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Aux Résistants communistes qui sont morts... sans avoir jamais résisté

Synonymes de Bien et de Mal, les catégories de Résistants et de Collaborateurs sont utilisées pour caractériser le comportement des Français pendant l'occupation allemande de 1940-1944.

Grâce à leur génie, les communistes ont réussi l'exploit d'en créer une troisième : celle des Résistants qui sont morts... sans avoir jamais résisté.

Appartiennent à cette catégorie, les militants communistes qui remplissent ces trois conditions :

1) Ils ont été arrêtés avant le 22 juin 1941 et l'invasion de l'URSS par les armées allemandes, quand le Parti communiste, fidèle au Pacte germano-soviétique, appelait les Français à se mobiliser pour la constitution d'un Gouvernement de Paix communiste.

2) Ils ont été exécutés après cette date soit par Vichy soit par les Allemands non pour des actes qu'ils auraient commis mais en représailles à des actions de la Résistance communiste.

3) Le Parti communiste et/ou le gouvernement français les ont célébré comme des Résistants.

En d'autres termes, ces militants ne sont pas des Résistants qui sont morts pour la France mais des pacifistes qui sont morts pour Staline.

Pour illustrer cette catégorie, on citera trois exemples. Tout d'abord, un célèbre militant des Jeunesses communistes : Guy Môquet (Médaille de la Résistance). Ensuite, deux dirigeants communistes : Jean Catelas (Médaille de la Résistance) et Gabriel Péri (Ecrivain mort pour la France).

Pour éclairera l'action de ces supposés Résistants, on exposera les faits suivants. 

Agé de 16 ans, Guy Môquet était un militant des Jeunesses Communistes. En juillet 1940, sur les instructions du Parti, la Fédération des Jeunesses communistes a diffusé clandestinement un tract titré "Jeunesse de France" dans lequel elle appelait les jeunes Français à se mobiliser pour la constitution  d'un "Gouvernent du Peuple" qui serait le "seul capable" de négocier "la paix" avec Hitler :
 
"Assez de tous les vieux boniments ! Assez de tous ceux qui aujourd'hui rangés derrière PÉTAIN et son LAVAL, étaient hier derrière DALADIER. Silence aux lâches et aux chiens couchants. Seuls ont le droit de parler ceux qui, en pleine guerre, ont eut le courage de lever le drapeau de la paix. [...]

JEUNES GENS DE FRANCE UNISSEZ-VOUS POUR EXIGER :

LA LIBÉRATION DE TOUS CEUX QUI ONT ÉTÉ EMPRISONNÉS POUR AVOIR DÉFENDU LA PAIX.

LE CHÂTIMENT DES RESPONSABLES DE LA GUERRE ET DE LA DÉFAITE.
[....]

JEUNES DE FRANCE UNISSEZ-VOUS POUR EXIGER :

LA CONCLUSION D'UN PACTE D’AMITIÉ ENTRE LA FRANCE ET L'UNION SOVIÉTIQUE.

LA CONSTITUTION D'UN GOUVERNEMENT DU PEUPLE AU SERVICE DU PEUPLE, SEUL CAPABLE DE RELEVER LA FRANCE ET D'ASSURER LA PAIX DANS LA LIBERTÉ ET L’INDÉPENDANCE DE NOTRE PAYS
."

Membre du comité central, Jean Catelas a signé avec Maurice Tréand une lettre datée du 26 juin 1940 dans laquelle le Parti communiste demandait officiellement aux Allemands l'autorisation de publier l'Humanité. Cette lettre exposait la ligne politique du PCF à la fois sur le plan intérieur et sur le plan extérieur. Sa politique étrangère était définie en ces termes :

"L'Humanité, publiée par nous, se fixerait pour tâche de dénoncer les agissements des agents de l'impérialisme britannique [Le Général de Gaulle] qui veulent entraîner les colonies françaises dans la guerre, et d'appeler les peuples coloniaux à lutter pour leur indépendance contre les oppresseurs impérialistes. [...]
L'Humanité, publiée par nous, se fixerait pour tâche de poursuivre une politique de pacification européenne et de défendre la conclusion d'un pacte d'amitié franco-soviétique qui serait le complément du pacte germano-soviétique et ainsi créerait les conditions d'une paix durable."

Membre du comité centrale, auteur de nombreux textes diffusé dans l'Humanité clandestine ou dans d'autres publications communistes, Gabriel Péri a rédigé en janvier 1941 un texte intitulé "Au seuil de 1941" dans lequel il plaidait pour un "Gouvernement du Peuple" (un Gouvernement de Paix communiste) et condamnait pour cette raison tout "recours aux armes" pour libérer la France :

 "Est-ce à dire qu'une politique d'indépendance nationale est impossible ? Non point ! C'est même celle que veut la majorité des Français. UNE POLITIQUE D'INDEPENDANCE NATIONALE, UNE POLITIQUE FRANCAISE MEME APRES LA DEFAITE ET SANS RECOURS AUX ARMES EST A LA FOIS POSSIBLE ET SOUHAITABLE. Mais elle ne peut être pratiquée par les hommes de Vichy. Elle suppose un gouvernement capable de rallier l'adhésion des masses populaires françaises, de susciter la sympathie de tous les peuples, de se concilier l'amitié et l'appui de l'URSS et de sa puissante économie socialiste. AUTREMENT DIT, IL N' Y A QU'UN GOUVERNEMENT QUI DE PAR SON ORIGINE, SA COMPOSITION, SON PROGRAMME PUISSE PRATIQUER CETTE POLITIQUE, C'EST UN GOUVERNEMENT DU PEUPLE."

Au vu de ces éléments on pourra apprécier à sa juste valeur le fait suivant.

En mars 1943, l'écrivain communiste Louis Aragon a célébré l'unité de la Résistance dans le poème La Rose et le Réséda : "Celui qui croyait au ciel / Celui qui n'y croyait pas". (Doc. 1)

Il l'a repris dans le recueil La Diane française publié en décembre 1944. Hommage supplémentaire à l'unité de la Résistance, le poème était dédié à quatre Résistants, deux chrétiens et deux communistes : "A Gabriel Péri et d'Estienne d'Orves comme à Guy Môquet et Gilbert Dru".

Honoré d'Estienne d'Orves, fusillé en août 1941, et Gilbert Dru, exécuté en juillet en 1944, étaient d'authentiques Résistants. En revanche, Guy Môquet et Gabriel Péri....

Au mieux, leurs admirateurs peuvent les présenter comme des victimes de la barbarie nazie. Mais rien ne justifie de les associer à ceux qui sont morts parce qu'ils avaient fait le choix de prendre les armes pour libérer la France de l'hitlérisme.

Le présent texte est composé de cinq parties. Les Parties I et II seront consacrées au pacifisme du PCF pendant la guerre franco-allemande de 1939-1940 et la période de l'occupation allemande allant de juin 1940 à juin 1941.

