (II).


Partie I

Gouvernement Pétain

Le 16 juin 1940, réfugié dans la ville de Bordeaux depuis deux jours, le Gouvernement Reynaud démissionne à 22 heures au terme d'un Conseil des ministres au cours duquel se sont une nouvelle fois affrontés opposants et partisans de l'armistice.

A la tête de ceux qui veulent mettre fin au conflit avec l'Allemagne et qui défendent au sein du gouvernement la même position que le Commandant en chef des armées françaises, le Général Weygand : le Maréchal Pétain, vice-président du Conseil et ministre d'Etat. Ce dernier est aussitôt chargé par le Président de la République de former un nouveau gouvernement. Dans ce Gouvernement de Paix qui sera formé en moins d'une heure entreront deux représentants de l'Union Socialiste et Républicaine (USR), le parti de Marcel Déat, deux radicaux-socialistes (PRRRS), dont Camille Chautemps à la vice-présidence, et avec l'accord de Léon Blum deux socialistes (SFIO) qui étaient membres du cabinet démissionnaire : André Février et Albert Rivière. Unis avec le PCF dans une coalition appelée le Front Populaire, ces trois partis de gauche avaient remporté les élections législatives de 1936. .

Parmi ceux qui veulent continuer de se battre contre les Allemands : le Général de Gaulle, sous-secrétaire d'Etat à la Défense nationale et à la Guerre attaché à la présidence du Conseil. Après s'être illustré dans les combats contre la Wehrmacht à la tête de la 4e Division Cuirassée, ce dernier a rejoint le gouvernement le 5 juin 1940. N'ayant pas une fonction ministérielle, il n'assiste jamais au Conseil des ministres. En mission en Angleterre, il apprendra la démission du gouvernement à son retour à Bordeaux dans la soirée. Après la constitution dans la nuit d'un cabinet marquant la victoire du clan des défaitistes, il décide le lendemain matin de repartir pour Londres. Il s'embarquera dans l'avion ramenant en Angleterre l'envoyé spécial de Churchill, le Général Spears. Les Anglais espéraient la venue d'un homme politique de premier plan comme Paul Reynaud ou Georges Mandel pour poursuivre la guerre au nom de la France. Les circonstances leur imposeront un colonel nommé au grade de général de brigade à titre temporaire (2 étoiles) en mai 1940, un éphémère sous-secrétaire d'Etat, un homme inconnu des Français...


Demande d'armistice

Le 17 juin, en début d'après-midi, le nouveau président du Conseil prononce à la radio une courte allocution dans laquelle il déclare qu'il faut mettre fin au conflit avec l'Allemagne ("il faut cesser le combat") avant d’annoncer qu'il est entré en contact avec le gouvernement allemand pour négocier un armistice.

Illustration de l'alliance germano-soviétique, quelques heures après cette annonce, Viatcheslav Molotov, président du Conseil et commissaire du peuple aux Affaires étrangères, convoque l'ambassadeur allemand à Moscou, Friedrich Werner von der Schulenburg, pour lui exprimer "les plus chaleureuses félicitations du Gouvernement soviétique pour le magnifique succès des forces armées allemandes". (Télégramme n° 1167 du 17 juin 1940)

Le lendemain, à Londres, le Général de Gaulle s'exprime à la BBC pour condamner la demande d'armistice et appeler les Français à poursuivre le combat contre l'envahisseur allemand. Initiative d'un officier supérieur refusant la défaite quand tous l'acceptent, coup d'éclat motivé par son patriotisme, message d'espérance dans une France en pleine débâcle, l'Appel du 18 juin 1940 est l'acte fondateur de la Résistance française : "Quoi qu'il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas".

A l'inverse de la position gaullienne, le Parti communiste, qui s'est engagé pour la Paix avec les nazis dès septembre 1939 en arguant que la guerre contre l'Allemagne d'Hitler était une guerre impérialiste, approuve la démarche du Gouvernement Pétain dans l'Humanité du mercredi 19 juin 1940 qui présente la particularité de reproduire un communiqué... de la Wehrmacht :

"Tous les hommes qui constituent le gouvernement portent, à des titres divers, la responsabilité de la politique qui a conduit la France à la guerre, à la catastrophe. Le maréchal Pétain a dit qu'il faut tenter de cesser le combat. Nous prenons acte, mais le peuple prendra acte aussi du fait que si, en septembre dernier les propositions des députés communistes avaient été retenues, nous n'en serions pas où nous en sommes.
Les députés communistes qui, en septembre proposaient une paix qui auraient laissé intactes la puissance et l'économie française, en même temps qu'elle aurait épargné bien des vies humaines et des destructions, furent jetés en prison et aujourd'hui ceux qui ont fait cette criminelle besogne sont acculés à la paix après la défaite."

