Dans sa "Lettre ouverte d'André Marty à Monsieur Léon Blum" publiée dans Le Monde du 7 octobre 1939, le dirigeant communiste réfugié à Moscou accuse le chef historique du Parti socialiste d'avoir trahi les
intérêts de la classe ouvrière en apportant son soutien à la guerre
contre l'Allemagne d'Hitler. (Doc 1)
Présentation
Membre du Bureau politique du PCF, député de la Seine, André Marty est aussi secrétaire de l'Internationale communiste. C'est à la demande du Komintern qu'il
quitte le territoire français vers le 15 août 1939. Cet important
dirigeant de l'IC arrive à Moscou quelques jours avant la signature du
Pacte germano-soviétique.
Le "député de Paris" publie dans Le Monde n° 4 du 7 octobre 1939, un hebdomadaire de l'IC édité en Belgique, une "Lettre ouverte d'André Marty à Monsieur Léon Blum"
dans laquelle il accuse le dirigeant socialiste d'avoir trahi les
intérêts de la classe ouvrière en apportant son soutien à la guerre
contre l'Allemagne d'Hitler.
Cette accusation repose sur la démonstration que la guerre est une "guerre impérialiste", que sa cause n'est pas le nazisme mais "le capitalisme"
et que les arguments avancés pour la justifier - défense de la Pologne,
respect des alliances, sécurité de la France, lutte contre le fascisme - ne sont que des
mensonges visant à masquer ces deux vérités.
La
lettre d'André Marty est le premier texte du Parti communiste apportant
cette démonstration et se conformant ainsi à la Directive de l'IC du 9
septembre dans laquelle Moscou demandait au PCF d'abandonner sa ligne
favorable à la défense nationale et de s'engager dans la lutte contre la
guerre impérialiste.
Exigeant du Parti communiste qu'il redresse rapidement sa ligne, ces Instructions ont été reçues à Paris vers le 15 septembre.
Adoptée le 20 septembre, la Résolution du Comité central du PCF intitulée "Il faut faire la Paix" dénonçait l'impérialisme anglais et contenait une condamnation implicite de l'impérialisme français. Quant à la lettre des députés communistes du 1er octobre, elle accusait la France et l'Angleterre d'être des "fauteurs de guerre impérialistes" sans plus de développement.
Par son contenu, cette lettre rédigée à Moscou par un dirigeant de l'IC définit avec clarté la nouvelle ligne du Parti : dénonciation de la guerre impérialiste, lutte pour la Paix, condamnation du Gouvernement Daladier.
Illustrée par les mots d'ordres suivants : "A bas la guerre impérialiste", "Paix immédiate", et "notre ennemi est chez nous",
cette ligne se caractérise aussi par la critique de l'Angleterre
qui est accusée comme la France d'être impérialiste et la mise en cause des socialistes qui sont accusés eux d'avoir trahi le prolétariat.
Exigeant du Parti communiste qu'il redresse rapidement sa ligne, ces Instructions ont été reçues à Paris vers le 15 septembre.
Adoptée le 20 septembre, la Résolution du Comité central du PCF intitulée "Il faut faire la Paix" dénonçait l'impérialisme anglais et contenait une condamnation implicite de l'impérialisme français. Quant à la lettre des députés communistes du 1er octobre, elle accusait la France et l'Angleterre d'être des "fauteurs de guerre impérialistes" sans plus de développement.
Par son contenu, cette lettre rédigée à Moscou par un dirigeant de l'IC définit avec clarté la nouvelle ligne du Parti : dénonciation de la guerre impérialiste, lutte pour la Paix, condamnation du Gouvernement Daladier.
Ces deux thèmes sont présents dans le pamphlet de Marty qui présente la particularité d'être centré sur la trahison des socialistes.
Autre caractéristique marquante du texte : le témoignage de fidélité à l'IC, à l'URSS et à Staline qui constitue une réponse non seulement à la dissolution du PCF mais aussi aux articles de Léon Blum appelant les militants communistes à rejoindre la SFIO.
Texte de référence, la lettre de Marty sera largement diffusée en France. Outre la diffusion de l'hebdomadaire Le Monde, il sera publié clandestinement dans une brochure titrée "Pour la victoire !". Il sera aussi reproduit dans le numéro spécial de l'Humanité de novembre 1939 et dans les Cahiers du Bolchévisme du 2e semestre 1939.
Extraits
Dès le début de sa lettre, André Marty dénonce l'anticommunisme et l'antisoviétisme de Léon Blum qui se sont manifestés avec éclat dans son soutien à la guerre contre Hitler :
"C'est l'aveu de l'Union Sacrée jusqu'au bout de vous et de votre parti avec le gouvernement réactionnaire du capitalisme français.
C'est
vous qui avez conclu ce pacte infâme avec la pire réaction contre la
classe ouvrière française et son parti, le Parti Communiste, contre le
pays du socialisme et de la Paix, contre l'Union soviétique."
Sur cette condamnation, il expose l'objet de sa lettre :
"Quelle
est donc la vraie raison de votre attitude à vous et à votre parti ?
C'est cela que je veux expliquer aux ouvriers, aux travailleurs
socialistes en premier lieu, au peuple français."
Le dirigeant communiste commence par montrer que la guerre est impérialiste et que sa cause n'est pas le nazisme mais le capitalisme :
"Car aujourd'hui une réalité tragique est devant la classe ouvrière, devant le peuple de tout ce pays :
une deuxième guerre impérialiste vient de s'abattre sur l'Europe avec
tout son cortège de massacres, d'indicibles souffrances et de misère.
Or, vous savez bien que le Parti communiste français est contre la guerre impérialiste et sa cause essentielle le capitalisme. C'est
pour cela que vous et les vôtres (Socialistes d'Union Sacrée) avez été
de la lutte contre le Parti communiste français, la seule force opposée à
cette guerre. C'est pour cela que vous avez exiger sa dissolution,
croyant ainsi que la bourgeoisie aura les mains libres pour mener cette
guerre impérialiste, cette guerre injuste."
Il poursuit en écartant tous les motifs avancés pour justifier la guerre : "l'indépendance de la Pologne", "la Parole de la France", "une guerre antifasciste".
Et conclut cette partie en ces termes :
"Donc
Blum, pas un seul de vos arguments en faveur de la guerre actuelle ne
tient. Vous voulez tromper les travailleurs comme vous avez déjà fait en
août 1914 avec Paul Faure. Vous parliez alors d'une guerre pour le
droit, pour la civilisation, pour la démocratie, contre le militarisme.
Et nul n'a oublié que jamais le militarisme français et le
l'impérialisme français n'ont été plus insolents que dans les années qui
suivirent la première guerre impérialiste. Vous parlez maintenant d'une
guerre antifasciste; et jamais le fascisme et la réaction n'ont été si
insolents et si puissants en France depuis que fut déclenchée cette
nouvelle guerre de brigandage."
Dans la suite du texte, André Marty dénonce une nouvelle fois l'anticommunisme et l'antisoviétisme de Léon Blum en s'appuyant sur l'attitude du dirigeant socialiste pendant la guerre d'Espagne et sa réaction à la signature des Accords de Rome avec l'Italie et à celle des Accords de Munich avec l'Allemagne.