Dans les Partie III, IV et V, on montrera que Guy Môquet, Jean Catelas et Gabriel Péri satisfont aux critères permettant de les classer dans la catégorie des Résistants communistes qui sont morts sans avoir jamais résisté.


Partie I

"Paix immédiate"

Le 1er septembre 1939, Hitler attaque la Pologne avec comme motif le refus du gouvernement polonais de satisfaire des revendications territoriales qu'il juge légitimes et limitées. Alliées des Polonais, la France et l'Angleterre réagissent le 3 septembre en déclarant la guerre à l'Allemagne nazie.

Moins de trois semaines après le début des combats entre les armées françaises et la Wehrmacht, suivant des Instructions de l'Internationale communiste motivées par le Pacte germano-soviétique, le Parti communiste abandonne sa ligne favorable à la défense nationale pour s'engager en faveur de la Paix. Dissous le 26 septembre 1939, il poursuivra son action dans la clandestinité.

Sa position : la guerre est une guerre impérialiste et sa cause n'est pas le nazisme mais le capitalisme. Ses mots d'ordre : "A bas la guerre impérialiste", "Paix immédiate" et "L'ennemi est dans notre propre pays". Ses objectifs : la Paix et, pour en garantir la pérennité, la destruction du régime capitaliste. On peut les résumer d'une phrase : la Paix par la Révolution socialiste.

Ces deux objectifs ont été fixés par l'IC dans un texte de son secrétaire général, Georges Dimitrov, diffusé en novembre 1939 sous le titre "La guerre et la classe ouvrière des pays capitalistes" :

"Les impérialistes des pays belligérants ont commencé la guerre pour un nouveau partage du monde, pour la domination universelle, en vouant à l'extermination des millions d'hommes. La classe ouvrière est appelée à en finir avec cette guerre à sa façon, dans son intérêt, dans l'intérêt de toute l'humanité travailleuse, et à supprimer, ainsi, à tout jamais, les causes essentielles qui engendrent les guerres impérialistes".


"Thorez au pouvoir"

Le 25 avril 1940, sur le constat qu'après de huit mois de guerre le gouvernement français est toujours déterminé à combattre Hitler, le Parti communiste appelle les Français à se mobiliser pour la constitution d'un Gouvernement de Paix communiste.

Cette nouvelle revendication est formulée par Maurice Thorez, secrétaire général PCF, dans un article publié dans l'Humanité clandestine sous le titre "Les Pitt et Cobourg de 1940" :

LES "PITT ET COBOURG" DE 1940
Par MAURICE THOREZ
[...]
Ecoutez-les, ces représentants des 200 familles ! Ils défendent la France. Leur guerre, la guerre des capitalistes, c'est la guerre du droit, de la justice, de la civilisation, de l'indépendance.
Rien de neuf dans ces mensonges usés de 1914 à 1918. Mais leur cynisme ne connaît aucune borne. Tandis qu'ils s'enrichissent du sang et de la misère du peuple de France, ils se présentent comme les défenseurs de la Patrie.
Tout ce qui ne s'incline pas devant leur malfaisance, leurs vols et leurs crimes, est jugé ennemi de la Patrie, traître, agent de l'étranger.
Quels sont-ils ces vertueux personnages ? Comment conçoivent-ils l'indépendance de la France ? Tout simplement à la façon de leurs ancêtres, les aristocrates de 1792.
"Pitt et Cobourg" tel était le qualificatif que le peuple de France décernait aux contre-révolutionnaires qui complotaient avec les ennemis de la France et de la Révolution, avec l'Autriche, le roi de Prusse et l'Angleterre.
Les "Pitt et Cobourg" de 1940 ne sont pas émigrés, ils ne sont pas en prison, ils dirigent momentanément, et pour son malheur, les destinées de la France. [...]
Quant à ceux qui exécutent les ordres des impérialistes de Londres, ils sont également légion. Notre Président du Conseil [Paul Reynaud] se distingue parmi ceux-là. Ce qu'on dit de l'alliance franco-anglaise est particulièrement insultant pour notre pays : "La France est un dominion de l'Angleterre". Le malheur est que c'est vrai et que les responsables se présentent encore comme les défenseurs de l'indépendance de la France.
En 1792, les "Pitt et Cobourg" avaient leurs girondins. En 1940, les "Pitt et Cobourg" ont les leurs. Les "Brissotins" s'appellent aujourd'hui Léon Blum [dirigeant de la SFIO], Paul Faure [secrétaire général de la SFIO], Jouhaux [secrétaire général de la CGT], Déat [secrétaire général de l'Union Socialiste et Républicaine]. [...]
Peuple de France, il faut nous débarrasser des "Pitt et Cobourg" de 1940. Notre pays mérite un autre sort que celui d'être cité comme l'exemple de la réaction et comme dominion de l'Angleterre. [...]
Le gouvernement que veut le pays n'est pas celui des "Pitt et Cobourg". C'est un gouvernement de paix, s'appuyant sur les masses populaires, donnant des garanties contre la réaction, assurant la collaboration avec l'Union Soviétique pour le rétablissement de la paix générale.
Seulement un tel gouvernement assurera l'indépendance de notre pays en le libérant de la tutelle des agents du capital français et anglais.
Maurice THOREZ,
secrétaire général du P.C.

Illustration de cette nouvelle orientation, le mot d'ordre "Thorez au pouvoir". Est-il un meilleur choix qu'un déserteur pour négocier la Paix avec Hitler ?
 
Rappelons que Maurice Thorez a déserté au mois d'octobre sur les ordres de Moscou. Après un court séjour en Belgique, le secrétaire général du PCF s'est réfugié en Russie. Ce départ a été caché aux militants pour ne pas les démobiliser.


Armistice franco-allemand

Signé le 22 juin 1940 par le Gouvernement Pétain, l'armistice franco-allemand marque la défaite de la France.
 
Dans l'attente des négociations portant sur un traité de Paix, cet armistice impose au pays vaincu l'occupation d'une zone couvrant les trois-cinquièmes de son territoire et comprenant sa capitale, le maintien en captivité de 1,5 million prisonniers de guerre, la démobilisation et le désarmement de ses forces armées, et enfin le paiement d'une indemnité journalière dont le montant sera fixé quelques semaines tard à 400 millions francs et représentera pour le budget français un prélèvement massif et abusif relevant plus des réparations de guerre que de l'entretien d'une armée d'occupation.

