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Falsification, censure et invention : trois méthodes utilisées par les apologistes du PCF pour prouver que son engagement dans la Résistance est antérieur au 22 juin 1941

Le 22 juin 1941, Hitler a mis à fin à son alliance avec Staline en attaquant l'URSS.

Cet événement a été l'un des faits majeurs de la Seconde Guerre mondiale puisqu'il a eu pour conséquence de faire entrer l'URSS dans la guerre.

Evénement majeur aussi pour la lutte contre les nazis en France puisqu'il a provoqué l'entrée du Parti communiste français dans... la Résistance.

La participation des communistes à la lutte contre l'occupant allemand a donc été consécutive à l'invasion de l'URSS par les Allemands le 22 juin 1941.

Ce fait historique est incontestable. Pourtant, il est toujours contesté par les apologistes du PCF. Leurs méthodes pour prouver que les communistes ont résisté avant le 22 juin 1941 : la falsification, la censure et l'invention.

Pour illustrer la première méthode, on citera trois exemples significatifs de textes communistes falsifiés.

Tout d'abord, le tract "Peuple de France" publié à la fin de juillet 1940 dans lequel le PCF appelait à la formation d'un Gouvernement de Paix communiste.

Les magiciens communistes ont sélectionné quelques phrases complètes ou incomplètes du texte original pour créer un appel à la Résistance crédible qu'il ont ensuite désigné comme l'appel du 10 juillet 1940 en raison de sa publication dans un numéro de l'Humanité daté du 10 juillet 1940 soit le jour même du vote de l'Assemblée nationale attribuant les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain. Symbole de la résistance et de l'anti-pétainisme du PCF, ce numéro de l'Humanité était... un faux.

Poursuivons avec le tract pacifiste "Appel au Peuple de France" diffusé au début de juillet 1940 par les communistes bordelais dirigés par Charles Tillon.

Les magiciens communistes ont aussi altéré ce tract pour en faire un appel à la Résistance sous le titre "Appel de Charles Tillon (17 juin 1940)". Par le choix de la date, ils en ont même fait le premier appel à lutter contre les Allemands. L'appel du Général de Gaulle ayant été radiodiffusé le lendemain.

Enfin, l'appel "Pour la formation d'un Front national de lutte pour l'indépendance de la France" du 15 mai 1941 dans lequel le PCF appelait les Français à se mobiliser pour l'indépendance de la France qui était menacée par tous ceux qui voulaient l'engager de nouveau dans la guerre soit aux côtés de l'Allemagne (les pétainistes) soit aux côtés de l'Angleterre (les gaullistes).

Après le 22 juin 1941, le Front national a profondément changé de nature pour devenir l'organisation de base de la Résistance communiste.

S'appuyant sur ce dernier fait, les magiciens communistes ont défendu la thèse que cette structure avait été créée en mai 1941 et que la Résistance communistes était donc antérieure au 22 juin 1941. Leur citation du texte original était toutefois amputée de toute référence à la Paix avec l'Allemagne, à l'impérialisme britannique et à la condamnation du Général de Gaulle. Quant à "la lutte pour l'indépendance nationale", ils l'associaient à la lutte contre l'occupant allemand pour libérer le territoire national. Or, dans le texte original, elle renvoyait à la neutralité de la France dans le conflit anglo-allemand.

Ne pouvant transformer tous les texte communistes plaidant pour la Paix avec Hitler en textes appelant à combattre les nazis, les apologistes du PCF ont nécessairement eu recours à la censure.

Le texte le plus significatif de cette censure : le programme de gouvernement publié par le Parti communiste clandestin en février 1941 sous le titre... "Pour le salut du peuple de France".

Dans ce programme, les communistes, ces combattants déterminés de l'antifascisme, proposaient non seulement d'établir des "relations PACIFIQUES" entre la France et l'Allemagne nazie mais aussi d'instaurer des "rapports fraternels entre le peuple français et le peuple allemand" !!!

Concernant l'invention, on mentionnera le cas des propositions communistes du 6 juin 1940. Ces propositions censées prouver la volonté du PCF de combattre les Allemands ne relèvent pas stricto-sensu de la Résistance puisque cette dernière s'est organisée dans le refus de l'armistice demandé par le Maréchal Pétain le 17 juin 1940.

Rappelons la thèse communiste : le 6 juin 1940, par des canaux officieux, la direction clandestine du PCF a transmis au gouvernement des propositions visant à défendre Paris. A leur grande déception, les communistes n'ont reçu aucune réponse.

Ces propositions seraient donc la preuve incontestable de la mobilisation des communistes contre l'envahisseur allemand. Quant à l'absence de réaction du Gouvernement Reynaud, elle témoignerait de sa trahison.

Petit problème : le document les contenant n'a pas été... conservé. Pas de chance. Pourquoi ne pas l'avoir fabriqué ? Manque de temps ou d'imagination ?