Preuve de la foi inébranlable des staliniens français, le dirigeant communiste termine sa lettre sur un serment d'allégeance à l'IC, à l'URSS et à Staline :
"Nous, Monsieur le Conseiller d'Etat, sommes des communistes et sommes fiers de l'être. Nous sommes fiers d'être membres de l'Internationale Communiste de Lénine et Staline, vous entendez bien Blum, de Staline. [...]
En
ces jours de guerre, nous sommes fiers et heureux que dans tous
les pays du vieux monde capitaliste, des centaines de milliers
d'adhérents de notre Internationale luttent comme nous, communistes
français, contre leurs propres impérialistes fauteurs de guerre et leurs
meilleurs valets les sociaux-démocrates de votre espèce, avec une seule
pensée, une seule doctrine, celle de Lénine et de Staline. [...]
Nous sommes fiers d'être membre de ce parti mondial des communistes qui
a renversé pour toujours le capitalisme sur un sixième du globe et
instauré à sa place un régime socialiste de bien-être et de paix. Nous
somme donc fiers d'appartenir au même parti que Staline; nous nous efforçons d'apprendre dans son œuvre grandiose et d'être des élèves dignes de lui.
Vous
insultez bassement, vilement Staline, Monsieur le Conseiller d'Etat
impérialiste, vous vous démasquez ainsi un peu plus en essayant - vous
pygmée - d'atteindre un géant de l'Humanité. Les prolétaires, les
opprimés du monde entier qui tournent vers lui leurs regards, savent que
chaque minute de la vie de Staline, toute entière au service du
prolétariat international, du socialisme, est un enseignement, un appel
permanent à la lutte sans faiblesses d'aucune espèce. Que ce soit en ces
jours lointains où enchaîné aux pieds, il recevait sans broncher les
coups de fouet des gendarmes, tête haute, parce que sûr de l'avenir, ou
que ce soit comme guide, comme chef des peuples du grand pays
socialiste, phare éclatant dont l'attraction sur les peuples du monde
entier est chaque jour plus puissante. Celui qui a fait du vieux rêve
socialiste une réalité, vous le haïssez Blum, politicaillon de couloirs
parlementaires, vous Blum, intime des plus grands financiers
cosmopolites — décorés pour leurs pillages — ou pour leurs vols, comme
Oustric, votre ami.
Aux
ouvriers, aux hommes d'esprit avancé qui me lisent, je dis : nous,
communistes, sommes fiers d'être englobés avec notre grand Staline dans
la haine des capitalistes, que vous exprimez et défendez si bien.
Sûrs que l'avenir est au prolétariat français, sûrs qu'il triomphera
dans des temps plus proches peut-être qu'on ne croit, nous sommes fiers
d'être du parti de Lénine et de Staline. Nous sommes fiers que notre
glorieux parti communiste mérite une telle haine et une telle répression
de la clique impérialiste de France avec ses laquais de votre espèce.
Et comme nos maîtres aimés, nous ne cesserons la lutte qu'à la victoire contre notre ennemi qui est chez nous."
On notera dans cet extrait la phrase suivante : "vous Blum, intime des plus grands financiers cosmopolites — décorés pour leurs pillages — ou pour leurs vols, comme Oustric, votre ami."
On pourra la rapprocher de cette phrase tirée d'un pamphlet de Thorez rédigé en janvier 1940 sous le titre "Léon Blum tel qu'il est" : "En réalité, son regard ne dépasse pas son nez."
Réaction des socialistes
Dirigeant historique de la SFIO, député de l'Aude, chef du groupe parlementaire socialiste, Léon Blum est aussi le directeur politique du Populaire, l'organe du Parti.
Dans son éditorial du 22 novembre 1939, il mentionne la lettre d'André Marty au nombre des textes prouvant qu'il est "redevenu « une cible »" du Parti communiste :
"Je n'éprouve pas moins d'étonnement quand j'entends attribuer mes
articles à je ne sais quelle indulgence incorrigible vis-à-vis du Parti
communiste, à je ne sais quelle magnanimité intempestive, à je ne sais
quel abus du pardon évangélique. J'ai dénoncé sans merci le crime
inexpiable de Staline. J'ai combattu sans merci les communistes français
chez qui le dogme et la pratique de « l'omni-obéissance » avaient aboli
toute capacité d'observation et toute faculté de jugement. Je continue
cette lutte avec les armes qui me sont propres, et que j'ai lieu de
croire efficaces si j'en juge à la violence des outrages dont le
Communisme m'accable et des haines qu'il s'efforce de susciter contre
moi. La campagne que signalait l'autre jour Marx Dormoy ne s'est ni
ralentie ni modérée. A l'interview de Thorez publiée en Angleterre, je
pourrais ajouter aujourd'hui l'article que m'a tout spécialement
consacré Marty dans un magazine communiste qui paraît en Belgique. Je
pourrais reproduire également le texte des derniers tracts qu'on s'est
efforcé tout récemment de répandre dans les usines. On pourrait juger si
je ne suis pas redevenu « une cible » comme autrefois et si mes
articles d'il y a dix jours, où je servais pourtant, paraît-il, leurs
desseins secrets, m'ont attiré de la part des Staliniens plus de
bienveillance."
Autre réaction d'un responsable socialiste, un article de Marx Dormoy publié dans Le Populaire du 29 décembre 1939 sous le titre "La trahison des communistes" dans lequel la lettre d'André Marty est assimilée à un engagement dans "l'armée d'Hitler" :
"On peut appliquer à Marty cette parole de Tomsky, une des nombreuses
victimes de Staline, que m'a rappelée le citoyen Rappoport : « J'insulte, donc j'existe. »
Marty existe. Il insulte bassement, servilement. La lettre qu'il a
adressée à Léon Blum est un monstrueux monument d'amoralité,
d'hypocrisie, de haine... de bassesse aussi à l'égard de maîtres qui
veulent en avoir pour leur argent.
Marty n'est qu'un ilote. Après Staline, il dénonce la guerre comme « une deuxième guerre impérialiste »... « par conséquent, assure-t-il, les ouvriers, les paysans, n'ont rien à voir dans cette affaire ».
La France et la Grande-Bretagne sont entrées en guerre pour tenir les
engagements qu'elles avaient solennellement pris à la face du monde.
Leur attitude fournit à Marty l'occasion d'injurier, dans un immonde
placard, la Pologne martyre, dépecée par Hitler et par Staline - le tout
truffé des plus viles calomnies à l'adresse de Léon Blum.
« Ah ça, Monsieur le Ministre, écrit l'ilote, prenez-vous les ouvriers et les paysans pour des imbéciles, vous qui, comme Daladier, avez lancé le peuple français dans la guerre actuelle avec ses horreurs et ses souffrances et - déjà - avec ses nouvelles fortunes scandaleuses ? »
Pour prendre les autres pour des imbéciles, il faut l'être soi-même
et la bêtise rejoint presque toujours la canaillerie chez les individus
dégradés.
Marty, qui est orfèvre, accuse Léon Blum de trahison. C'est assez
plaisant de la part d'un homme qui a pris du service dans l'armée
d'Hitler."
Condamnation d'André Marty
Le 6
novembre 1939, sur le territoire de Rexpoëde, près de Dunkerque, un
cultivateur découvre sous un tas de paille deux sacs d'un poids total de
70 kg remplis d'exemplaires d'un numéro du Monde : le n° 4 du 7 octobre 1939.