Dans une allocution prononcée le lendemain à la radio de Londres, le Général de Gaulle déclare que cet armistice est une véritable "capitulation" et que de ce fait le Gouvernement Pétain a perdu toute légitimité :

"L'armistice accepté par le gouvernement de Bordeaux est une capitulation.
Cette capitulation a été signée avant que soient épuisés tous les moyens de résistance. Cette capitulation livre à l'ennemi qui les emploiera contre nos alliés nos armes, nos avions, nos navires, notre or. Cette capitulation asservit complètement la France et place le gouvernement de Bordeaux sous la dépendance immédiate et directe des Allemands et des Italiens. 
Il n'existe donc plus sur le territoire de la France métropolitaine de gouvernement indépendant susceptible de soutenir au dehors les intérêts de la France et ceux des Français."

Pour connaître la réaction du PCF à la défaite de la France et à l'occupation allemande qui en est la conséquence, il suffit de lire l'Humanité du 24 juin 1940 et son article leader intitulé... "Construire la paix" :

"L'armistice est signé.
Ah, certes nous serrons les poings à la pensée qu'une autre paix eut pu être conclue en Septembre-Octobre dernier comme la proposaient les Communistes. Mais à cette époque Daladier jugeait que les ordres de la Cité de Londres devaient être obéis.
Construire la Paix ! Voilà donc la tâche urgente.
Nous savons bien, nous autres communistes, qu'il n'y aura de paix véritable que lorsque auront été extirpées les racines profondes de la guerre. LA PAIX C'EST LE SOCIALISME.
Lutter pour la paix, c'est coordonner l'action des prolétaires de tous les pays dans la lutte pour la victoire du socialisme, de ce socialisme dont l'URSS offre au monde le resplendissant exemple. Tel est notre but.
Préparer cette paix implique que la France est un gouvernement capable de comprendre et de traduire les aspirations populaires. La France de juin 1940 ne possède pas un [tel] gouvernement. [...]
Pour négocier la paix, il faut pouvoir parler au nom du peuple. On ne parle pas au nom du peuple quand on tient en prison et dans les camps des milliers de militants du peuple. Seul, sera digne de négocier une paix équitable, le gouvernement qui rendra au prolétariat ses droits et sa liberté. [...]
Que disparaissent les fauteurs de guerre, les responsables du désastre, les valets de la Cité de Londres : PLACE AU PEUPLE !".

Dans ce texte approuvant l'armistice franco-allemand, l'Humanité affirme que seul le Parti communiste est en mesure de négocier avec Hitler "une paix véritable" ou encore une "paix équitable" car il est le seul Parti à s'être opposé à la guerre et à pouvoir en outre bénéficier du soutien de l'URSS, alliée de l'Allemagne.


Partie II

Ligne du PCF
entre juin 1940 et juin 1941
 
Entre juin 1940 (défaite de la France) et juin 1941 (invasion de l'URSS par les armées allemandes), dans une France occupée par les nazis, en totale conformité avec les Instructions de Moscou, le PCF s'est mobilisé sur une ligne pacifiste, antigaulliste, anglophobe, et germanophile.

Si l'on suit une période saisonnale, on peut dire que l'été 1940 a été marqué non seulement par les négociations que le Parti communiste a menées avec les autorités allemandes pour obtenir la légalisation de ses activités mais aussi par la diffusion d'un Appel au "Peuple de France" dans lequel il plaidait pour la constitution d'un Gouvernement de Paix dirigé par Maurice Thorez.

Tract le plus important de l'automne 1940, la "Lettre aux militants communistes" se félicitait de la défaite de la France ("un puissant impérialisme a été abattu") et illustrait un nouveau thème dans la propagande communiste : la dénonciation commune des agents de l'impérialisme anglais (De Gaulle) et des serviteurs de l'impérialisme allemand (Doriot à Paris et Pétain à Vichy) qui étaient tous accusés de vouloir engager une nouvelle fois la France dans une guerre impérialiste.

A l'hiver 1940-1941, le Parti communiste a publié sous le titre "Pour le salut du Peuple de France" un programme de gouvernement dans lequel il s'engageait à établir des "Relations pacifiques" entre la France et l'Allemagne d'Hitler et à instaurer des "rapports fraternels entre le peuple français et le peuple allemand".

Enfin, le tract le plus important du printemps 1941 a été un appel intitulé "Pour la formation d'un Front national de lutte pour l'indépendance de la France" dans lequel il appelait les Français à se mobiliser pour maintenir la France hors du conflit anglo-allemand et ainsi préserver son indépendance.


Partie III
Guy Môquet

Militant des Jeunesses communistes du 17e arrondissement de Paris, âgé de 16 ans, Guy Môquet est arrêté par des policiers français le 13 octobre 1940.

Il est suspecté d'avoir participé à une distribution de tracts communistes et de ce fait d'avoir enfreint le décret-loi du 26 septembre 1939 prononçant la dissolution du Parti communiste français. Prévues par le décret de dissolution, les peines encourues sont d'un an à cinq ans de prison et une amende de 100 à 5 000 francs.

Particularité de ce militant : son père - Prosper Môquet - est un député communiste. Ce dernier a été déchu de son mandat en février 1940. Il a aussi été condamné en avril 1940 à 5 ans de prison pour une lettre datée du 1er octobre 1939 dans laquelle le groupe parlementaire communiste demandait au président de la Chambre d'organiser un vote en faveur de la Paix avec l'Allemagne nazie.

Jugé en janvier 1941 par le Tribunal correctionnel de Paris, Guy Môquet est relaxé - contrairement à ses trois camarades visés par la même instruction - au motif qu'il a agi sans discernement. Maintenu administrativement en détention, il est interné en mai 1941 au Centre de séjour surveillé de Choisel situé à Châteaubriant.


Propagande pacifiste

Avant son arrestation, Guy Môquet a participé à la diffusion des textes publiés par les Jeunesses communistes.

En totale conformité avec la ligne du Parti, ces textes défendaient une revendication majeure pour mettre fin à l'occupation allemande : la constitution d'un... Gouvernement de Paix communiste.

Pour illustrer cette ligne pacifiste, on citera les deux tracts les plus importants de cette période et deux numéros de son organe central, l'Avant-Garde.


Tract "Jeunesse de France"

La Fédération des Jeunesses Communistes de France signe en juillet 1940 un Appel à la "Jeunesse de France" dans lequel elle appelle les jeunes Français à se mobiliser pour la constitution d'un "Gouvernent du Peuple" qui sera le "seul capable" de négocier "la paix" avec Hitler :

"Assez de tous les vieux boniments ! Assez de tous ceux qui aujourd'hui rangés derrière PÉTAIN et son LAVAL, étaient hier derrière DALADIER. Silence aux lâches et aux chiens couchants. Seuls ont le droit de parler ceux qui, en pleine guerre, ont eut le courage de lever le drapeau de la paix. [...]

JEUNES GENS DE FRANCE UNISSEZ-VOUS POUR EXIGER :

LA LIBÉRATION DE TOUS CEUX QUI ONT ÉTÉ EMPRISONNÉS POUR AVOIR DÉFENDU LA PAIX.