En tout état de cause, les propositions du 6 juin 1940 sont une invention. La preuve la plus probante est la suivante : elles n'ont jamais été mentionnées dans la propagande communiste (tracts, l'Humanité, brochures, revues etc...) avant... octobre 1943 et le tract "L'activité nationale et le Parti communiste : Constance et Inflexibilité". Comment expliquer ce silence sur la période antérieure ? La modestie ?

Dans ce texte d'octobre 1943, l'initiative communiste était placée aux "premier jours de juin". La date précise du 6 juin 1940 a été choisie après... le 6 juin 1944 et le débarquement des Alliés. Par ce choix réfléchi, les communistes ont institué non seulement une nouvelle date dans leur calendrier commémoratif mais en plus une date commémorative concurrente de celle du 6 juin 1944.

C'est ainsi par exemple que l'Humanité du 6 juin 1945 a commémoré pour la premier fois non seulement le débarquement allié du 6 juin 1944 mais aussi les propositions communistes du... 6 juin 1940.

Par le choix des titres, le journal communiste a clairement indiqué lequel de ces deux événements était le plus important :

- "Un acte historique / Les propositions communistes du 6 juin 1940".
- "Il y a un an aujourd'hui / Débarquement allié sur les plages de Normandie".

Le présent texte est composé de quatre Parties. Dans la Partie I, on montrera que l'entrée du PCF dans la Résistance est la conséquence directe de l'attaque de l'Allemagne contre l'URSS.

Les Parties II, III et IV seront respectivement consacrées aux cas de falsification, de censure et d'invention déjà mentionnés.


Partie I


Résistance communiste

La Résistance communiste a été consécutive à l'attaque de l'URSS par les armées allemandes le 22 juin 1941 et son objectif était la libération de l'Union soviétique.

Son acte fondateur a été une Directive de l'Internationale communiste du 25 juin 1941 co-signée par le secrétaire général du PCF, Maurice Thorez, qui s'était réfugié en Russie après sa désertion en octobre 1939 :

"Le moment est venu rechercher et organiser contacts directs avec mouvement gaulliste, dont partisans comprennent que lutte héroïque peuple soviétique contre agression hitlérienne répond intérêts peuple français et que libération France est liée à victoire Union soviétique. Collaboration doit s'établir sur la base suivante. Lutte commune pour libération nationale. Efforts communs contre ennemi commun, le fascisme allemand". (1)

Ce télégramme a mis fin à la ligne pacifiste que défendait le PCF depuis septembre 1939. En application de la nouvelle ligne, les communistes se sont engagés dans la lutte contre "le fascisme allemand" et n'ont donc plus fait référence à la paix avec Hitler. Ensuite, suivant la recommandation "rechercher et organiser contacts direct avec mouvement gaulliste", ils se sont alliés aux gaullistes Cette alliance était jugée utile et logique : "efforts communs contre ennemi commun". Conséquence, les gaullistes n'ont plus été dénoncés comme des traîtres au service de l'impérialisme anglais. Ils ont été célébrés comme des frères d'armes dans la lutte contre les nazis.

Il est aussi à noter que la libération de la France était subordonnée à celle de l'URSS. Preuve supplémentaire que l'objectif des staliniens français était la libération de l'Union soviétique.

Deux remarques supplémentaires. Tout d'abord, que tous ceux qui veulent honorer la mémoire des résistants communistes n'oublient jamais de remercier... Hitler. En effet, c'est Hitler qui a mis fin au Pacte germano-soviétique en attaquant l'URSS. Sans cette initiative, les communistes seraient encore alliés des nazis aujourd'hui.

Ensuite, il doit être particulièrement valorisant pour les staliniens français de savoir que Staline a tenu la promesse qu'il avait faite à Joachim von Ribbentrop, ministres des Affaires du Reich, le 23 août 1939 de ne jamais trahir Hitler :

"Le gouvernement soviétique prend le nouveau pacte très au sérieux. Il peut garantir sur son honneur que l'Union soviétique ne trahira pas son partenaire". (2)

(1) B. Bayerlein, M. Narinski, B. Studer, S. Wolikow, Moscou, Paris, Berlin. Télégrammes chiffrés du Komintern, 1939-1941, 2003, pp. 441-442.
(2) Nazi-Soviet relations, 1939-1941 p. 72 / Site Avalon.


Partie II


Appel du 10 juillet 1940

A la fin de juillet 1940, soit un mois après la signature de l'armistice franco-allemand illustrant la volonté du Maréchal Pétain de mettre fin à la guerre et d'engager dans les plus brefs délais des négociations de Paix avec Hitler, le Parti communiste lance un Appel au "Peuple de France".