Cet hebdomadaire de l'Internationale communiste a été lancé en Belgique par Eugen Fried en remplacement de la Correspondance internationale qui était éditée en France et dont la publication a été interdite par le décret de dissolution du PCF. La diffusion sur le territoire français de ce nouvel hebdomadaire a été interdite par un arrêté du ministre de l'Intérieur en date du 16 octobre 1939.
Ce numéro du 7 octobre 1939 publie une "Lettre ouverte d'André Marty à Monsieur Léon Blum, Directeur du Populaire". Cette lettre justifiera une action du parquet de Dunkerque contre le dirigeant communiste qui sera poursuivi pour infraction au décret de dissolution des organisations communistes.
Le 26 janvier 1940, André Marty est condamné par contumace à cinq ans de
prison et 10 000 francs d'amende et à la privation de ses droits civils
et politiques par le tribunal correctionnel de Dunkerque.
Le lendemain, le dirigeant communiste est déchu de la nationalité française par un décret signé par le président de la République, Albert Lebrun. Le décret stipule qu'il "s'est comporté comme le ressortissant d'une puissance étrangère" (l'URSS). Cette affirmation est fondée sur son action politique et notamment sa lettre à Léon Blum.
Document 1 :
Lettre ouverte d'André Marty à Monsieur Léon Blum, Directeur du « Populaire » du 7 octobre 1939 |
Monsieur le Conseiller d'Etat (1), Vous voici donc satisfait. Après l'interdiction de « l'Humanité » (2) et de la presse communiste, le Parti Communiste Français est dissous (3) et ses membres traqués. Vous avez bien défendu les intérêts du capital financier. Car c'est en effet vous qui le premier avec votre « Populaire » et votre Parti avez attaqué avec violence l' « Humanité ». Prétexte le pacte germano-soviétique. But, chloroformer les masses populaires en vue de la suppression de « l'Humanité », décidée par vous et Daladier. Ceci obtenu, vous avez, sans reprendre haleine, continué la campagne contre le Parti Communiste de France. Comment ? En attaquant la grande Union Soviétique à coup d'insultes et de calomnies et en particulier ses dirigeants les plus estimés et avant tout notre grand chef et maître, le camarade Staline, vous avez essayé de faire croire à une distinction artificielle entre la qualité de communiste et la qualité de Français. Sur quoi vous avez multiplié vos appels aux ouvriers révolutionnaires à quitter le parti communiste. (4) Aucun succès ! Alors vous avez lancé des avertissements et des menaces, un « dernier appel ». C’est une véritable mise en demeure que vous avez adressée à la classe ouvrière révolutionnaire et à ses élus communistes de rompre avec notre glorieuse Internationale Communiste. Vous escomptiez ainsi scissionner notre Parti. En vain l'ensemble de notre Parti est resté ferme. Les centaines d’arrestations opérées depuis un mois pour appuyer vos efforts n'ont rien changé. Seuls quelques pauvres hères sont revenus à leur mangeoire contre-révolutionnaire Alors devant la faillite de vos appels et sommations, sous la préparation d'artillerie de votre infâme campagne, Daladier a dissous le Parti Communiste de France, ses députés, ses maires, ses militants sont traqués. Et aujourd'hui vous osez écrire dans le « Populaire » que vous n'avez pas voulu ça. Allons donc ! Qui depuis des mois et des mois a tout mis en œuvre peur briser le front unique de la classe ouvrière ? Vous Blum et votre CAP (5). Cette digue brisée, la réaction avança â pas de géant. Alors, vous Blum avez mené la campagne conte l' « Humanité », cette grande voix populaire, indépendante. La veille même de sa suspension, votre Fédération de la Seine mobilisait tous ses membres non contre la menace de guerre, mais contre l' « Humanité ». L' « Humanité » fut alors interdite. Quelques jours après éclatait la guerre et la classe ouvrière française n'avait pas son journal à un moment où il était plus nécessaire que jamais. Car l' « Humanité » eut dénoncé aux masses comment venait la guerre. Elle en eut dénoncé le caractère impérialiste, anti-ouvrier, contre-révolutionnaire. Voilà pourquoi vous en avez demandé la suppression ! La guerre venue, il ne se passa pas un seul jour où vous, votre journal, votre Parti n'avez été à la tête de l'excitation antisoviétique, anticommuniste. C'est les députés socialistes qui ont fait exclure les communistes des grandes commissions parlementaires. Ce sont les députés socialistes qui publiquement et par écrit ont demandé à Daladier l'interdiction de notre parti (6). A quelques jours même de cette cette opération infâme, la CAP sur votre proposition, assurait Daladier « qu'il continuera de trouver auprès du Parti et du groupe parlementaire dans toutes les mesures qu'imposent le salut de la Nation, une collaboration complète et sans réserve ». C'est l'aveu de l'Union Sacrée jusqu'au bout de vous et de votre parti avec le gouvernement réactionnaire du capitalisme français. C'est vous qui avez conclu ce pacte infâme avec la pire réaction contre la classe ouvrière française et son parti, le Parti Communiste, contre le pays du socialisme et de la Paix, contre l'Union soviétique. Vous avez beau aujourd'hui essayer hypocritement de donner le change dans votre journal. Vous êtes M Blum, Conseiller d'Etat, politique beaucoup plus que juridique, vos innombrables entretiens secrets avec Daladier le prouvent. La déclaration de la CAP confirme votre responsabilité, elle signifie bien que, d'après vous, le « salut de la Nation » exige l'interdiction du Parti Communiste. C'est la conclusion juridique de la campagne politique menée par vous à la tête de toute la réaction depuis des mois contre notre Parti, contre l'Union Soviétique. Par là il est bien évident que quand vous dites Salut de la Nation, vous pensez, Salut de la Bourgeoisie. Quelle est donc la vraie raison de votre attitude à vous et à votre parti ? C'est cela que je veux expliquer aux ouvriers, aux travailleurs socialistes en premier lieu, au peuple français. ### Car aujourd'hui une réalité tragique est devant la classe ouvrière, devant le peuple de tout ce pays : une deuxième guerre impérialiste vient de s'abattre sur l'Europe avec tout son cortège de massacres, d'indicibles souffrances et de misère. Or, vous savez bien que le Parti communiste français est contre la guerre impérialiste et sa cause essentielle le capitalisme. C'est pour cela que vous et les vôtres (Socialistes d'Union Sacrée) avez été de la lutte contre le Parti communiste français, la seule force opposée à cette guerre. C'est pour cela que vous avez exiger sa dissolution, croyant ainsi que la bourgeoisie aura les mains libres pour mener cette guerre impérialiste, cette guerre injuste. Pourquoi donc cette guerre est-elle injuste ? Pour y répondre, il faut rechercher non celui qui a commencé, mais quelles forces et quelles classes mènent la guerre et dans quels buts ? La réponse est aisée. Comme il y a 25 ans, chacun des gouvernements dissimule ses buts pour entraîner les peuples dans la guerre. En envahissant la Pologne, Hitler prétendait lutter pour la libération do Dantzig et pour défendre l'Allemagne contre l'encerclement le sort de la Tchécoslovaquie et celui de l'Autriche montrent le véritable but du nazisme. Mais de leur côte, Daladier comme Chamberlain, qui assassinèrent l'Espagne et trahirent la Tchécoslovaquie, mentent aussi effrontément en déclarant qu'ils défendent la Pologne et qu'ils mènent une guerre « antifasciste » La raison profonde de cette guerre est la suivante. Trois Etats impérialistes — Angleterre, France, Etats-Unis — riches des sources essentielles de matières premières, d'immenses ressources économiques, financières et humâmes, conquises par la guerre, le pillage et l'exploitation des travailleurs, tiennent dans leurs serres plus de la moitié du monde. Et ils entendent conserver et accroître ces immenses territoires et sources d'exploitation. Mais trois autres Etats impérialiste — Allemagne, Italie, Japon — pauvres de ces richesses, veulent ravir au premier groupe les marchés, sphères d'influences et domaines coloniaux qu'il a puissamment étendu après sa victoire de la première guerre impérialiste, justement aux dépens des Etats du deuxième groupe. Et comme ni l'un ni l'autre groupe ne pouvaient plus avancer avec les moyens habituels, alors ils continuent leur politique par d'autres moyens, avec le canon ! Voilà tout ! Je vous entends déjà et l'URSS, ses pactes, ses alliances, son armée rouge, n'est-elle pour rien dans cette guerre ? L'Union des Républiques Socialistes Soviétiques, Monsieur le Conseiller d'Etat, est un pays où — vous le savez bien — ouvriers et paysans ont chassé capitalistes et gros propriétaires fonciers, où le système capitaliste de production et d'échange y est remplacé par la propriété collective de ces instruments par le système socialiste, de libre développement harmonieux de l'homme dans une vie de bien-être et de liberté qui vaut d'être vécue. La course au profit n’existant plus en URSS, le seul souci du pouvoir socialiste, c’est le bonheur de l'homme.