LE CHÂTIMENT DES RESPONSABLES DE LA GUERRE ET DE LA DÉFAITE.
[....]

JEUNES DE FRANCE UNISSEZ-VOUS POUR EXIGER :

LA CONCLUSION D'UN PACTE D’AMITIÉ ENTRE LA FRANCE ET L'UNION SOVIÉTIQUE.

LA CONSTITUTION D'UN GOUVERNEMENT DU PEUPLE AU SERVICE DU PEUPLE, SEUL CAPABLE DE RELEVER LA FRANCE ET D'ASSURER LA PAIX DANS LA LIBERTÉ ET L’INDÉPENDANCE DE NOTRE PAYS
."

(Exemplaire du tract "Jeunesse de France !")

Signalons que cet appel contient aussi cette revendication fondamentale dans une France occupée par les nazis : "L'OUVERTURE DES STADES ET PISCINES POUR UN SPORT SAIN ET POPULAIRE."


 Tract "Nous avions raison !

En septembre 1940, pour marquer le "douloureux anniversaire" de la déclaration guerre à l'Allemagne d'Hitler, la Fédération des Jeunesses Communistes de France publie un tract intitulé "Nous avions raison !" :

"IL Y A UN AN : 23 AOUT 1939 : L’Union soviétique, le Grand Pays du socialisme triomphait et signait avec l’Allemagne un pacte de non-agression déjouant ainsi les manœuvres de guerre des impérialistes Franco-Anglais qui voulaient jeter l’Allemagne en guerre contre l’URSS afin de rétablir à leur profit le capitalisme au pays des Soviets, d’anéantir la classe ouvrière internationale et de réaliser leur plan de conquêtes impérialistes.
Il Y A UN AN : 2 SEPTEMBRE 1939 : Sans consulter la Nation, Daladier-Reynaud à la solde de la Cité de Londres, déclarent la guerre, jetant le Peuple de France et sa jeunesse dans la plus ignoble des tueries.
IL Y A UN AN : la Jeunesse Communiste guidée par le Grand Parti Communiste et son chef Maurice Thorez, approuvait le pacte germano-soviétique facteur de Paix, et se dressait contre cette guerre odieuse déchaînée par les 200 familles. Les Députés Communistes dans une lettre à Herriot, pour laquelle on les inculpa, réclamaient la Paix. [...]

MAIS MAINTENANT LA JEUNESSE COMPREND !
Elle sait que seuls les communistes se sont dressés avec courage et abnégation contre cette guerre injuste, malgré la terreur policière. Elle salue le courage admirable des jeunes communistes et de tous les emprisonnés pour la Paix qui souffrent encore dans les prisons et les camps, et ELLE EXIGE LEUR LIBÉRATION IMMÉDIATE. [...]

JEUNES DE FRANCE ! En ce douloureux anniversaire, UNISSEZ-VOUS SOUS LE DRAPEAU DU COMMUNISME, derrière, SES CHEFS AIMES, M. THOREZ, J. DUCLOS, A. MARTY, Benoit FRACHON, Marcel CACHIN, R. GUYOT.

C'EST LA VOIE DU SALUT POUR NOTRE JEUNE GENERATION !

REJOIGNEZ LES RANGS DE LA JEUNESSE COMMUNISTE. [...]

AVEC ELLE EXIGEZ :

La libération de tous ceux qui ont lutté pour la Paix. [...]
La Constitution d'un gouvernement du Peuple, seul capable d'assurer la Paix dans l'indépendance et de conduire la Jeunesse vers un monde meilleur."

(Un exemplaire du tract "Nous avions raison !")

Comme dans le précédent document, le tract "Nous avions raison !" appelle les jeunes Français à se mobiliser pour la constitution d'un "Gouvernent du Peuple" qui sera le "seul capable" de négocier "la paix" avec Hitler.

Autre élément d'intérêt, ce tract de septembre 1940 célèbre l'action pacifiste des Jeunesse communistes pendant la guerre franco-allemande de 1939-1940 en évoquant les points suivants :

- Condamnation "des impérialistes franco-anglais".
- Apologie du "pacte germano-soviétique facteur de paix". 
- Dénonciation du gouvernement de la République avec les arguments suivants : il était "à la solde de la Cité de Londres", il a jeté "le Peuple de France et sa jeunesse dans la plus ignoble des tueries" et enfin il a déclaré la guerre à l'Allemagne nazie "sans consulter la Nation". 
- Eloge de "la Jeunesse communiste" qui s'est dressée contre "cette guerre odieuse". 
- Hommage au "courage" et à "l'abnégation" des communistes qui ont été les "seuls" à lutter contre cette "guerre injuste". 
- Dénonciation de la "terreur policière" autrement dit de la répression  mise en en œuvre par le régime républicain contre les militants communistes qui défendaient la Paix avec l'Allemagne nazie. 
- Demande de "libération immédiate" de ces "emprisonnés pour la Paix" parmi lesquels figure Prosper Môquet.

Par son contenu, ce tract est pacifiste, anti-républicain et anglophobe.


L'Avant- Garde

Pacifistes, les Jeunesses communistes ont même appelé les jeunes Français à fraterniser avec les soldats allemands comme le prouve l'Avant-Garde n° 16 de juillet 1940 :

"L'OUVRIER ALLEMAND SOUS L'UNIFORME N'EST PAS VOTRE ENNEMI, CAUSEZ AVEC LUI".

L'organe central des Jeunesses communistes reprend la thèse du Parti selon laquelle les soldats allemands ne sont pas des envahisseurs mais des prolétaires avec lesquels il faut s'unir pour combattre l'ennemi commun : le capitalisme.

Daté du jour de... l'arrestation de Guy Môquet, l'Avant-Garde n° 20 du 13 octobre 1940 présente la particularité de condamner le Général de Gaulle et son projet de libérer la France par les armes :

Extrait n° 1 : 

"Et maintenant les Doriot, les Gitton et les De Gaulle voudraient nous faire recommencer la guerre au profit d'une des nations belligérantes.
Comme le disait Vaillant-Couturier Jeunesse de France, UNISSONS-NOUS POUR L'INDEPENDANCE DE LA FRANCE ET POUR LA PAIX." 

Extrait n° 2 : 

"La Jeunesse de France ne veut faire la guerre ni pour De Gaulle, ni pour les maîtres de Doriot, elle veut la Paix dans l'indépendance."


Résistance communiste

Le 22 juin 1941, l'Allemagne est en mesure d'envahir l'Union soviétique en raison de leur frontière commune issue de leur partage de la Pologne en septembre 1939. Cette attaque marque la fin de l'alliance germano-soviétique dont le fondement était le Pacte de non-agression du 23 août 1939 et le Traité de frontières et d'amitié du 28 septembre 1939.