Signé "Au nom du Comité Central du Parti Communiste Français" par Maurice Thorez et Jacques Duclos, secrétaire général et secrétaire du PCF, cet appel est un véritable plaidoyer pour la constitution... d'un Gouvernement de Paix communiste.

Pour justifier cette revendication et en même temps marquer la différence entre son projet pacifiste et celui du Maréchal Pétain, le Parti communiste affirme que seuls les communistes sont en mesure de négocier avec Hitler une "Paix dans l’indépendance complète et réelle de la France" ou encore "une paix véritable" car "seuls, les Communistes ont lutté contre la guerre".

Autres caractéristiques marquantes du texte : la condamnation de "l'impérialisme britannique", la célébration du "Pacte germano-soviétique", l'éloge de la fraternité franco-allemande ("la fraternité des peuples que de toutes nos forces nous voulons") ou encore la revendication portant sur "la libération des défenseurs de la Paix".
 
Par son contenu, ce tract prouve que la défaite de la France en juin 1940 et l'occupation allemande qui en a été la conséquence n'ont provoqué aucun changement dans la ligne pacifiste, anglophobe et germanophile défendue par le PCF depuis le début du conflit européen.
 
Sur ce constat, on posera la question suivante : doit-on considérer l'appel du PCF de juillet 1940 comme un acte de Résistance ou un acte de Collaboration ?

Le 22 juin 1941, Hitler met fin à son alliance avec Staline en attaquant l'URSS. A la suite de cette attaque le Parti communiste s'engagera dans la lutte contre l'occupant allemand pour libérer sa patrie : l'Union soviétique.

Dans la Résistance, il mènera aussi un combat contre la vérité en niant son pacifisme de la période antérieure avec un procédé très efficace : la citation tronquée qui permet de falsifier le contenu réel d'un texte.

Ainsi, l'appel au "Peuple de France" de l'été 1940 dans lequel il revendiquait la constitution d'un Gouvernement de Paix sera désormais célébré par la propagande communiste comme un appel à la Résistance sur la base d'un extrait falsifié du texte original dans lequel on aura supprimé toute référence à la Paix avec l'Allemagne et à l'impérialisme britannique.

Illustration de ce dernier point :

- phrase originale : "Jamais un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d'esclaves et si, malgré la terreur, ce peuple a su, sous les formes les plus diverses, montrer sa réprobation de voir la France enchaînée au char de l'impérialisme britannique, il saura signifier aussi à la bande actuellement au pouvoir, SA VOLONTE D'ETRE LIBRE."

- phrase falsifiée : "Jamais un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d’esclaves."

On notera que par la magie d'une coupe, une condamnation explicite de l'impérialisme britannique devient une condamnation implicite de l'impérialisme allemand. Le texte falsifié étant présenté comme un appel à la Résistance, les esclavagistes sont nécessairement les Allemands.

A la Libération, preuve que le mensonge est une vertu révolutionnaire, les communistes se présenteront comme des Résistants de la première heure en mettant en avant leur appel de juillet 1940 (rapport de Jacques Duclos à la réunion du Comité central du 31 août 1944).
 
Pour ajouter à leur gloire, ils affirmeront aussi, et ce pour la première fois, que cet appel a été diffusé dans un numéro de l'Humanité clandestine en date du 10 juillet 1940, soit le jour du vote de l'Assemblée nationale attribuant les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain (discours d'André Marty à la réunion du Comité central du 22 janvier 1945). Rappelons que sous la IIIe République l'Assemblée nationale désignait la réunion de la Chambre des députés et du Sénat.

La date de l'appel à la Résistance du PCF sera donc fixée... le 22 janvier 1945 soit près de 4 ans et demi après sa supposée diffusion. Elle sera désormais une date de commémoration pour le Parti, ses militants et ses sympathisants.

Le 10 juillet 1945 sera l'occasion d'une première célébration de l'événement... fabriqué par les communistes. Un exemple, l'Humanité du jour publiera un article titré... "Le 10 juillet 1940 Le Parti communiste français appelait à la lutte".
 
L'appel du 10 juillet 1940 sera l'argument massue qui sera systématiquement opposé à tous ceux qui mettront en cause le PCF pour son attitude entre juin 1940 et juin 1941.
 
Il est ainsi utilisé par la députée communiste Denise Ginollin au cours d'une polémique qui s'étale sur les séances des 5, 6, 9 et 11 décembre 1947 de l'Assemblée nationale (IVe République) et qui l'oppose au député MRP Pierre de Chevigné.

La polémique a porté sur l'attitude de la militante communiste en juin 1940. Cette dernière a été accusée d'avoir engagé au nom du PCF des négociations avec les Allemands pour obtenir la légalisation de l'Humanité et d'avoir bénéficié, après son arrestation par la police française, de leur intervention pour être libérée. Pour prouver ces accusations le député des Basses-Pyrénées a lu dans l'hémicycle plusieurs pièces du dossier d'instruction ouvert en juin 1940.