C'est pour cela que l'URSS ne peut vouloir que la Paix, à l'inverse de vos chers amis Daladier, Chamberlain et compagnie, sans cesse assoiffés de profits et de pillages, parce que gouvernements de pays capitalistes. C'est pour cela que l'URSS, l'Etat socialiste, est une force essentielle de Paix. Toute son existence le démontre, avec ténacité et avec une patience inépuisable, elle ne cessa pas un seul jour depuis sa naissance, de mener cette lutte qui correspond si bien aux intérêts du prolétariat international. Vous, M. Blum, qui avez toujours été et qui continuez d'être un des premiers à la diffamer, pourquoi cachez-vous que le congrès des Soviets lança, le jour même où il prit le pouvoir, le 7 novembre 1917, un appel à la Paix à tous les peuples et gouvernements du monde entier ? Pourquoi « oubliez-vous » — volontairement — que l'URSS proposa à Genève voici plus de 12 ans, le désarmement général complet el simultané ? Et que celui-ci refusé, elle proposa alors un désarmement partiel, refusé également ? Prenons les derniers mois avant la guerre, après Munich, n'était-il pas clair à tout homme sensé — et l'Etat-major français était de cette opinion — que grâce aux positions militaires dominantes que cette fameuse Conférence donna à Hitler, la guerre ne tenait plus qu'à un fil ? Or, même à ce moment, l'Union Soviétique essaya encore de sauver la Paix malgré que Chamberlain et Daladier, chargés d'affaires des financiers de Paris et de Londres, l'aient tenu systématiquement à l'écart. Elle proposa donc à Londres et à Paris un pacte tripartite d'assistance mutuelle — France, Angleterre, Union Soviétique.
C'est la gloire de notre Parti Communiste français d'avoir soutenu cette œuvre qui eut pu sauver la Paix. Seulement M. Chamberlain et ses préfets Daladier et Bonnet n'en ont jamais voulu. Pourquoi les négociations ont-elles trainé pendant 4 mois ? Pourquoi aboutirent-elles à une impasse ? Pourquoi la Conférence militaire de Moscou proposée par l'Union Soviétique n'eut-elle aucun résultat ? A cause d'un sabotage continu de chaque instant. Chamberlain et Daladier ne préparaient-ils pas un pacte à 5 — avec Hitler, Mussolini et Beck ? Vous saviez bien que oui, cela se préparait en grand secret — pour les ouvriers, mais pas pour vous, M le Conseiller d'Etat. Contre ce « secret » là vous ne dites rien. Parce qu'il visait le pays des Travailleurs, celui du socialisme. Chamberlain et Daladier, les impérialistes français et anglais, voulaient tout simplement orienter leur rival, l'impérialiste allemand contre l'Union Soviétique. Le truc a été déjoué par le traité germano-soviétique. Les Ouvriers français sont infiniment heureux que l'Union Soviétique ait mené cette politique de Paix, politique indépendante, politique du prolétariat international. Et ils voudraient bien avoir eux aussi un gouvernement qui mène une telle politique indépendante et non suivant le désir des banquiers de Paris et de Londres. C’est le dépit du mauvais coup manqué qui vous met si fort en colère !
Il
reste donc acquis que l'actuelle guerre européenne est une guerre
provoqué par 2 groupes impérialistes dont chacun veut dépouiller
l'autre; par conséquent, les ouvriers, les paysans, les peuples n'ont
n'ont rien à voir dans cette affaire. Où plutôt, ils ont à s'occuper non
seulement pour y mettre fin, mais pour l'utiliser en vue de supprimer
la cause des guerres, le système capitaliste.
Seulement,
c'est cela qui vous gêne Blum en bon dirigeant social-démocrate que
vous êtes. Et, c'est pourquoi comme en 1914, vous cherchez des arguments
pour justifier la guerre de Chamberlain de la City et de Daladier des
banques.
Tout d'abord vous prétendez que la guerre actuelle a pour but de défendre l'indépendance de la Pologne !
L'indépendance do la Pologne ? Quel toupet ! Vous avez, vous Blum, soutenu un gouvernement qui a noyé dans le sang le mouvement national d'indépendance des Druses en 1925 ; vous avez, vous Blum, soutenu un gouvernement qui par le fer et par le feu a réprimé l'insurrection des Riffains en 1926. A votre double passage au pouvoir comme chef du gouvernement, avez-vous donné la liberté — ou méme le simple bulletin do vote — aux 60 millions d'Arabes, d'Indochinois, de Nègres, esclaves de l'Empire colonial Français ? Voue n'avez même pas libéré les 3.000 Indochinois qui sont à Cayenne depuis 7 ans, pour avoir demande du riz, des terres et les droits démocratiques de France.
Ce n'est donc pas vous qui pouvez vous poser en défenseur de l'Indépendance d'un pays !
Et la Pologne qui vient de disparaître, était-elle indépendante ?
Vous savez bien Blum que cette Pologne réactionnaire, fut constituée de pièces disparates en 1918 par les impérialistes franco-anglais en accolant artificiellement divers pays et peuples. Cet Etat dominé par le capital anglais et français fut créé uniquement comme rempart et place forte de départ contre la Révolution prolétarienne victorieuse en Russie. Son premier acte comme Etat « indépendant » ne fut-il pas la guerre de 1920 contre la République des Soviets, au profit des impérialistes franco-anglais et sous le commande ment du général français Weygand ? A la suite de quoi l'Ukraine et la Biélorussie occidentales furent arrachées à la République des Soviets.
C'était
une Pologne impérialiste qui, voici un an, a contribué avec Hitler à
démembrer la Lithuanie et même son propre allié la Tchécoslovaquie !
C'est ça la Pologne « indépendante » au nom de laquelle vous avez, Blum avec Daladier, lancé le peuple français dans la guerre actuelle avec ses horreurs, ses souffrances et — déjà — avec ses fortunes scandaleuses ?