Un commentaire : les communistes peuvent remercier Hitler car sans cette attaque ils seraient encore les alliés des nazis aujourd'hui.

Pour sa défense l'URSS peut compter sur le soutien de l'Internationale communiste qui mobilise immédiatement ses membres.

La Section Française de l'Internationale Communiste (SFIC) autrement dit le Parti Communiste Français (PCF) reçoit ses Instructions dans un télégramme du 25 juin 1941 co-signé par son secrétaire général, Maurice Thorez, qui s'est réfugié en Russie après sa désertion en octobre 1939 :

"Le moment est venu rechercher et organiser contacts directs avec mouvement gaulliste, dont partisans comprennent que lutte héroïque peuple soviétique contre agression hitlérienne répond intérêts peuple français et que libération France est liée à victoire Union soviétique. Collaboration doit s'établir sur la base suivante. Lutte commune pour libération nationale. Efforts communs contre ennemi commun, le fascisme allemand". 

(B. Bayerlein, M. Narinski, B. Studer, S. Wolikow, Moscou, Paris, Berlin. Télégrammes chiffrés du Komintern, 1939-1941, 2003, pp. 441-442).

C'est sur la base de ces instructions que le Parti communiste s'engagera dans la lutte contre l'occupant allemand.


Exécution de Guy Môquet

Le premier acte marquant de la Résistance communiste est l'exécution le 21 août à Paris d'un officier allemand, l'aspirant Moser. En représailles, six militants communistes sont exécutés. Les trois premiers ont été condamnés à mort en août par la Section spéciale de Paris, les trois autres en septembre par le Tribunal d'Etat.

Le 20 octobre, c'est le Feldkommand Hotz qui est tué à Nantes. A titre de représailles les autorités allemandes décident de fusiller 48 otages sélectionnés parmi les internés et les prisonniers. Cette sélection est faite en partie avec la complicité du ministre de l'Intérieur de Vichy, Pierre Pucheu.

Ces otages - principalement des communistes - sont fusillés le 22 octobre dans trois lieux distincts : 27 à Châteaubriant dont Guy Môquet, alors âgé de 17 ans, 16 à Nantes et 5 à Paris.

Victime des représailles allemandes, Guy Môquet est élevé immédiatement au rang de Résistant dans la propagande communiste avec un double objectif : inciter les jeunes Français à rejoindre la Résistance communiste et faire oublier le pacifisme du PCF dans la période antérieure au 22 juin 1941 en soulignant que le "résistant" Guy Môquet a été arrêté en octobre 1940.

Signalons qu'avant la date du 22 juin 1941, le héros de la Jeunesse communiste s'appelait Jean Rieu et qu"il était célébré parce qu'il avait été condamné en janvier 1941 à 20 ans de prison pour sa lutte en faveur de.. la Paix avec les nazis.


Vérité officielle

Héros de la Résistance pour le PCF, Guy Môquet bénéficiera même d'une reconnaissance officielle puisqu'à titre posthume il sera décoré de la médaille de la Résistance le 28 décembre 1944, cité à l'ordre de Nation le 13 septembre 1946 et fait chevalier de la Légion d'honneur le 17 novembre 1946 !!!

Autre incongruité, en 2007, à l'initiative d'un gouvernement conservateur, il lui sera rendu hommage dans toutes les écoles de la République avec notamment la lecture de la lettre qu'il avait rédigée à l'attention de ses parents avant son exécution. Il a sûrement été jugé préférable de ne pas lire les textes que Guy Môquet avait diffusés pendant l'occupation allemande.


Médaille de la Résistance

La médaille de la Résistance est instituée par une ordonnance du 9 février 1943 signée par Charles de Gaulle, chef de la France combattante, président du Comité national français :

"Art 1. Il est créé une médaille de la résistance française destinée à reconnaître les actes remarquables de foi et de courage qui, en France, dans l’Empire et à l’étranger, auront contribué à la résistance du peuple français contre l’ennemi et contre ses complices depuis le 18 juin 1940.
Art 2. La médaille de la résistance française est décernée par le Chef de la France combattante aux personnes et aux collectivités françaises qui ont :
1. pris une part effective et exemplaire à la résistance contre l’envahisseur et ses complices sur le territoire national;
2. pris une part effective et importante au ralliement de territoires français à la France combattante ou rendu des services signalés dans l’effort de guerre de ces territoires;
3. joué un rôle éminent dans l’action des organisations de la France combattante à l’étranger ou dans la propagande destinée à grouper et à soutenir les forces de résistance;
4 rallié des troupes, des navires ou des avions dans des conditions exceptionnelles de difficulté ou de danger;
5. rejoint les Forces Françaises Libres dans des conditions particulièrement dangereuses et méritoires."

(Journal officiel de la France combattante du 18 mars 1943)

Elle est redéfinie par une ordonnance du 7 janvier 1944 signée par le Général de Gaulle, président du Comité français de la libération nationale :

"Art 1er. La Médaille de la résistance française, créée par l'ordonnance n° 42 du 9 février 1943 du Comité national français, est destinée à récompenser les personnes ou les collectivités françaises qui ont :
1° Pris une part spécialement active depuis le 18 juin 1940 à la résistance contre les puissances de l'Axe et leurs complices sur le sol national ou en territoire relevant de la souveraineté française;
2° Pris une part effective importante au ralliement de territoires français ou rendu des services signalés dans l’effort de guerre de ces territoires;
3° Joué un rôle éminent à l’étranger dans la propagande et dans l'action des organisations destinées à grouper et à soutenir les forces de la résistance;
4° Rallié des troupes, des navires ou des avions dans des conditions exceptionnelles de difficulté ou de danger;
5° Rejoint les forces françaises en guerre dans des conditions particulièrement dangereuses et méritantes."

(Journal officiel de la République française du 22 janvier 1944)

La médaille de la Résistance est attribuée à Guy Môquet à titre posthume le 28 décembre 1944. Remplit-il l'une des cinq conditions permettant son attribution ? La réponse est...


Citation à l'ordre de la Nation

Une ordonnance du 7 janvier 1944 fixe les règles d'attribution des "décorations décernées à l'occasion de la guerre".

Pour la Croix de guerre, elle introduit un nouveau cas permettant de l'attribuer : la citation à l'ordre de la Nation.

Le texte est ainsi rédigé :

"Des citations à l'ordre de la Nation comportant attribution d'une palme en vermeil peuvent être attribuées dans des cas particulièrement méritoires, par décision du Comité de la libération, sur proposition soit du général commandant en chef, soit des commissaires chargés des départements militaires ".

