Dans une lettre datée du 31 janvier 1940, le Gouvernement de Edouard Daladier demande à la Chambre des députés de valider la déchéance de 67 députés communistes sur les 74 qui composaient le groupe parlementaire à la veille de la signature du Pacte germano-soviétique.
Cette démarche s'inscrit dans le cadre de la loi du 20 janvier 1940 qui, dans son article premier, prononce la déchéance de
plein droit des élus communistes qui n'ont pas publiquement rompu avec le Parti
communiste à la date du 26 octobre 1939 et qui précise, à son article 2, que la
déchéance des députés communistes sera constatée par la Chambre à la demande du
Gouvernement.
Après examen des cas mentionnés dans la lettre du 31 janvier 1940, la Chambre des députés vote le 20 février 1940 une résolution constatant la déchéance de 60 députés communistes. La Chambre n'a pas validé la déchéance de 7 députés communistes du groupe d'union populaire française estimant qu'ils avaient rompu dans les conditions prévues par loi du 20 janvier 1940.
Document 1 :
Lettre du 31 janvier 1940
du président du Conseil Edouard Daladier
au président de la Chambre des députés Edouard Herriot |
Monsieur le président,
La loi du 20 janvier 1940,
publiée au Journal officiel du 21 janvier, prononce la déchéance de
plein droit de tout membre d'une assemblée élective qui faisait partie
de la Section Française de l'Internationale Communiste, visée par le
décret du 26 septembre 1939, portant dissolution, des organisations
communistes, s'il n'a pas, soit par une démission, soit par une
déclaration rendues publiques à la date du 26 octobre 1939, répudié
catégoriquement toute adhésion au parti communiste et toute
participation aux activités interdites par le décret sus-visé.
Pour les membres des assemblées législatives, la déchéance, prononcée par la
présente loi, est constatée, à la demande du Gouvernement, par le Sénat
ou par la Chambre des députés.
En vue de
l'application de ces dispositions, vous avez bien voulu, sur ma demande,
me faire parvenir, aux dates des 25 et 26 janvier 1940 :
1°
La liste des 71 membres de la Chambre des députés qui faisaient encore
partie du groupe communiste à la date du 26 septembre 1939 compte tenu
des démissions antérieures à cette date de MM. Saussot, Fourrier et
Loubradou;
2° La copie des lettres de démission et des
déclarations qui vous ont été adressées postérieurement au 26 septembre
1939 par des membres de l'ancien groupe communiste et dont ceux-ci se
prévaudraient pour éviter leur déchéance.
J'ai,
d'autre part, demandé aux préfets et au 3e Tribunal Militaire de Paris
de me transmettre le texte des déclarations qui auraient pu être faites à
ce sujet, en dehors du Parlement, par des membres de ce groupe.
Il résulte de l'ensemble de ces documents, dont vous voudrez bien
ci-joint trouver le texte, qu'échappent de façon indiscutable à la
déchéance :
MM. Brout et Nicod qui ont, les 2 et 7 octobre
1939, déclaré avec netteté avoir rompu toute collaboration avec
l'ex-groupe communiste de la Chambre des députés et n'être plus inscrits
à aucun groupe, ainsi que M. Piginnier qui a donné sa démission de
député (démission dont il a été donné acte le 30 novembre 1939) et M.
Capron.
Par contre, et conformément aux dispositions précitées de la loi du
20 janvier 1940, le Gouvernement a l'honneur de demander à la Chambre
des députés de constater la déchéance encourue, du jour de la
publication de cette loi, par les députés, membres de l'ancien parti
communiste, dont les noms suivent, et qui n'ont pas rendu publique,
avant le 27 octobre 1939, une démission ou une déclaration répondant.
aux conditions fixées par l'article 1er de la loi :
MM.
Barel, Bartolini, Benoist, Berlioz, Billoux, Bonté, Brun, Catelas,
Cogniot, Colin, Cossonneau, Costes, Cristofol, Croizat, Dadot, Duclos
(Jacques), Duclos (Jean), Dutilleul, Fajon, Gaou, Giroux dit Gitton,
Grenier, Grésa, Guyot, Lareppe, Le Corre, Georges Lévy, Lozeray, Martel
(Henri), Marty, Mercier, Michels, Midol, Monmousseau, Môquet, Mouton,
Musmeaux, Parsal, Péri, Petit, Philippot, Pillot, Pourtalet, Prachay,
Prot, Quinet, Ramette, Rigal, Rochet, Thorez, Touchard, Tillon.
D'autre part, 15 députés produisent ou invoquent des démissions ou
des déclarations antérieures au 27 octobre, mais ne correspondant pas
aux termes de l'article 1er. Ce sont :
MM. Béchard,
Benenson, Cornavin, Daul, Declercq, Demusois, Dewez, Fouchard. Honel,
Jardon, Jean (Renaud), Langumier, Raux, Valat (Fernand), Vazeilles.
Tout en soumettant à la Chambre les déclarations de ces députés, le
Gouvernement est dans l'obligation de présenter également une demande de
constatation de déchéance en ce qui les concerne.
Veuillez agréer, monsieur le président, les assurances de ma très haute considération.
Le président du Conseil, Ed. DALADIER.
Le ministre de l'intérieur, A. SARRAUT.
(Journal officiel - Chambre des députés du 2 février 1940 p 101-102) |