D'ailleurs pourquoi cette Pologne a-t-elle connu des catastrophes militaires sans précédent dans l'histoire, depuis l'époque de Napoléon ?
L'Etat réactionnaire polonais a été liquidé parce que son armée, cependant bien équipée et bien armée, a lutté sans aucun enthousiasme, sans aucun patriotisme, à l'inverse de l'armée populaire espagnole, qui, mal équipée, mal armée, a magnifiquement combattu pendant 32 mois avec un moral qu'aucune défaite ne put abattre Pourquoi ?
L’armée polonaise a lutte sans aucun enthousiasme, sans aucun patriotisme, parce que l'Etat polonais n'a cessé d'opprimer les minorités nationales Ukrainienne et Biélorussienne. L'oppression et l’exploitation y étaient telles, que le député [lamouriste] anglais Bequett pouvait écrire en 1927 à la suite d'un voyage en Ukraine occidentale « Je connais les Indes et vous avez entendu parler de l'effroyable misère des villages hindous. Mais jamais encore, je n'ai eu l'occasion de voir une misère aussi noire, aussi déprimante » L'oppression politique, administrative, culturelle ne s'y différenciait en rien de celle du tsarisme, elle allait jusqu'à poursuivre férocement l'enseignement de la langue nationale de ces peuples. L'on ne compte plus en Ukraine et Biélorussie occidentales les villages brûlés, les milliers de paysans torturés à mort ! L’état polonais réactionnaire n'était pas autre chose qu'une prison des peuples comme l'ancienne Russie tsariste !
D'autre part, l'armée polonaise a lutté sans aucun enthousiasme, parce que la classe ouvrière et la paysannerie de ce pays étaient brutalisées et martyrisées par l'Etat réactionnaire polonais. Depuis 15 ans, elles étaient privées de tous droits, de toute organisation, a part celles du parti socialiste polonais, d'accord avec le colonel Bock — comme vous l'êtes avec Daladier-Marin, depuis plus de 15 ans ses meilleurs fils étaient emprisonnés par dizaines de mille, torturés à mort, et on n'y comptait plus les fusillades et les pendaisons de travailleurs.
C'est pour cela que les ouvriers et les paysans polonais ukrainiens et blancs-russiens n'ont pas voulu se faire tuer pour cet Etat représenté par le colonel Beck, tantôt fondé de pouvoir des impérialistes anglo-français, tantôt espion allemand expulsé de France en 1922.
Mais, dites-vous, avec votre ami et obligé M. Daladier, la Parole de la France, l'Honneur de la France exigent qu'elle aille au secours de la Pologne ?
A défaut de dialectique, vous connaissez la logique M. le Conseiller d'Etat. Alors expliquez ceci : lorsqu'on septembre 1938 le fascisme hitlérien prépara l’agression contre les Sudètes, vous étiez pour la « non-intervention » Votre fameux et hystérique article célébrant Munich est toujours là en témoignage. Comme Daladier, vous célébriez le reniement de la parole donnée. Et il s'agissait d'un pays « démocratique » auquel la signature de la France garantissait l’assistance en cas d'agression.
Indépendance de la Pologne ? Honneur de la France ? dites vous. Mais l'Espagne, M Blum ? Qu’avez-vous fait de l'Espagne, M Blum, du grand et noble peuple de ce pays ? Oui qu’en avez-vous fait ?
Ses gouvernements successifs étaient à direction socialiste.
Vous avez cependant applique a l'Espagne, la politique dite de « non-intervention », ainsi hypocritement baptisée par vous. Alors que vous connaissiez les envois d’armement et de troupes d'Allemagne et d'Italie, vous l'avez bloquée. Vous avez même, Blum, déchiré le traité de commerce hispano-français de 1935, il y était écrit « L'Espagne s’engage à acheter uniquement en France tout matériel de guerre dont elle peut avoir besoin » Vous avez dès le premier jour essayé d'étouffer cette Espagne révolutionnaire et vous l'avez finalement assassinée en compagnie de Daladier et de Chamberlain.
En revanche, vous avez voulu et vous voulez justifier l'intervention française, la guerre, en faveur d’une Pologne réactionnaire, contre-révolutionnaire ! En faveur d'un pays où étaient martyrisées classe ouvrière, paysannerie, minorités nationales, en faveur d'une Pologne antisoviétique !
L'Espagne était une démocratie populaire d'un type nouveau, les grandes propriétés foncières avaient été distribuées aux paysans pauvres et aux ouvriers agricoles, la grande industrie et les banques privées étaient gérées par l'Etat avec le concours des travailleurs. Ce pays révolutionnaire, vous l'avez tué. Et vous exigez la guerre du peuple français non pour sauver la Pologne, mais pour sauver les capitaux français et anglais investis en Pologne, dans les pétroles, les textiles, les transports, etc., etc.. Et bien cette guerre M. Blum, les ouvriers et les paysans français, le peuple de France n'en veulent pas !
On
comprend bien que pour cette Pologne, M. Daladier et vous, teniez à
remplir vos engagements. Mais justement pour celle-là la classe ouvrière
française n'a rien à faire. Car elle aime la Pologne que vous haïssez,
la vraie Pologne, celle des ouvriers de Varsovie, celle des textiles de
Lodt, celle des mineurs, celle des paysans affamés et assassinés, celle
des Ukrainiens et des Blancs-Russiens - aujourd'hui libres (7). Elle aime
ces nobles fils du peuple polonais, les magnifiques héros prolétariens
de la Brigade Dombrowski qui s'est couverte de gloire en Espagne
républicaine. Et qui sont comme les ouvriers français, les ennemis de
l'Etat polonais réactionnaire qui vient de disparaître.
Et c’est pour cela que les travailleurs français ont vu avec le plus grand enthousiasme l'armée rouge apporter la paix, l'ordre, le socialisme aux peuples d'Ukraine et de Biélorussie occidentales, au peuple de Pologne orientale.
Avec joie, ils suivent les belles réceptions faites à l'armée rouge par les peuples ukrainiens et blanc-russien et les travailleurs polonais, les scènes émotionnantes qui se sont déroulées quand l'armée du socialisme traversait les villages sont un plébiscite qui ne trompe pas !
Vous avez beau crier de rage ! L'immense majorité des ouvriers et des paysans français est bien heureuse de voir les peuples de ces pays libérés de la dictature réactionnaire du gouvernement des colonel Beck et de ses hobereaux, incapables et corrompus Elle est bien heureuse de voir les comités paysans saisir et répartir les terres et les biens des gros propriétaires fonciers, elle est bien heureuse de voir les comités de village et les gardes ouvrières arrêter les réactionnaires — officiers compris — ouvrir les écoles, les magasins, les théâtres, les cinémas, et commencer une nouvelle vie sous le drapeau du socialisme ! Elle est bien heureuse de voir que bien des municipalités sont dirigées par des lutteurs prolétariens que l'armée rouge a tiré de leurs cachots !
Vous avez fini par trouver un nouvel argument pour tenter de justifier cette guerre. C'est - dites-vous - une guerre pour dompter les forces hitlériennes, c'est une guerre antifasciste !
Le bon sens populaire a déjà répondu à ce bobard !
Qui mène cette guerre « antifasciste » ?