(Journal officiel du 17 février 1944)

Guy Môquet sera de ceux qui seront cités à l'ordre de la Nation pour faits de résistance. Le décret correspondant présente le contenu suivant  :

Le Président du Gouvernement provisoire de la République cite à l'ordre de la Nation :
Moquet [sic] (Guy), de Paris, pour les motifs suivants : ardent patriote, symbole de l’héroïsme de la jeunesse française en lutte contre l’ennemi. Arrêté par la Gestapo à l’âge de dix-sept ans et interné à Châteaubriant après avoir été torturé; a été désigné parmi les otages et fusillé le 22 octobre 1941.

Fait à Paris, le 12 septembre 1946.

GEORGES BIDAULT.

Par le Président du Gouvernement provisoire de la République :
Le ministre de l'intérieur,
EDOUARD DEPREUX.

(Journal officiel du 13 septembre 1946)

"Ardent patriote, symbole de l’héroïsme de la jeunesse française en lutte contre l’ennemi", le militant des Jeunesses communistes aura même le droit à une seconde citation qui sera en fait une correction de la première :

Citation à l'ordre de la Nation.

Rectificatif au Journal officiel du 13 septembre 1916 : page 7903, au lieu de : « Moquet [sic] (Guy) ......................... arrêté par la Gestapo à l'age de dix-sept ans et interné à Châteaubriant après avoir été torturé; a été désigné parmi les otages et fusillé le 22 octobre 1941 », lire : « ... arrêté par la Gestapo le 13 octobre 1940 à l’âge de seize ans et interné à Châteaubriant après avoir été torturé; a été désigné parmi les otages et fusillé le 22 octobre 1941 à l’âge de dix-sept ans ».

(Journal officiel du 22 septembre 1946)

Titre de reconnaissance, la citation à l'ordre de la Nation est matérialisée par une Croix de guerre avec une palme en vermeil.


Chevalier de la Légion d'honneur

Le Journal officiel du 17 novembre 1946 annonce la nomination de Guy Môquet dans l'ordre de la Légion d'honneur à titre posthume :

"Par décret en date du 9 novembre 1946 rendu sur la proposition du ministre de l'intérieur,
Vu la déclaration du conseil de l’ordre de la Légion d’honneur portant que la nomination du présent décret est faite en conformité des lois, décrets et règlements en vigueur;
Est nommé dans l'ordre national de la Légion d’honneur à titre posthume :

Au grade de chevalier.

M. Môquet (Guy), de Paris, ardent patriote, animé du plus pur esprit de la Résistance. Fusillé par les Allemands à l'âge de dix-sept ans. A été cité à l’ordre de la Nation."

Sans commentaire...


Vérité historique

Militant des Jeunesses Communistes célébré officiellement comme un héros de la Résistance française, Guy Môquet n'a jamais résisté, a défendu comme son père la Paix avec l'Allemagne nazie et est mort pour Staline.


Partie IV

Jean Catelas

Député d'Amiens, membre du Comité central du PCF, Jean Catelas est arrêté par la police française le 15 mai 1941 dans la région parisienne.

Le dirigeant communiste est accusé de propagande illicite et d'avoir de ce fait enfreint le décret de dissolution du PCF.

La Région Picardie des Jeunesses communistes réagira à cette arrestation en soulignant le motif de celle-ci dans un numéro de l'Avant-Garde de juillet 1941 :

A Jean Catelas

Jean Catelas, défenseur acharné des travailleurs, est tombé entre les mains de la police franco-allemande.
Depuis 18 mois notre camarade luttait dans l'illégalité, chaque jour de toutes ses forces sans jamais faiblir, pour la paix et la libération des travailleurs.
C'est pour avoir démasqué la politique impérialiste des Daladier, Reynaud, et la trahison de nos gouvernements actuels, que notre camarade s'est attiré la haine de la bourgeoisie "française" et la sympathie de la jeunesse travailleuse.
Son combat doit être pour nous jeune communiste, un exemple à suivre.
Jeunes ouvriers, jeunes paysans picards c'est pour avoir défendu que Jean Catelas est arrêté.
C'est pour vous défendre que la jeunesse communiste vous appelle au combat contre les naufrageurs du pays.
Contre les coups de la réaction pour la liberté et l'affranchissement de la jeunesse; pour la libération de Jean Catelas, et de tous les emprisonnés.
Jeunes Picards. Unissons-nous.

On notera que cet article, publié après l'agression allemande contre l'URSS, salue l'engagement de Jean Catelas en faveur de... la Paix.

Pour illustrer cet engagement, on citera trois textes : une lettre du 1er octobre 1939, une lettre du 26 juin 1940 et l'article "Sous le drapeau du communisme" de mars 1941.


Lettre du 1er octobre 1939

A la fin de la campagne de Pologne, le groupe ouvrier et paysan français - anciennement groupe communiste - prend l'initiative de remettre une lettre au président de la Chambre dans laquelle il affirme que "la France va se trouver incessamment en présence de propositions de paix" et demande en conséquence l'organisation d'un vote du Parlement en faveur d'une "paix juste, loyale et durable que du fond de leur cœur souhaitent tous nos concitoyens".

Pour justifier sa démarche, le groupe parlementaire communiste accuse la France et l'Angleterre d'être les responsables de la guerre, dénonce les conséquences d'une guerre longue, condamne la presse belliciste et enfin invoque la diplomatie soviétique.

Datée du 1er octobre 1939, la lettre au président Herriot est signée au nom du groupe ouvrier et paysan français par Arthur Ramette et Florimond Bonte, président et secrétaire général du groupe.

Considérant que cette initiative pacifiste constitue une infraction au décret de dissolution du PCF, la justice militaire engage des poursuites contre tous les membres du GOPF. Parmi les mis en cause : Jean Catelas, député d'Amiens.

Passé dans la clandestinité avant d'être arrêté, Jean Catelas sera l'un des neuf accusés absents au procès des 44 députés communistes qui se tiendra du 20 mars au 3 avril 1940. Il sera condamné par contumace à 5 ans de prison, 5 000 francs d'amende et 5 ans de privation de ses droits civiques, civils et de famille.


Lettre du 26 juin 1940

Le 26 juin 1940, Maurice Tréand et Jean Catelas, deux membres du Comité central du PCF rencontrent Otto Abetz à l'ambassade d'Allemagne avec un objectif précis : obtenir l'autorisation de publier l'Humanité dont la publication a été suspendue le 26 août 1939 en raison de son soutien... au Pacte germano-soviétique

A la suite de cette rencontre les deux dirigeants communistes signent une lettre dans laquelle ils demandent formellement à la Propaganda Staffel l'autorisation de faire reparaître l'Humanité.