Denise Ginollin a dénoncé ces accusations comme des calomnies et les pièces utilisées comme des "faux dignes des officines de la Gestapo".

Pour prouver que son accusateur n'était qu'un menteur et un falsificateur, elle a mis en avant l'engagement du PCF dans la Résistance et marqué sa fierté d'avoir participé à la diffusion d'un numéro de l'Humanité clandestine en date du 10 juillet 1940 dans lequel était publié un appel à la lutte contre les Allemands sous les signatures de Maurice Thorez et de Jacques Duclos.

Le 12 décembre 1947, pour soutenir, document à l'appui, les déclarations de Denise Ginollin dans l'hémicycle, l'Humanité reproduit dans son édition du jour un fac-similé de l'Humanité du 10 juillet 1940 dans un article intitulé "A l'Assemblée nationale Denise Ginollin est accusatrice".

Dans un ouvrage publié en 1948 sous le titre Physiologie du Parti communiste français, Amilcare Rossi (pseudonyme d'Angelo Tasca) sera le premier à porter un jugement critique sur ce numéro de l'Humanité clandestine.
 
Dans une note consacrée à l'appel au "Peuple de France" de juillet 1940 et à sa falsification par le PCF après son entrée dans la Résistance, l'auteur montre que ce document historique n'est qu'un... "faux grossier".
 
Sur le fond, l'appel publié est un collage de phrases tirées du tract de juillet 1940. Sur la forme, première incohérence, la date de cette édition ne permet pas de la classer logiquement dans la série régulière des Humanité clandestines. Seconde incohérence : le nom du Directeur indiqué en manchette.
 
Composé en grande partie d'un exposé documenté et argumenté sur l'attitude du PCF pour la période allant de juin 1940 (défaite de la France) à juin 1941 (invasion de l'URSS par les armées allemandes), le livre de Rossi est un démenti factuel aux thèses officielles sur la Résistance communiste au cours de cette période. Il sera donc ignoré par tous ceux qui continueront de propager ces mensonges.

Dernier élément, le rôle des historiens qui sont a priori les intermédiaires entre le passé et le présent.
 
Les faits précédemment exposés n'empêcheront pas l'historiographie communiste pour les décennies à venir : 1) de célébrer l'Appel au "Peuple de France" de juillet 1940 comme un appel à la Résistance, 2) de le désigner comme l'Appel du 10 juillet 1940 en référence au texte publié dans le (faux) numéro de l'Humanité clandestine du 10 juillet 1940, 3) de mettre en avant la phrase suivante : "Jamais un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d’esclaves" !!!

Quant aux historiens et auteurs qui ne sont pas liés au PCF, ils adopteront trois positions distinctes. Il y a ceux qui reprendront la thèse communiste. Parmi ceux qui la contesteront, il y a ceux qui décriront le tract de juillet 1940 comme un appel à lutter contre Vichy et ceux, plus rares, qui en donneront le véritable contenu : un appel à la constitution d'un Gouvernement de Paix communiste.


Tract "Appel de Charles Tillon 17 juin 1940"

Ancien chef des Francs-tireurs et partisans (FTP), le bras armée de la Résistance communiste, Charles Tillon a témoigné de son action pendant la Seconde Guerre mondiale dans Les FTP (1962) et dans deux livres publiés après son exclusion du PCF en 1970 : On chantait rouge (1977) et Les FTP, soldats sans uniforme (1991).

Dans ces deux derniers livres, différence notoire avec le contenu du premier, il affirmait qu'à l'été 1940 il avait organisé la Résistance communiste dans la région de Bordeaux et que de fait il s'était émancipé de la direction centrale du PCF qu'il accusait non seulement d'avoir été soumise à l'IC et à ses consignes respectueuses du Pacte germano-soviétique mais aussi d'avoir tenté de reprendre une activité légale dans les premières semaines de l'occupation allemande.

Comme preuve de sa résistance et de sa dissidence, il mettait en avant trois documents dont un tract qui avait été diffusé dans la soirée du 17 juin 1940.

Ce tract était une réponse à l'intervention du Maréchal Pétain qui en début d'après-midi avait annoncé aux Français qu'il était entré en contact avec le gouvernement allemand pour négocier un armistice.

On notera que le dirigeant communiste qui était contraint à la clandestinité n'a eu besoin que de quelques heures pour rédiger, ronéoter et diffuser un tract. Quelle détermination !!!

Ce tract a été reproduit partiellement et sans titre dans On chantait rouge (1977). Dans Les FTP, soldats sans uniforme (1991), après avoir indiqué que le document avait pour titre "Appel aux travailleurs", Charles Tillon a publié l'intégralité du texte sous le titre "Appel de Charles Tillon" avec en complément une reproduction d'un fac-similé du tract qui porte comme titre "Appel de Charles Tillon (17 juin 1940).