Daladier-pleins-pouvoirs,
Daladier-antiparlementaire, Daladier-pouvoir-personnel qui concentre en
ses mains cinq Ministères. Et dont vous prétendez qu'il est le seul
président du Conseil possible ! Nouvel preuve de votre complicité avec
lui. Quelle guerre « antifasciste » peut mener un gouvernement qui non
seulement a libéré les cagoulards, mais encore les a installés à la
défense passive et à la censure ?
Le gouvernement français ne couvre-t-il pas les feuilles infâmes de diffamation et de meurtre, alors qu'il interdit le seul journal libre de France, l'Humanité de Jaurès et de Vaillant-Couturier, l'Humanité de Cachin et du Parti Communiste ?
Ce ne sont pas les traites fascistes que condamne le tribunal d'Arras, c'est le député communiste Quinet, le maire communiste de Liévin, le maire communiste de Nœulx, — grand honneur pour eux ! Ce ne sont pas les nouveaux profiteurs de guerre, ni les fournisseurs de viande qui sont poursuivis, c'est à l'heure actuelle, plus de 500 ouvriers et ouvrières, communistes, syndicalistes et même quelques socialistes qui sont durement frappes et dont 50 soldats sont déjà déférés en Conseil de guerre. Guerre antifasciste ? Celle d'un gouvernement qui emprisonne et jette dons les camps de concentration des milliers de travailleurs immigrés — les grands mutilés des Brigades Internationales compris — dont toute la vie est-faite d'abnégation et de sacrifices dans la lutte contre le fascisme ?
Les journaux fascistes, les organisations fascistes continuent plus ouvertement que jamais pourrie aux soldats, ni les spéculateurs sur le lait et sur le sucre, sur les masques à gaz et sur les leur propagande (sic). Mais c'est la presse communiste qui est saisie. Et le Parti communiste français qui est mis hors la loi.
A la faveur de la guerre, le gouvernement auquel vous apportez votre soutien total a liquidé les lois sociales et les derniers restes de libertés démocratiques, ce gouvernement inflige au peuple de France, la répression la plus dure qu'il ait connue depuis celle qui suivit la Commune. Il met en œuvre des méthodes qui se différencient de moins en moins de celles de Hitler.
En agissant ainsi, ce gouvernement se démasque bien comme menant une guerre contre les intérêts du peuple, une guerre comme celle qui éclata voici 25 ans et qui nous a coûté, en France, 1 million et demi de vies humaines et le double de mutilés, pour les seuls intérêts des capitalistes !
Donc
Blum, pas un seul de vos arguments en faveur de la guerre actuelle ne
tient. Vous voulez tromper les travailleurs comme vous avez déjà fait en
août 1914 avec Paul Faure. Vous parliez alors d'une guerre pour le
droit, pour la civilisation, pour la démocratie, contre le militarisme.
Et nul n'a oublié que jamais le militarisme français et le
l'impérialisme français n'ont été plus insolents que dans les années qui
suivirent la première guerre impérialiste. Vous parlez maintenant d'une
guerre antifasciste; et jamais le fascisme et la réaction n'ont été si
insolents et si puissants en France depuis que fut déclenchée cette
nouvelle guerre de brigandage.
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Et c'est parce que vous êtes pour cette guerre de brigandage capitaliste que vous vous placez Blum à la tète de la campagne antisoviétique, anticommuniste.
C'est que vous croyez que le truc qui a réussi une fois, va réussir une deuxième. L'anticommunisme qui servit à votre ami Besteiro et au colonel Casado à abattre le peuple espagnol et à le livrer à la réaction est nouveau votre cheval de bataille.
A coup de calomnies et de campagnes infâmes vous avez préparé les
violences du gouvernement réactionnaire Daladier. Et ensuite vous, Blum,
essayez de désorganiser la seule force qui s'oppose à la guerre de
l'impérialisme français : le parti communiste. Vous vous adressez
hypocritement aux communistes. Vous nous demandez de renier l'Internationale Communiste et de vous suivre sous votre drapeau d'Union Sacrée pour la guerre impérialiste.
A ça, Monsieur le Ministre, prenez-vous les ouvriers et les paysans pour des imbéciles ? Nul n'a oublié que les communistes sont les seuls qui ont vu juste sur tous les événements qui se déroulent en France et dans le monde et avant tout sur les problèmes de la guerre et de la paix.
En revanche, qui a rendu possible la conquête de l'Abyssinie, étape vers la guerre ? Les accords de Rome signés par Laval. Qui a voté contre et les a dénoncés comme préparant la guerre ? Seuls les communistes. Vous étiez pour, vous et vos députés, avec Marin, Daladier et Cie. Depuis vous prétendez avoir « reconnu votre erreur ! ».
Qui a dénoncé les conséquences de votre neutralité bienveillante à l'égard des envahisseurs de l'Espagne révolutionnaire ? seuls les communistes. Depuis, vous prétendez avoir « reconnu votre erreur » ; mais une deuxième étape vers la guerre avait été franchie.
Qui a dénoncé Munich comme ne sauvant pas la paix mais augmentant considérablement les chances de guerre ? Seuls les communistes ! Vous et vos députés, avez voté avec enthousiasme pour Munich Depuis, vous prétendez avoir « reconnu votre erreur » ; mais l'écluse du torrent de la guerre y fut alors ouverte !
A çà. Monsieur le Ministre, vous vous trompez donc toujours? Vous êtes donc un Pape infaillible dans l'erreur ? Si vous étiez général, Monsieur le guerrier avec la peau des autres, vos soldats seraient morts trois fois. Et si vous étiez caporal, à votre deuxième erreur dans la direction du pinard, toute l'escouade vous chasserait à coups de patates pourries.
En réalité, personne ne croira que vous vous trompez toujours ainsi. Vous pratiquez toujours, vous, votre journal et votre parti, la politique des maîtres du pays, la politique du capital financier, que ce soit contre l'Espagne et pour la Pologne, que ce soit contre les lois sociales et pour les trusts, que ce soit contre les communistes et pour Daladier-Flandin. Mais lorsque l'opinion ouvrière éclairée réclame des comptes, lorsqu'au sein de votre parti, vous êtes en mauvaise posture, vous vous en tirez avec la pirouette « Ah pardon, il y a erreur, je me suis trompé ».
Nous, Monsieur le Conseiller d'Etat, sommes des communistes et sommes fiers de l'être. Nous sommes fiers d'être membres de l'Internationale Communiste de Lénine et Staline, vous entendez bien Blum, de Staline. D'abord parce que l'Internationale Communiste est la fidèle continuatrice de la Première Internationale de Marx et d'Engels qui répandit vraiment dans le monde l'Internationalisme prolétarien. Et aussi, parce que la IIIe Internationale a surgi de l'action héroïque et grandiose des Bolcheviks dans leur lutte contre la première guerre impérialiste. Parce qu'elle a grandi dans la réalisation des Bolcheviks avec tout le peuple soviétique de cette société socialiste, « la vieille chanson qui berçait la misère humaine » devenue réalité, encore seulement sur un sixième du globe. Tandis que le 2 août 1914 faisait « crever le hideux abcès purulent » de votre IIe Internationale — suivant l'expression de Lénine — et la révélant à la classe ouvrière avancée comme un simple assemblage de sacial-chauvins passés chacun au service de leur propre bourgeoisie impérialiste.