Cette lettre expose la ligne politique du PCF à la fois sur le plan intérieur et sur le plan extérieur. Sa politique étrangère est définie en ces termes :

"L'Humanité, publiée par nous, se fixerait pour tâche de dénoncer les agissements des agents de l'impérialisme britannique qui veulent entraîner les colonies françaises dans la guerre, et d'appeler les peuples coloniaux à lutter pour leur indépendance contre les oppresseurs impérialistes. [...]
L'Humanité, publiée par nous, se fixerait pour tâche de poursuivre une politique de pacification européenne et de défendre la conclusion d'un pacte d'amitié franco-soviétique qui serait le complément du pacte germano-soviétique et ainsi créerait les conditions d'une paix durable."

A la lecture de ce texte, on peut constater que l'Humanité légale se fixe les tâches suivantes :
 
1) combattre le Général de Gaulle et ses Appels à poursuivre la lutte contre les Allemands,
2) dénoncer l'impérialisme britannique,
3) soutenir la Paix avec Hitler,
4) défendre la signature d'un pacte d'amitié entre la France et l'URSS en soulignant qu'il serait un complément du "pacte germano-soviétique" et qu'il "créerait les conditions d'une paix durable" en Europe.

Ces engagements politiques sont une parfaite illustration de la ligne pacifiste, antigaulliste, anglophobe et germanophile du PCF. Identiques à ceux défendus dans l'Humanité clandestine, ils ne devraient pas heurter la censure allemande.

Malgré ces engagements les Allemands refuseront de laisser paraître l'organe central du Parti communiste français.


Article "Sous le drapeau du communisme"

Député de la Somme, Jean Catelas publie dans Le Travailleur Picard n° 5 de mars 1941 un article intitulé "Sous le drapeau du communisme / Ouvriers et Paysans de la Somme, Unissez-vous" :

SOUS LE DRAPEAU DU COMMUNISME
Ouvriers et Paysans de la Somme, Unissez-vous

Les documents distribués à profusion dans le Département ont ouvert les yeux des plus crédules et montré combien le Parti Communiste Français avait eu raison de lutter avec courage contre la guerre impérialiste. [...]
La population picarde a souffert plus que partout ailleurs de cette guerre criminelle déclenchée par les bandits au pouvoir et leurs valets socialistes et réformistes. [...]
Mais la malédiction de tout un peuple trahi monte, vengeresse, vers ces hommes qui ont voulu la guerre et préparé la défaite.
Comme l'indique le Programme du Parti Communiste Français : "Oui, de toutes ses forces le Peuple veut que l'on fixe toutes les responsabilités et que l'on châtie tous les coupables [...]".
Guerre capitaliste - défaite capitaliste ! Asservissement et menaces nouvelles de guerres capitalistes !
"Oui, le peuple de France veut la Paix", dit le PROGRAMME :
"Non, le peuple de France ne veut pas prendre part, à nouveau, à la guerre impérialiste. Il veut créer des relations pacifiques avec tous les pays, avec tous les peuples. [...]"
TRAVAILLEURS de la terre et des usines; Intellectuels, Rassemblez vous sous le drapeau du Parti Communiste.
Socialistes, Syndicalistes, Républicains, dont les chefs ont trahi le peuple et les intérêts de la France, faites vôtre notre Programme.
Pour que vive la France; pour le bonheur de son peuple, TRAVAILLEURS PICARD UNISSEZ-VOUS 

CATELAS Jean
Député d'Amiens, membre du Comité Central

Dans cet article, le député de la Somme appelle les "travailleurs picards" à se rassembler autour du Parti communiste et de son "Programme" intitulé "Pour le salut du Peuple de France".

Ce programme de gouvernement publié par le Parti communiste en février 1941 propose en politique extérieure les mesures suivantes :

"1° Libération du territoire national et des prisonniers de guerre. Pour mener cette tâche à bien, le Gouvernement du Peuple mettrait tout en œuvre pour établir des relations PACIFIQUES avec tous les peuples; il s'appuierait sur la puissance que lui conféreraient LA CONFIANCE DU PEUPLE FRANCAIS, LA SYMPATHIE DES AUTRES PEUPLES ET L'AMITIE DE L'UNION SOVIETIQUE.
2° Etablissement de rapports fraternels entre le peuple français et le peuple allemand en rappelant l'action menée par les communistes et par le peuple français contre le traité de Versailles, contre l'occupation du bassin de la Rhur, contre l'oppression d'un peuple contre un autre peuple.
3° Conclusion d'un pacte d'amitié et d'un traité commercial avec l'URSS et poursuite résolue d'une politique de paix destinée à tenir la France en dehors du conflit impérialiste."

Cet article de mars 1941 prouve sans aucune ambiguïté que Jean Catelas a approuvé le programme du PCF qui prévoit l'établissement de "relations PACIFIQUES" entre la France et l'Allemagne et l'instauration de "rapports fraternels entre le peuple français et le peuple allemand".


Exécution de Jean Catelas

Après le 22 juin 1941 et l'agression allemande contre l'URSS, le Parti communiste s'engage dans la lutte contre l'occupant allemand.

Le 21 août à Paris, la Résistance communiste abat un militaire allemand : l'aspirant Moser.

Répondant aux exigences allemandes, le gouvernement de Vichy décide en représailles d'exécuter six militants communistes déjà en détention et n'ayant donc aucune responsabilité dans cet attentat. C'est dans ce contexte que Jean Catelas est condamné le 21 septembre 1941 à la peine de mort par le Tribunal d'Etat, juridiction d'exception instituée par la loi du 7 septembre 1941. Le dirigeant communiste est guillotiné le 24 septembre 1941 à la prison de la Santé à Paris.

Le 28 décembre 1944, Jean Catelas reçoit a titre posthume la médaille de la Résistance !!!


Partie V
Gabriel Péri

Député de Seine-et-Oise, membre du Comité central du PCF, Gabriel Péri est arrêté par la police française le 18 mai 1941 dans la région parisienne.

Avant cette arrestation pour infraction au décret de dissolution du PCF, il a rédigé de nombreux textes en faveur de la Paix avec l'Allemagne nazie. On en mentionnera deux : la brochure "Le Parti communiste a vingt ans" de février 1941 et l'article "Au seuil de 1941" de mars 1941.


Brochure "Le Parti communiste a vingt ans"

En février 1941, pour célébrer son vingtième anniversaire (décembre 1920 - décembre 1940), le Parti communiste diffuse à 20 000 exemplaires une brochure intitulée "Le Parti communiste a vingt ans".

Dans cette brochure rédigée en janvier par Gabriel Péri, le Parti communiste évoque l'hypothèse d'une prise de pouvoir en juin 1940 :

"Le gouvernement qui s'installait au levier de commande dans la nuit du 13 au 14 juin était le gouvernement voulu et imposé par l’envahisseur [Le Gouvernement Pétain a été formé dans la soirée du 16 juin 1940].

