Le 26 septembre 1939, le Conseil des ministres adopte un décret-loi permettant au gouvernement de suspendre pendant le temps des hostilités le conseil municipal d'une commune "pour des motifs d'ordre public ou d'intérêt général" et de confier la gestion de ces communes à des "délégation spéciales". (Doc 1)
Ce décret-loi sera utilisé contre les municipalités communistes en raison de l'engagement du Parti communiste en faveur de la Paix avec Hitler. Suspendus, ces élus municipaux seront de surcroit déchus de leur mandat par la loi du 20 janvier 1940. Dernier élément, le Parti communiste engagera à l'été 1940 des négociations avec les autorités allemandes pour obtenir le rétablissement de ses municipalités.
Document 1 :
Décret-loi du 26 septembre 1939
relatif aux pouvoirs de tutelle administrative
sur les conseils municipaux et les maires en temps de guerre
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Le Président de la République française,
Sur la proposition du président du conseil, ministre de la défense nationale et de la guerre et des affaires étrangères, et du ministre de l'intérieur,
Vu la loi du 11 juillet 1938 sur l'organisation générale de la nation pour le temps de guerre;
Vu la loi du 19 mars 1939 tendant à accorder au Gouvernement des pouvoirs spéciaux;
Vu la loi du 5 avril 1884 sur l'organisation municipale;
Vu le décret-loi du 12 novembre 1938 relatif à l'administration départementale et communale;
Le conseil des ministres entendu,
Décrète :
Art. 1er. — En temps de guerre, dans le cas où, après en avoir été mis en demeure par le préfet, un maire néglige ou refuse de prendre une mesure d'intérêt communal, le préfet peut, par lui-même ou par un délégué spécial, se substituer au maire, à cet effet, mais à charge d'en rendre compte immédiatement au ministre de l'intérieur. Lorsqu'il s'agit d'une mesure présentant un intérêt intercommunal, le préfet peut se substituer, dans les mêmes conditions, aux maires des communes intéressées ou au président du comité syndical, si la mesure à prendre rentre par son objet dans les attributions d'un syndicat de communes.
Art. 2. — Cette mise en demeure peut être faite soit par lettre, soit par télégramme, soit par message téléphoné.
Elle doit indiquer le délai imparti aux maires ou aux présidents des comités syndicaux intéressés pour répondre au préfet dans l'une des formes indiquées à l'alinéa précédent.
Si aucune réponse n'est parvenue au préfet avant l'expiration du délai ainsi imparti, ce silence équivaut à un refus.
Art. 3. — En temps de guerre, le conseil municipal d'une commune ou le comité d'un syndicat de communes peut être pour des motifs d'ordre public ou d'intérêt général, suspendu jusqu'à la cessation des hostilités, par décret pris sur la proposition du ministre de l'intérieur. Le même décret constitue une délégation spéciale habilitée à prendre les mêmes décisions que le conseil municipal ou que le comité du syndicat.
Art. 4. — En temps de guerre le maire peut être, pour des motifs d'ordre public ou d'intérêt général, suspendu jusqu'à la cessation des hostilités, par décret pris sur la proposition du ministre de l'intérieur.
Art. 5. — En temps de guerre, en cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement du maire, le préfet peut désigner pour le remplacer dans la plénitude de ses fonctions un délégué choisi parmi les membres du conseil municipal.
Art. 6. — Le président du conseil, ministre de la défense nationale et de la guerre et des affaires étrangères, et le ministre de l'intérieur sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera soumis à la ratification des Chambres, conformément à la loi du 19 mars 1939, et qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 26 septembre 1939.
ALBERT LEBRUN.
Par le Président de la République :
Le président du conseil, ministre de la défense nationale et de la guerre et des affaires étrangères, ÉDOUARD DALADIER. Le ministre de l'intérieur, ALBERT SARRAUT. (Journal officiel du 27 septembre 1939) |