En ces jours de guerre, nous sommes fiers et heureux que dans tous
les pays du vieux monde capitaliste, des centaines de milliers
d'adhérents de notre Internationale luttent comme nous, communistes
français, contre leurs propres impérialistes fauteurs de guerre et leurs
meilleurs valets les sociaux-démocrates de votre espèce, avec une seule
pensée, une seule doctrine, celle de Lénine et de Staline. Tandis que votre IIe Internationale dégage une « odeur cadavérique insupportable » — toujours comme écrivait Lénine ; son abcès crevé en 1914, l'a rongé au point qu'elle est devenue l'avant-garde contre-révolutionnaire de l'impérialisme : elle n'accepte même plus les partis sociaux-démocrates que la réaction de leur pays a interdits, même s'ils luttèrent magnifiquement comme celui d'Espagne, par exemple.
Et nous sommes fiers d'être membres de la même Internationale que le communiste Dimitrof
qui nous montra face aux juges de classe et même devant le couperet, un
communiste qui ne renie rien de ses convictions et défend
inébranlablement la classe ouvrière et notre parti mondial des
communistes. Et dans les prétoires où sont jetés par centaines ouvriers, paysans, soldats, le souvenir de Dimitrof à Leipzig est toujours devant leurs yeux.
Nous sommes fiers d'être membre de ce parti mondial des communistes qui
a renversé pour toujours le capitalisme sur un sixième du globe et
instauré à sa place un régime socialiste de bien-être et de paix. Nous
somme donc fiers d'appartenir au même parti que Staline; nous nous efforçons d'apprendre dans son œuvre grandiose et d'être des élèves dignes de lui.
Vous
insultez bassement, vilement Staline, Monsieur le Conseiller d'Etat
impérialiste, vous vous démasquez ainsi un peu plus en essayant - vous
pygmée - d'atteindre un géant de l'Humanité. Les prolétaires, les opprimés du monde entier qui tournent vers lui leurs regards, savent que chaque minute de la vie de Staline, toute entière au service du prolétariat international, du socialisme, est un enseignement, un appel permanent à la lutte sans faiblesses d'aucune espèce. Que ce soit en ces jours lointains où enchaîné aux pieds, il recevait sans broncher les coups de fouet des gendarmes, tête haute, parce que sûr de l'avenir, ou que ce soit comme guide, comme chef des peuples du grand pays socialiste, phare éclatant dont l'attraction sur les peuples du monde entier est chaque jour plus puissante. Celui qui a fait du vieux rêve socialiste une réalité, vous le haïssez Blum, politicaillon de couloirs parlementaires, vous Blum, intime des plus grands financiers cosmopolites — décorés pour leurs pillages — ou pour leurs vols, comme Oustric, votre ami.
Aux
ouvriers, aux hommes d'esprit avancé qui me lisent, je dis : nous,
communistes, sommes fiers d'être englobés avec notre grand Staline dans
la haine des capitalistes, que vous exprimez et défendez si bien.
Sûrs que l'avenir est au prolétariat français, sûrs qu'il triomphera
dans des temps plus proches peut-être qu'on ne croit, nous sommes fiers
d'être du parti de Lénine et de Staline. Nous sommes fiers que notre
glorieux parti communiste mérite une telle haine et une telle répression
de la clique impérialiste de France avec ses laquais de votre espèce.
Et comme nos maîtres aimés, nous ne cesserons la lutte qu'à la victoire contre notre ennemi qui est chez nous.
A BAS LA GUERRE IMPERIALISTE !
André Marty
Député de Paris
NOTES :
(1) Léon Blum a été membre du Conseil d'Etat de 1895 à 1919 avec une interruption pour la période de 1914-1916 quand il a intégré le cabinet du ministre Marcel Sembat, dans le gouvernement d'Union Sacrée
Dans sa lettre, André Marty s'adresse à Léon Blum en faisant référence notamment à son ancienne qualité de "Conseiller d'Etat". Il utilise ce terme comme un synonyme d'agent du capitalisme. Pour illustrer ce point, on citera un extrait d'un article consacré à Léon Blum, titré "Conseiller d'Etat" et publié dans un numéro spécial de l'Humanité de novembre 1939 :
"Ainsi Léon Blum devint avocat. Il entra au Conseil d'Etat. Ce
super-parlement, dont les membres sont soigneusement triés, veille sur
la teneur et la forme des lois et des décrets. Il garantit la continuité
de l'Exécutif - et l'efficacité de la dictature du capital - en
déléguant ses « légistes » dans les ministères et les corps
administratifs de l'Etat bourgeois."
(2) Les deux quotidiens communistes, l'Humanité et Ce Soir, ont été suspendus le 26 août 1939 par un arrêté du ministre de l'Intérieur, Albert Sarraut, radical-socialiste. Le motif : leur soutien au Pacte germano-soviétique du 23 août 1939. Dans Le Populaire du 27 août 1939, considérant que le soutien du PCF au Pacte germano-soviétique lui avait porté "un coup meurtrier", Léon Blum a jugé que la suspension des journaux communistes était une "une redoutable erreur" qui pousserait les militants sur le départ à se solidariser avec le Parti :
"Et je m'adresse avec la même franchise au gouvernement de la
République. Les deux quotidiens communistes de Paris ont été suspendus.
Les réunions communistes sont interdites. Si j'étais journaliste ou
militant communiste, je ne crierais sans doute que pour la forme et je
me sentirais au fond fort soulagé de n'avoir pas à m'expliquer devant
mes lecteurs ou auditeurs. Les protestations communistes trouveront
assurément peu d'écho, tant est profonde et légitime l'indignation
générale ; on a vu qu'hier le groupe socialiste avait refusé de s'y
associer. Je sais cela. Je sais aussi qu'il est tentant pour un
gouvernement d'exploiter à fond contre le Parti qui les a provoqués,
l'émoi et la révolte de l'opinion publique. Mais je manquerais à ma
conscience si je ne déclarais, sous ma responsabilité propre, au
gouvernement, qu'il est en train de commettre une redoutable erreur. La
conclusion du pacte germano-soviétique et surtout l'incroyable
entêtement du Parti communiste français à en dresser contre toute raison
la justification ou même l'apologie, lui ont porté un coup meurtrier.
Toute mesure de force, au delà de celles que des nécessités précises de
défense nationale motiveraient strictement, fera refluer autour de lui
une partie des masses ouvrières qui s'en détachaient."
(3) Le Parti communiste a été dissous le 26 septembre 1939 par un décret-loi adopté en Conseil des ministres sur la proposition du ministre de l'Intérieur, Albert Sarraut, radical-socialiste. Dans son éditorial du 27 septembre 1939 intitulé "Le gouvernement dissout le parti communiste", Léon Blum a salué la décision du gouvernement en tant que responsable socialiste exprimant la position de son Parti avant d'indiquer qu'à titre personnel il estimait que cette décision était "une faute" car, comme il l'avait déjà expliqué dans son article du 27 août, tout excès dans la répression du PCF retarderait sa "décomposition" :
"Or, sans applaudir assurément à la dissolution du Parti Communiste,
j'ai le sentiment que la majorité de notre Parti la trouvera naturelle,
légitime. Cela se conçoit sans nulle peine. La signature du pacte
germano-soviétique, puis l'invasion armée de la Pologne, ont soulevé
l'indignation générale et il y a quelque chose d'exaspérant dans le
refus obstiné des communistes français, malgré les objurgations dont on
les presse, de rejeter un lien de dépendance et de solidarité avec ces
actes odieux.