On peut constater que Charles Tillon a mis quatorze ans pour trouver un titre et qu'il en propose trois. 

Ce dernier décrivait son tract comme un appel à la Résistance. On reproduira l'extrait suivant :

"Pour un gouvernement populaire s’appuyant sur les masses, libérant les travailleurs, établissant la légalité du parti communiste, LUTTANT CONTRE LE FASCISME HITLERIEN et les 200 familles, s’entendant avec l’URSS pour une Paix équitable, luttant pour l’indépendance nationale et prenant des mesures contre les organisations fascistes."

Au vu des affirmations de Charles Tillon, non seulement les communistes n'ont pas attendu la rupture du Pacte germano-soviétique pour combattre les Allemands puisqu'ils se sont engagés dès l'été 1940 dans la Résistance mais en plus ils ont été les premier résistants puisque l'appel du général de Gaulle a été radiodiffusé le 18 juin.

Résistant, il se définissait aussi comme un dissident en rupture avec la direction centrale du PCF et les Instructions de l'IC. Un exemple, l'extrait suivant tiré de On chantait rouge :

"Bien avant l'entrée des occupants dans Bordeaux, je me sentais en état de révolte contre l'Internationale. Ses injonctions venues de Bruxelles [antenne de l'IC], c'était l'acceptation de l'occupation. Or, depuis le 17 juin, mon premier appel désignait notre ennemi, c'était l'envahisseur !"

Toutes ces vérités historiques essentielles étaient absentes de son livre de 1962. Un oubli sûrement...

Avant même de contester les affirmations de Charles Tillon qui ne sont que des mensonges fondant une légende de plus sur la Résistance communiste, on notera que dans son tract sont juxtaposés un appel à lutter "contre le fascisme hitlérien" et un appel à négocier avec Hitler "une Paix équitable" dans le cadre d'une alliance avec l'URSS qui était elle-même liée à l'Allemagne par le Pacte germano-soviétique du 23 août 1939 et le Traité de frontières et d'amitié du 28 septembre 1939.

Doit-on déduire de cette contradiction fondamentale entre les objectifs annoncés que les communistes ont inventé l'appel à la Résistance pacifiste ?

Ironique, cet oxymore pourrait pourtant être utilisé pour décrire la position d'un historien comme Olivier Wieviorka qui dans son Histoire de la Résistance (2013) affirme que Charles Tillon a lancé un appel à la lutte le 17 juin 1940 et juge dans le même temps qu'il ne s'est pas émancipé de la ligne pacifiste du PCF !!! :

"On sait enfin que des responsables de premier ou de second plan lancèrent, dès 1940, des appels à la lutte. Tel fut notamment le cas d’Auguste Havez en juillet à Nantes ou de Charles Tillon qui, dans la nuit du 17 au 18 juin à Bordeaux, affirma dans un tract que « le peuple français ne veut pas de l’esclavage, de la misère ou du fascisme, pas plus qu’il n'a voulu de la guerre des capitalistes. Il est le nombre. Uni, il sera la force ». Le texte, par ailleurs, appelait à constituer un gouvernement « luttant contre LE FASCISME HITLÉRIEN et les 200 familles, s'entendant avec l’URSS pour une paix équitable, luttant pour l’indépendance nationale et prenant des mesures contre les organisations fascistes ».
Faut-il pour autant affirmer que deux lignes coexistaient au sein du Parti ? Ce serait aller un peu vite en besogne. Certes, le tract rédigé par Tillon faisait de l'Allemagne nazie, et non de l’Etat français, le principal adversaire. Pour le reste, il ne se démarquait guère de la vulgate : il exigeait la formation d’un gouvernement populaire, suggérait de s’entendre avec l’URSS – alors alliée du Reich – pour obtenir la paix, et ne soufflait mot de la Grande-Bretagne."

Une remarque supplémentaire. L'historien énonce comme une évidence incontestable que Auguste Havez a lancé un appel à la Résistance en juillet 1940. Ce "fait historique" n'est étayé par aucun document. En effet, contrairement au cas de Charles Tillon, ce supposé appel n'a jamais été retrouvé. En la matière, il faut constater qu'une simple déclaration du dirigeant communiste a suffi à convaincre les historiens.

Fin de la digression. Revenons à notre sujet.

Le meilleur moyen pour détruire les légendes communistes, c'est la vérité. On rappellera donc quelques faits historiques en s'appuyant sur des documents qui présentent la particularité de ne pas avoir été falsifiés.

A la fin de juin 1940 ou début du mois suivant, sous la direction de Charles Tillon, les communistes bordelais ont diffusé un tract titré "Appel au Peuple de France".