Soumis aux autorités allemandes comme un numéro modèle de l'Humanité légale, ce numéro rappelle que les députés communistes ont été emprisonnés parce qu'ils avaient demandé l'organisation d'un vote du Parlement en faveur d'une "paix juste, loyale et durable que du fond de leur cœur souhaitent tous nos concitoyens" dans une lettre remise au président de la Chambre quelques jours après la victoire des armées allemandes et soviétiques en Pologne.


Armistice franco-allemand

Signé le 22 juin, l'armistice franco-allemand marque la défaite de la France. Dans l'attente des négociations portant sur un traité de Paix, cet armistice impose au pays vaincu l'occupation d'une zone couvrant les trois-cinquièmes de son territoire et comprenant sa capitale, le maintien en captivité de 1,5 million prisonniers de guerre, la démobilisation et le désarmement de ses forces armées, et enfin le paiement d'une indemnité journalière pour les frais d'occupation dont le montant sera fixé quelques semaines tard à 400 millions francs et représentera pour le budget français un prélèvement massif et abusif relevant plus des réparations de guerre que de l'entretien d'une armée d'occupation.

Dans une allocution prononcée le lendemain à la radio de Londres, le Général de Gaulle déclare que cet armistice est une véritable "capitulation" et que de ce fait le Gouvernement Pétain a perdu toute légitimité :

"L'armistice accepté par le gouvernement de Bordeaux est une capitulation.
Cette capitulation a été signée avant que soient épuisés tous les moyens de résistance. Cette capitulation livre à l'ennemi qui les emploiera contre nos alliés nos armes, nos avions, nos navires, notre or. Cette capitulation asservit complétement la France et place le gouvernement de Bordeaux sous la dépendance immédiate et directe des Allemands et des Italiens. 
Il n'existe donc plus sur le territoire de la France métropolitaine de gouvernement indépendant susceptible de soutenir au dehors les intérêts de la France et ceux des Français."

Pour connaître la réaction du PCF à la défaite de la France et à l'occupation allemande qui en est la conséquence, il suffit de lire l'Humanité du 24 juin 1940 et son article leader intitulé... "Construire la paix" :

"L'armistice est signé.
Ah, certes nous serrons les poings à la pensée qu'une autre paix eut pu être conclue en Septembre-Octobre dernier comme la proposaient les Communistes. Mais à cette époque Daladier jugeait que les ordres de la Cité de Londres devaient être obéis.
Construire la Paix ! Voilà donc la tâche urgente.
Nous savons bien, nous autres communistes, qu'il n'y aura de paix véritable que lorsque auront été extirpées les racines profondes de la guerre. LA PAIX C'EST LE SOCIALISME.
Lutter pour la paix, c'est coordonner l'action des prolétaires de tous les pays dans la lutte pour la victoire du socialisme, de ce socialisme dont l'URSS offre au monde le resplendissant exemple. Tel est notre but.
Préparer cette paix implique que la France est un gouvernement capable de comprendre et de traduire les aspirations populaires. La France de juin 1940 ne possède pas un [tel] gouvernement. [...]
Pour négocier la paix, il faut pouvoir parler au nom du peuple. On ne parle pas au nom du peuple quand on tient en prison et dans les camps des milliers de militants du peuple. Seul, sera digne de négocier une paix équitable, le gouvernement qui rendra au prolétariat ses droits et sa liberté. [...]
Que disparaissent les fauteurs de guerre, les responsables du désastre, les valets de la Cité de Londres : PLACE AU PEUPLE !".

Dans ce texte approuvant l'armistice franco-allemand, l'Humanité affirme que seul le Parti communiste est en mesure de négocier avec Hitler "une paix véritable" ou encore une "paix équitable" car il est le seul Parti à s'être opposé à la guerre et à pouvoir en outre bénéficier du soutien de l'URSS, alliée de l'Allemagne.