Mon opinion personnelle que j'ai déjà laissée percer à d'autres
occasions et que la réflexion a confirmée, est différente. Les hommes
qui depuis dix jours ont exercé sur le gouvernement une pression
publique, comme Frossard et comme, je crois, M. Flandin, lui ont
donné, selon moi, de mauvais conseils. Je tiens la dissolution pour une
faute. Alors que le Parti Communiste restait accablé sous le poids de
ses erreurs insensées, il va pouvoir transporter le débat sur un tout
autre terrain. La décomposition sera, non pas précipitée, mais enrayée.
Voilà ce que je crois."
(4) Dans Le Populaire du 27 août 1939,
en réaction à l'approbation du Pacte germano-soviétique par le PCF,
Léon Blum a appelé les communistes français à trouver en eux-mêmes "le courage" de rompre avec Staline et le "dogme de l'infaillibilité d'un homme" pour "redevenir des hommes libres" :
"Je m'adresse maintenant aux communistes français, comme un homme qui
a le sens des dangers de l'heure, mais qui croit aussi avoir le sens
des devoirs et du destin de la classe ouvrière. Je leur dis : cessez ce
jeu. Vous ne pouvez pas croire à ce que vous dites. On goûterait dans un
autre temps l'agilité de vos exercices dialectiques. Mais le moment est
trop grave. Et quand on joue aujourd'hui on joue avec la vie ou la
liberté de millions d'hommes. Je sais ce que sont et ce que valent la
discipline et la solidarité de Parti. Mais il n'est pas supportable que
l'existence d'un parti prolétarien repose en fin de compte sur le dogme
de l'infaillibilité d'un homme. Si pénible que puisse vous être
l'effort, trouvez en vous-mêmes le courage de vous affranchir, laissez
sortir de vous-mêmes les pensées et les mots qui sont déjà formés dans
votre esprit. Vous avez été déliés de vos vœux. Laissez-vous redevenir
des hommes libres."
Après l'entrée des troupes soviétiques en Pologne, Léon Blum a renouvelé son appel aux communistes dans Le Populaire du 18 septembre 1939 :
"Le voile s'est déchiré. Hier matin les troupes soviétiques ont
franchi la frontière. L'armée polonaise combat à la fois contre l'armée
hitlérienne et « l'armée rouge ». [...]
"Mais, même en supposant qu'une fiction diplomatique de neutralité
puisse s'établir et se prolonger malgré l'évidence de l'entente avec
Hitler, malgré l'évidence de l'agression, elle ne peut pas être valable
pour la classe ouvrière de ce pays. J'entends par là que vis-à-vis de la
classe ouvrière, vis-à-vis de nous socialistes, la position communiste
n'est pas tenable une heure de plus Je m'adresse aux chefs communistes, à
ceux d'entre eux que la mobilisation n'a pas appelés aux armées, et je
les adjure une fois encore, sans me laisser décourager par la vanité de
mon premier appel. C'est le dernier moment, c'est la dernière occasion
pour faire le geste attendu depuis trois semaines. Ils ne peuvent plus
avoir de doute; alors, comment peuvent-ils avoir une hésitation ? Qu'ils
parlent; qu'ils laissent échapper le cri formé dans leurs consciences;
qu'ils crient au pays que le pacte avec Moscou est rompu, que l'attentat
de Staline les a déliés de leurs vœux, que tout cela est fini, qu'ils
ne sont plus autre chose que des citoyens français, libres, pleinement
libres, c'est-à-dire ne connaissant plus d'autre devoir et d'autre
discipline que le devoir commun et la discipline commune des Français.
Mais qu'ils se hâtent ! Bientôt, rien ne pourrait plus combler le fossé."
Son éditorial du lendemain contenait encore une adresse aux militants, cadres et élus communistes :
"Et je demande encore une fois s'il est possible, au lendemain d'un
tel attentat, que des ouvriers et des paysans français, que des
militants qui ont toujours revendiqué leur fidélité au socialisme
traditionnel, conservent vis-à-vis du régime stalinien un lien
d'obédience, un rapport de dépendance même théorique. Non, ce n'est plus
possible. Et ce n'est plus possible pour les ouvriers et les paysans,
mobilisés ou non, dont je n'essaierai pas d'estimer le nombre et que des
sentiments complexes, souvent respectables, avaient empêchés jusqu'à
présent de rompre avec l'Internationale stalinienne. Ce n'est plus
possible pour les militants des [sic] cadres communistes, pour
les élus communistes. On ne leur demande pas d'abjurer lâchement leur
passé. On leur demande, dès cet instant, l'affirmation formelle et
courageuse qu'ils ont recouvré leur indépendance. J'ai dit cela hier. Je
le répète aujourd'hui, en déplorant d'avoir à le répéter. Pas un mot
depuis hier. Je vois même, dans le communiqué donné à la presse par la
commission administrative de la C.G.T., que ses membres communistes ont
préféré manquer à la séance plutôt que de se prononcer sur ce point
vital, et cette absence m'inquiète autant que ce silence. Cependant,
chaque heure compte et, avec chaque heure qui passe, le geste nécessaire
deviendra plus difficile. Je me demande même en écrivant si, malgré mon
ardeur et mon instance, l'irréparable n'est pas déjà accompli."
Dans Le Populaire du 20 septembre 1939,
répondant à une lettre de Marcel Cachin, membre du Bureau politique du
PCF, sénateur de la Seine, Léon Blum faisait le constat amer que le
dirigeant communiste n'avait pas été sensible à ses appels :
"JE reçois une seconde lettre de Marcel Cachin en réponse aux articles où j'ai, dit-il, « attaqué à nouveau le Parti communiste ».
Tous mes lecteurs me serviront ici de témoins. L'idée d '« attaquer »
le Parti communiste ne m'a même pas effleuré l'esprit. J'ai adjuré les
communistes français, dans l'intérêt du pays, dans l'intérêt du
socialisme, dans leur intérêt propre, de se dégager enfin de toute
dépendance vis-à-vis du despotisme stalinien, de répudier toute
solidarité avec des actes qui révoltent la conscience universelle et
bouleversent la conscience prolétarienne. Je leur ai dit et répété avec
toute la conviction, avec toute la force de persuasion dont j'étais
susceptible : « Il n'y a plus un instant à perdre. Trouvez le mot, le
geste, l'accent qui rompe enfin cette oppression intolérable. Vous
n'aurez pas à les chercher bien loin. Vous n'aurez qu'à laisser jaillir
librement ce qui s'est formé au fond de vous-même... ».
La lettre de Marcel Cachin apporte-t-elle ce mot, ce geste, cet
accent ? J'ai beau la lire et la relire, je suis obligé de confesser mon
amère déception."
(5) Commission Administrative Permanente, organe de direction de la SFIO. (6) Initiative personnelle, Aimé Quinson, député socialiste de l'Ain, a demandé au président du Conseil de dissoudre le PCF dans une lettre en date du 25 août 1939.
(7) Marty s'enthousiasme à l'évocation des Ukrainiens et des Blancs-Russiens "aujourd'hui libres".
Ce qu'il présente comme une libération correspond en fait à l'annexion
de la partie orientale de la Pologne par l'Union soviétique en vertu
d'un traité de frontières et d'amitié signé avec l'Allemagne le 28 septembre 1939. |