Réaction à l'armistice franco-allemand signé le 22 juin, cet appel, comme les trois tracts qu'ils avaient diffusés dans les deux semaines précédentes, plaidait pour la constitution... d'un Gouvernement de Paix communiste :

"Pour un gouvernement populaire s'appuyant sur les masses, libérant les travailleurs, rétablissant la légalité du PARTI COMMUNISTE, luttant contre le fascisme hitlérien et les 200 familles, s’entendant avec l’URSS pour une paix équitable, luttant pour l’indépendance nationale et prenant des mesures contre les organisations fascistes".

Y avait-t-il une contradiction entre l'engagement de négocier avec Hitler "une paix équitable" dans le cadre du Pacte germano-soviétique et celui de lutter contre le "fascisme hitlérien" ? La réponse est non. En effet, le "fascisme hitlérien" désignait... le Gouvernement Pétain et non l'envahisseur allemand. Une preuve pour les sceptiques : la brochure "Union du peuple pour libérer la France" d'août 1940. Dans cette publication, Charles Tillon décrivait le Gouvernement Pétain en ces termes : "l'Ordre nouveau du gouvernement de la 5e colonne, c'est le fascisme hitlérien !".

On notera que l'extrait cité est identique à celui tiré du tract "Appel de Charles Tillon (17 juin 1940)".

Constat logique puisque le tract "Appel de Charles Tillon (17 juin 1940)" est en fait une version altérée tant sur le fond que sur la forme du tract "Appel au Peuple de France".

L'objectif de la falsification étant de transformer un tract pacifiste du PCF en un appel à la Résistance de Charles Tillon antérieur, de surcroît, à celui du général de Gaulle.

Sur le fond, la censure la plus significative concerne la référence à l'Union soviétique : "La grande force de Paix qu'est l'UNION SOVIETIQUE était repoussée".

La célébration et de l'Union soviétique et de son pacifisme ne pouvait figurer dans un tract qui avait pour ambition d'illustrer et la dissidence et la résistance de Charles Tillon.

D'autant plus que la phrase censurée était une condamnation de la France et de l'Angleterre qui n'avaient pas suivi les recommandations de la diplomatie soviétique les incitant à faire la paix avec Hitler.

Sur la forme, l'altération la plus substantielle porte sur les mots "luttant contre le fascisme hitlérien" qui ont été mis en valeur avec l'utilisation des majuscules.

Cette mise en valeur était un élément supplémentaire devant prouver que le tract était un appel à la Résistance.

On terminera en rappelant à tous les apologistes de Charles Tillon qui aiment tant le célébrer comme le premier résistant, un extrait de sa brochure de "AOUT 1940" dans lequel il rendait hommage au patriotisme des communistes en ces termes :

"La vérité tragique est maintenant perceptible à tous les français honnêtes : les communistes accusés de trahison parce qu'ils s'opposaient aux plans criminels des 200 familles, condamnés à des siècles de prison pour avoir réclamé la paix quand elle était possible sans désastre, et pour s'être opposés à la transformation de la France en Dominion de l'Angleterre, les communistes étaient et demeurent les véritables patriotes dont l'amour véritable de la Patrie exige que celle-ci soit libérée de ses exploiteurs et de ses traîtres." (1)

Revenant sur l'action du Parti communiste au cours de la guerre de 1939-1940, Charles Tillon affirme que "les communistes étaient et demeurent les véritables patriotes" en raison de leur opposition à l'Angleterre et de leur engagement en faveur de la paix avec Hitler !!!

Au cours du conflit franco-allemand, l'ennemi n'était donc pas l'Allemagne nazie mais la France dont le bellicisme s'expliquait par sa soumission à l'impérialisme anglais.

Après cet éloge du patriotisme communiste, il appelle à libérer la France "de ses exploiteurs et de ses traîtres" autrement dit des capitalistes et des partisans de la guerre. Aucune référence aux Allemands qui devaient sûrement être... des touristes.

(1) R. Bourderon, Le PCF à l'épreuve de la guerre, 1940-1943, 2012, p. 56.


Appel "Pour la formation d'un Front National
de lutte pour l'Indépendance de la France
" du 15 mai 1941

Le 15 mai 1941, dans une France occupée par les armées allemandes depuis près de 11 mois, "Le Parti Communiste Français s'adresse à tous ceux qui pensent français et veulent agir en Français" dans un appel intitulé "Pour la formation d'un Front National de lutte pour l'Indépendance de la France".

Dans ce tract, le Parti communiste appelle les Français à se mobiliser pour l'indépendance de la France qui est menacée par tous ceux qui veulent l'engager de nouveau dans la guerre soit aux côtés de l'Allemagne (les pétainistes) soit aux côtés de l'Angleterre (les gaullistes) :

"IL NE FAUT PAS PERMETTRE QUE LE PEUPLE DE FRANCE, LES RESSOURCES DE NOTRE PAYS ET NOTRE TERRITOIRE SOIENT UTILISES DANS LA GUERRE ENTRE L'ALLEMAGNE ET L'ANGLETERRE. [...]
IL FAUT CONSTITUER UN LARGE FRONT NATIONAL DE LUTTE POUR L'INDEPENDANCE DE LA FRANCE. "

Initiative pacifiste, l'appel du 15 mai 1941 répond à des Instructions de l'IC contenues dans un télégramme du 26 avril 1941 portant les signatures de Georges Dimitrov, secrétaire général de l'IC, Maurice Thorez, secrétaire général du PCF, et André Marty, membre du Bureau politique du PCF et secrétaire de l'IC.