Mais, encore une fois, à quels mobiles profonds obéissaient ceux qui le composaient ? Leur préoccupation exclusive était de sauver le régime odieux qui avait conduit le pays à la catastrophe. Ils savaient que si le gouvernement français avait abandonné le territoire, le peuple de France se serait donné un gouvernement à lui. Ce gouvernement eût mis fin à la guerre injuste et criminelle. Il eût signé la paix. Mais, fort de l'adhésion des masses populaires, fort de l'alliance qu'il aurait contracté avec le premier Etat socialiste, il eût fait de la paix non seulement un acte de réconciliation entre le peuple français et le peuple allemand, mais le première étape du relèvement du pays, de la renaissance française. Et comme elles l’ont toujours fait au cours de leur histoire, les classes dirigeantes ont placé leurs intérêts de caste au-dessus de l’intérêt du pays. Elles ont dit plutôt la capitulation, le déshonneur de la France livrée et trahie, mais nos privilèges sauvegardés, qu’une paix honorable et digne, conclue par un peuple qui aurait secoué la dictature capitaliste. La paix conclue par un gouvernement populaire eût servi les intérêts de tous les peuples et notamment les intérêts des peuples français et allemand. L'armistice Pétain a assujetti le peuple français, il a servi les intérêts d'un clan d'impérialistes forcenés qui ne conçoit la paix que dans l'asservissement de l'univers."

Dans cet extrait, le Parti communiste affirme que si le gouvernement de Paul Reynaud s'était installé en juin 1940 en Afrique du Nord pour poursuivre la guerre, il aurait formé sur le territoire métropolitain un nouveau gouvernement.

Quelle eût été l'action de ce premier gouvernement communiste de l'histoire de France ? En politique extérieure, "il eût signé la paix" avec l'Allemagne nazie. Cette "paix honorable et digne" aurait été non seulement "un acte de réconciliation entre le peuple français et le peuple allemand" mais aussi conforme aux "intérêts des peuples français et allemand". En politique intérieure, il aurait renversé "la dictature capitaliste".

Ce projet - la Paix par la Révolution socialiste - n'a pu être réalisé à cause des oligarchies capitalistes dont la sauvegarde des intérêts ne commandait pas le départ du Gouvernement de Paul Reynaud - condition préalable à la formation d'un gouvernement de Paix communiste - mais son remplacement par un partisan de l'armistice : le Maréchal Pétain.

C'est d'ailleurs ce point - la préservation des intérêts de la bourgeoisie - qui distingue l'armistice signé par le Maréchal Pétain de celui qui aurait été négocié par le Parti communiste : "l’armistice Pétain a assujetti le peuple français, il a servi les intérêts d’un clan d’impérialistes forcenés qui ne conçoit la paix que dans l’asservissement de l’univers."


Article "Au seuil de 1941"

Diffusés à 20 000 exemplaires en mars 1941, les Cahiers du Bolchévisme du 1er trimestre 1941 publie un article de Gabriel Péri intitulé "Au seuil de 1941".

Dans ce texte rédigé en janvier 1941, le dirigeant communiste analyse l'évolution de la situation internationale depuis la défaite de France en juin 1940.

Il s'attache tout d'abord à montrer que la guerre sera longue car ni l'impérialisme anglais ni l'impérialisme allemand ne sont en mesure de remporter la victoire à court terme. L'Angleterre impérialiste en raison de l'effondrement de sa puissance, l'Allemagne impérialiste du fait des difficultés auxquelles elle est confrontée. Il précise, ensuite, la nature de ces difficultés : défaites militaires de son allié italien; échec partiel de sa diplomatie dans l'Europe balkanique et danubienne avec toutefois la réserve suivante : l'activité de l'Allemagne dans cette partie de l'Europe ne remettait pas en cause la solidité des relations germano-soviétiques; et enfin hostilité des pays vaincus avec un long développement consacré à la France. Pour terminer, il envisage une entrée en guerre de l'Amérique impérialiste ("la dictature des soixante familles") ainsi qu'une extension du conflit en extrême-orient.

Abordant la question française Gabriel Péri plaide pour un "Gouvernement du Peuple" (un Gouvernement de Paix communiste) et condamnait pour cette raison tout "recours aux armes" pour libérer la France :

"Est-ce à dire qu'une politique d'indépendance nationale est impossible ? Non point ! C'est même celle que veut la majorité des Français. UNE POLITIQUE D'INDEPENDANCE NATIONALE, UNE POLITIQUE FRANCAISE MEME APRES LA DEFAITE ET SANS RECOURS AUX ARMES EST A LA FOIS POSSIBLE ET SOUHAITABLE. Mais elle ne peut être pratiquée par les hommes de Vichy. Elle suppose un gouvernement capable de rallier l'adhésion des masses populaires françaises, de susciter la sympathie de tous les peuples, de se concilier l'amitié et l'appui de l'URSS et de sa puissante économie socialiste. AUTREMENT DIT, IL N' Y A QU'UN GOUVERNEMENT QUI DE PAR SON ORIGINE, SA COMPOSITION, SON PROGRAMME PUISSE PRATIQUER CETTE POLITIQUE, C'EST UN GOUVERNEMENT DU PEUPLE."


Exécution de Gabriel Péri

Gabriel Péri est fusillé par les Allemands le 15 décembre 1941 au Mont-Valérien en représailles aux attentats commis par la Résistance communiste.

Son nom est inscrit sur la plaque apposée au Panthéon en juillet 1949 en hommage "aux écrivains morts pour la France" pendant la guerre de 1939-1945 !!!


Document 1 : La Rose et le Réséda, poème de Louis Aragon (1943).

La Rose et le Réséda

Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Tous deux adoraient la belle
Prisonnière des soldats
Lequel montait à l'échelle
Et lequel guettait en bas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Qu'importe comment s'appelle
Cette clarté sur leur pas
Que l'un fût de la chapelle
Et l'autre s'y dérobât
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Tous les deux étaient fidèles
Des lèvres du cœur des bras
Et tous les deux disaient qu'elle
Vive et qui vivra verra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au coeur du commun combat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Du haut de la citadelle
La sentinelle tira
Par deux fois et l'un chancelle
L'autre tombe qui mourra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Ils sont en prison Lequel
A le plus triste grabat
Lequel plus que l'autre gèle
Lequel préfèrent les rats
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Un rebelle est un rebelle
Nos sanglots font un seul glas
Et quand vient l'aube cruelle
Passent de vie à trépas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Répétant le nom de celle
Qu'aucun des deux ne trompa
Et leur sang rouge ruisselle
Même couleur même éclat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Il coule il coule il se mêle
A la terre qu'il aima
Pour qu'à la saison nouvelle
Mûrisse un raisin muscat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
L'un court et l'autre a des ailes
De Bretagne ou du Jura
Et framboise ou mirabelle
Le grillon rechantera
Dites flûte ou violoncelle
Le double amour qui brûla
L'alouette et l'hirondelle
La rose et le réséda