Ajoutons quatre remarques supplémentaires.

Tout d'abord, l'Humanité rappelle l'initiative pacifiste des députés communistes à la fin de la Campagne de Pologne et en attribue l'échec à la soumission du gouvernement français aux "ordres de la Cité de Londres".

Ensuite, formulé dans le but de prouver que les communistes sont des pacifistes de la première heure, ce rappel est aussi une dénonciation implicite du Maréchal Pétain qui est accusé par la propagande communiste de n'être qu'un belliciste dont l'engagement tardif en faveur de la Paix n'est qu'un opportunisme.

C'est d'ailleurs pour mettre en avant le bellicisme de ce dernier que le texte décrit le président du Conseil ainsi que les membres de son Gouvernement de Paix comme des "fauteurs de guerre" (impérialisme français) et des "valets de la Cité de Londres" (impérialisme anglais).

De plus, toujours dans le but de montrer que seul le projet pacifiste du Parti communiste est légitime, l'Humanité plaide pour une "paix équitable" ou encore une "paix véritable" par opposition à une paix inéquitable ou à une fausse paix négociée par le Maréchal Pétain.

Enfin, par son contenu, cet article est en totale conformité avec le projet défendu par les communistes depuis le début du conflit à savoir la Paix par la Révolution socialiste ("LA PAIX C'EST LE SOCIALISME").
 
Autre document exposant la position du Parti communiste sur l'armistice franco-allemand : son Appel au "Peuple de Paris" diffusé le lendemain.


Partie II

Appel au "Peuple de Paris !"

Signé "La Région Paris-Ville du Parti communiste français, diffusé le 25 juin 1940 (1), l'Appel au "Peuple de Paris !" condamne le Général de Gaulle, célèbre le pacifisme du Parti communiste pendant la guerre de 1939-1940 et enfin plaide pour la constitution d'un Gouvernement de Paix communiste.

1) Condamnation du Général de Gaulle

L'Appel au "Peuple de Paris" condamne le Général de Gaulle et ses Appels à poursuivre le combat contre l'envahisseur allemand.

Pour justifier cette condamnation, les communistes accusent le Chef de la France Libre d'être un agent de "l'impérialisme britannique" autrement dit un traître qui sert des intérêts étrangers et de vouloir entraîner de nouveau la France dans la guerre "pour le compte des financiers de la Cité" autrement dit d'agir par vénalité.

C'est la première mention du Général de Gaulle dans la propagande communiste.

Signalons que le plaidoyer pour "l'indépendance" des peuples coloniaux vise un double objectif : empêcher d'une part l'implantation de la France Libre dans les territoires de l'Empire français et d'autre part l'engagement de ces peuples dans la guerre contre l'Allemagne.

2) Célébration du pacifisme communiste pendant la guerre de 1939-1940

L'Appel au "Peuple de Paris" célèbre le pacifisme du Parti communiste pendant la guerre de 1939-1940 en soulignant plusieurs points : 

1) Le Parti communiste s'est engagé pour la Paix avec l'Allemagne nazie dès septembre 1939 : "Les députés communistes qui eurent le courage de demander la paix, en septembre 1939, furent odieusement attaqués, persécutés, emprisonnés."

Le texte fait référence à la lettre du 1er octobre 1939 dans laquelle les députés communistes ont demandé au président de la Chambre l'organisation d'une délibération du Parlement en faveur de la Paix.

2) Seul le Parti communiste s'est opposé à la guerre contre le IIIe Reich : "Tous les partis, tous les hommes politiques, de Blum à Marin, les Jouhaux et consort, tous ont insulté les communistes parce qu'ils voulaient la paix."

Conséquence seul le Parti communiste est légitime pour négocier la Paix avec Hitler.

3) Les communistes ont été réprimés pour leur action en faveur de la Paix avec les nazis :  "Le peuple de France aspirait à la paix, et c'est pourquoi, malgré la répression de Daladier-Reynaud-Mandel, les mots d'ordre communistes de lutte pour la paix ont eu une si profonde résonance dans l'âme populaire."

C'est pour cette raison que les communistes emprisonnés ou internés sont désignés dans le texte comme les "défenseurs de la Paix".