Dans son appel, pour convaincre les Français d'adhérer au Front National de lutte pour l'indépendance de la France le Parti communiste affirme que "l'indépendance de la France", c'est-à-dire le maintien du pays "en dehors de la guerre de rapine que se livrent les impérialistes de l'axe et leurs rivaux anglo-saxons", est la condition préalable à la "libération nationale" autrement dit à la fin de l'occupation allemande qui sera la conséquence d'un traité de Paix négocié avec succès par un Gouvernement communiste en raison de la neutralité de la France.

Le Front National de lutte pour l'indépendance de la France changera radicalement de nature après le 22 juin 1941 et l'invasion de l'URSS par les armées allemandes pour devenir un mouvement de Résistance ayant pour objectif la défaite de Hitler.

Dès lors, il sera présenté par le Parti communiste puis l'historiographie officielle comme un mouvement de Résistance créé le 15 mai 1941 sur la base de citations tronquées du texte original dans lesquelles on n'aura supprimé toute référence à la Paix avec l'Allemagne, à l'impérialisme britannique et à la condamnation du Général de Gaulle. Quant à la "lutte pour l'indépendance nationale", elle sera associée à la lutte contre l'occupant allemand pour libérer le territoire national et non plus à la neutralité de la France dans le conflit anglo-allemand.


Partie III


Programme "Pour le salut du Peuple de France"

En février 1941, dans une France occupée par les nazis depuis près de huit mois, se posant comme la seule véritable alternative au Maréchal Pétain et à sa politique de collaboration, le Parti communiste clandestin publie un programme de gouvernement dans un manifeste intitulé en toute modestie "Pour le salut du Peuple de France".

Signé par le "Comité Central du Parti Communiste Français (SFIC)", ce programme de "libération sociale et nationale" détaille les mesures de "politique intérieure et extérieure indispensables au salut du pays" que prendrait un "Gouvernement du Peuple".

En politique extérieure, pour mettre fin à l'occupation allemande, le Parti communiste propose non seulement d'établir des "relations PACIFIQUES" entre la France et l'Allemagne nazie mais aussi d'instaurer des "rapports fraternels entre le peuple français et le peuple allemand" !!!

On notera d'une part que le PCF associe la libération nationale à la signature d'un traité de Paix avec Hitler et nullement à la lutte armée, et d'autre part qu'il partage en matière de politique étrangère le même objectif que le régime de Vichy.

Sur le plan intérieur, les communistes plaident pour l'instauration d'un régime socialiste avec comme modèle l'Union soviétique de Staline !!!

Pour atteindre cet objectif ils présentent un ensemble de mesures modifiant radicalement l'organisation économique et politique du pays. Un exemple saisissant à la fois par son contenu, le vocabulaire utilisé et les personnes visées :

"Nationalisation sans indemnité des banques, compagnies d'assurances, mines, chemins de fer et de l'ensemble des sociétés capitalistes aryennes et juives (électricité, produits chimiques, textiles, métallurgie, gaz, etc...). [...]
Recensement des fortunes et biens des gros capitalistes (aryens et juifs) en vue de prélèvement ou confiscation pour subvenir aux besoins immédiats des masses laborieuses."

Ils appellent aussi à la création d'une juridiction d'exception visant à l'élimination des principaux dirigeants de la IIIe République qui sont nommément désignés dans le texte et qui sont accusés d'être... les responsables de la guerre franco-allemande de 1939-1940.

On fera remarquer d'une part que la libération sociale signifie l'abrogation du régime républicain synonyme de régime capitaliste et l'instauration d'un régime de type soviétique, et d'autre part que la suppression du régime républicain est aussi un point commun entre le PCF et le Maréchal Pétain.

Diffusé à 100 000 exemplaires, le programme du Parti communiste bénéficiera d'un second tirage identique le mois suivant. Document central de l'action politique du PCF, il sera reproduit en mars 1941 dans les 20 000 exemplaires des Cahiers du Bolchévisme du 1er trimestre 1941.

La propagande communiste se mobilisera pour le faire connaître à l'ensemble de la population française. Un exemple, le numéro spécial de l'Humanité du 1er mai 1941 - tiré à 1 000 000 d'exemplaires - publiera un article intitulé "Pour le Salut du Peuple de France" dans lequel on pourra notamment lire :

"C'est sous ce titre que le Parti communiste a publié son programme de libération sociale et nationale de la France qu'il faut faire connaître à la masse des Français pour leur montrer le chemin de la délivrance."