3) Plaidoyer pour un Gouvernement de Paix communiste

Promettant un "avenir meilleur sous le signe du travail, de la justice, de la paix et de la fraternité des peuples" autrement dit de la fraternité franco-allemande, l'Appel au "Peuple de Paris" plaide pour "un gouvernement populaire démocratique, [...] un gouvernement décidé à maintenir la paix, un gouvernement décidé à poursuivre avec l'URSS, pays du socialisme, une politique d'amitié qui compléterait heureusement le Pacte germano-soviétique et contribuerait à créer les conditions d'une paix juste et durable.

Outre un Gouvernement de Paix communiste, le texte défend la conclusion d'un pacte d'amitié franco-soviétique qui "compléterait le pacte germano-soviétique", autrement dit serait conforme aux intérêts allemands, et "constituerait un important facteur de pacification européenne", autrement dit inciterait l'Angleterre à faire la Paix avec l'Allemagne.

Cette revendication est conforme à la ligne fixée par Jacques Duclos. Cette ligne sera d'ailleurs formalisée dans son rapport à l'IC du 30 juin 1940 avec l'ébauche d'un "programme revendicatif" dans lequel la politique extérieure est ainsi définie :

Politique Extérieure 
Maintien de l'armistice et répression énergique de toute action tendant à entraîner à nouveau le peuple français dans la guerre.
Soutien des peuples coloniaux dans la lutte pour leurs revendications et leur indépendance
Conclusion d'un pacte d'amitié avec l'URSS qui compléterait le pacte germano-soviétique et constituerait un important facteur de pacification européenne". (2)

Dans sa Directive du 20 juillet 1940, l'IC apportera un correctif à la ligne du Parti communiste en faisant la recommandation suivante :

"Juste proposer entente avec URSS mais sans la présenter comme un complément pacte germano- soviétique et sans parler de pacification Europe." (3)

Conformément aux instructions de Moscou, les communistes appelleront à l'avenir à la conclusion d'un pacte d'amitié franco-soviétique sans faire référence ni au Pacte germano-soviétique ni à la pacification européenne.


Appel au "Peuple de la Région parisienne"

L'Appel au "Peuple de la Région parisienne" est un tract identique à l'Appel au "Peuple de Paris". Conservé dans les archives de l'IC, un document reproduit sur deux pages le texte de ce tract. Il porte les signatures de "La Région Paris-Sud du Parti communiste français" et de "La Région Paris-Ouest du Parti communiste français".


(1) Pour justifier la date du 25 juin 1940 on s'appuiera sur une lettre d'Otto Abetz du 28 juin 1940 dans laquelle on peut relever les faits suivants : dans la matinée du 26 juin 1940, Otto Abetz a reçu à l'ambassade d'Allemagne une délégation du Parti communiste pour des discussions portant sur la reparution de l'Humanité; au cours de ces échanges il a exhibé un exemplaire de l'Appel au "Peuple de Paris !" avant de demander aux deux dirigeants communistes présents, Maurice Tréand et Jean Catelas, s'ils étaient responsables de la diffusion de ce tract.
(2) Cahiers d'histoire de l'I.R.M, n° 52-53, 1993, p. 198.
(3) Ibid. p. 231


Document 1 : 

Appel au "Peuple de Paris ! "
 du 25 juin 1940

Peuple de Paris !

L'armistice est signé. Nos soldats ne se battent plus et, tandis qu'a cessé le bruit du canon, nos pensées vont à tous ceux qui sont restés sur les champs de bataille, aux mères, aux veuves, aux orphelins, aux mutilés, à toutes les pitoyables victimes de la guerre.
C'est en vain que les agents de l'impérialisme britannique essayent maintenant de persuader le peuple de France qu'il doit poursuivre maintenant la guerre pour le compte des financiers de la Cité et, tandis que ces messieurs tentent d'étendre le feu de la guerre aux colonies, les communistes disent aux peuples coloniaux : "Mettez à profit les difficultés de vos oppresseurs pour briser vos chaînes, pour vous libérer, pour conquérir votre indépendance."
Le peuple de France aspirait à la paix, et c'est pourquoi, malgré la répression de Daladier-Reynaud-Mandel, les mots d'ordre communistes de lutte pour la paix ont eu une si profonde résonance dans l'âme populaire.
[Et aujourd'hui, devant les désastres accumulées par la guerre, le Peuple comprend que si on avait écouté les communistes, la France n'aurait pas connu la guerre.
Les députés communistes qui eurent le courage de demander la paix, en septembre 1939, furent odieusement attaqués, persécutés, emprisonnés. On leur imputait ce crime de vouloir une "paix blanche", une paix sans morts, qui aurait laissé la France comme avant septembre 1939. Et, parmi ceux qui réclamaient des poteaux d'exécution pour les communistes, coupables de vouloir la paix, se signalait un des ministres actuels du maréchal Pétain, le PSF Ybarnegaray.] (a)
Tous les partis, tous les hommes politiques, de Blum à Marin, les Jouhaux et consort, tous ont insulté les communistes parce qu'ils voulaient la paix, mais aujourd'hui chaque français comprend qu'ont eu raison ceux qu'on a mis en prison et que criminels ont été ceux qui ont entraîné la France dans la guerre.
[Et ces jours derniers, le sinistre Langeron, homme à tout faire de Daladier et de Mandel, a poursuivi sa méprisable besogne en arrêtant d'honnêtes défenseurs de la Paix, qui n'ont eu qu'un tort, celui d'avoir raison trop tôt.
Le fait de voir ceux qui sont responsables de nos malheurs continuer ainsi leur politique criminelle ne peut que montrer aux masses populaires la nécessité de demander justice.] (b)
Tandis que le peuple songe aux efforts qu'il va falloir déployer pour relever nos ruines, pour restaurer notre économie, pour veiller sur le sort des blessés, des orphelins, des veuves, des vieux parents, ils se sont pénétrés d'un sentiment de justice et exigent que les comptes soient réglés avec les responsable, et que ceux qui ont profité de la guerre en paient les frais.
Voilà pourquoi le peuple de Paris, interprète des sentiments du peuple de France tout entier, décidé à préparé un avenir meilleur sous le signe du travail, de la justice, de la paix et de la fraternité des peuples demande :
1° La libération des élus du peuple et des militants jetés en prison pour avoir défendu la paix, et le rétablissement des représentants du peuple déchus de leurs droits et de leurs fonctions.
2° La mise en accusation et le jugement public de tous ceux qui ont poussé la France à la guerre et ont trompé le peuple de France pour pouvoir poursuivre leur criminelle politique.
3° La confiscation de tous les bénéfices de guerre, l'institution d'un prélèvement massif sur les grandes fortunes, la nationalisation sans indemnité des banques, mines, chutes d'eau, grosses entreprises, chemins de fer, en vue de mobiliser toutes les ressources du pays, économiques et financières.
4° La remise en activité de toutes les entreprises, y compris celles dont les propriétaires sont défaillants.
5° Le rétablissement des droits démocratiques, des libertés ouvrières et syndicales.
Mais un tel programme ne sera pas réalisé par un gouvernement de syndics de faillite, [par un gouvernement de militaires vaincus et de vieux politiciens de retour au passé chargé, à la Laval, Frossard et compagnie.] (c).
Le gouvernement que le pays attend et que les événements imposent, c'est un gouvernement populaire démocratique, s'appuyant sur le peuple, lui inspirant la confiance, lui donnant des raisons de travailler et d'espérer, un gouvernement de lutte contre la ploutocratie, composé d'hommes courageux, honnêtes, ayant donné des preuves de leur dévouement à la cause du peuple, un gouvernement décidé à maintenir la paix, un gouvernement décidé à poursuivre avec l'URSS, pays du socialisme, une politique d'amitié qui compléterait heureusement le Pacte germano-soviétique et contribuerait à créer les conditions d'une paix juste et durable.
Peuple de Paris, unis-toi à l'appel de ceux qui, au risque de leur liberté et de leur vie, t'ont toujours dit la vérité.
Sous le drapeau de la lutte contre le capitalisme générateur de misère et de guerre, sous le drapeau du travail, de la liberté, de la paix, de la fraternité et de l'indépendance des peuples, nous relèverons la France de ses ruines.

La Région Paris-Ville du Parti communiste français.

(A. Rossi, Les communistes français pendant la drôle de guerre 1939-40, 1951, rééd. 1972, pp. 371-372. Les paragraphes a), b) et c) ne sont pas reproduits dans cet ouvrage)