Le 22 juin 1941, Hitler met fin à son alliance avec Staline en attaquant l'URSS. A la suite de cette attaque le PCF abandonnera son projet de former un Gouvernement de paix pour s'engager dans la lutte contre l'occupant allemand avec l'objectif de libérer sa patrie : l'Union soviétique.

Expression d'une alternative communiste à la politique de collaboration du Maréchal Pétain, le programme "Pour le salut du Peuple de France" n'est pas dans les livres d'histoire. A sa lecture, on comprend pourquoi on a préféré le devoir d'amnésie au devoir de mémoire : son contenu pacifiste, antigaulliste, anti-républicain, anglophobe et germanophile est un cruel démenti à tous ceux qui défendent la thèse que le Parti communiste était dans la Résistance à cette pértiode de l'occupation allemande.

Au final s'il ne fallait retenir qu'un seul texte pour illustrer la ligne politique du PCF entre septembre 1939 et juin 1941, le choix se porterait sans aucune hésitation sur son programme de gouvernement de février 1941.


Partie IV


Contexte

On exposera brièvement la situation de la France au début de juin 1940.

Tout d'abord, sur le plan militaire. Achevée le 4 juin, l'évacuation vers l'Angleterre du contingent anglais et des forces françaises enfermés dans la poche de Dunkerque marque un premier succès de l'offensive allemande déclenchée le 10 mai. Après l'élimination de ces armées qui s'étaient engagées en Belgique et qui avaient ensuite tenté de se replier pour ne pas être prises à revers par les divisions blindées allemandes, la ligne de front avec le reste des armées françaises se stabilise sur une ligne qui suit les cours de la Somme et de l'Aisne. Une nouvelle phase des opérations militaires allemandes débute le 5 juin avec une attaque sur cette ligne de défense qui cède en quelques jours.

Ensuite, sur le plan politique. Le 5 juin, Paul Reynaud procède à un remaniement ministériel. Au nombre des départs : le ministre des Travaux publics, Anatole de Monzie. Au niveau des entrées : le général de Gaulle qui est nommé sous-secrétaire d'État chargé de la Défense nationale et de la Guerre.

Enfin, la situation du PCF. Secrétaire de la CGT, ancien membre du Bureau politique du PCF, Benoît Frachon assume la direction du Parti communiste clandestin depuis octobre 1939 en raison des absences de Maurice Thorez, secrétaire général du PCF, et de Jacques Duclos, secrétaire du PCF qui ont fui le territoire français pour échapper à la justice militaire. Le premier s'est réfugié à Moscou, le second à Bruxelles. Le Chef du Parti communiste clandestin quitte Paris vers le 12 juin pour s'installer dans le Limousin. Quelque jours auparavant - entre le 5 et le 10 juin - les dirigeants communistes se sont réunis et ont pris la décision de quitter la capitale avant l'arrivée des troupes allemandes. Deux exceptions : Gabriel Péri et Jean Catelas. Ce dernier a reçu la mission de diriger l'action du Parti dans la région parisienne. Symbolique cette action permettra toutefois de diffuser un numéro de l'Humanité le jour de l'entrée des troupes allemandes dans Paris le 14 juin... 


Propositions du 6 juin 1940

En octobre ou novembre 1943, le Parti communiste publie le tract "L'activité nationale et le Parti communiste : Constance et Inflexibilité".

Repris dans Les Cahiers du Communisme du 1er trimestre 1944, ce tract vise à "rétablir la vérité" sur l'attitude du Parti communiste entre 1939 et 1941 en montrant que sa lutte contre Hitler est constante et inflexible depuis... 1933, année de son arrivée au pouvoir.

Pour illustrer son patriotisme durant la période 1939-1941, le Parti communiste met en avant pour la première fois ses propositions de juin 1940 en faveur de la défense de Paris :

"En mai 1940, la France isolée, trahie est submergée; le peuple, les soldats résistent à l'invasion tandis que les dirigeants du pays pactisent, en arrivant à faire pleuvoir du haut de leurs avions sur les troupes qui se battent des tracts qui les désavouent, menaçant du Conseil de Guerre les officiers qui veulent arracher leurs unités à la captivité, livrant à l'ennemi l'armée et son matériel et, pour finir, liquident ce qui restait des institutions républicaines.
Que font les Communistes dans ces quarante jours tragiques ?
Comme Parti, par un acte qui aurait pu retourner le cours d'une guerre dont les conditions techniques sont telles que la défense des grandes villes y prend une importance primordiale, ils proposent la levée en masse pour défendre Paris, cerveau et cœur de la France.
En effet, dans les premiers jours de juin, alors que la cinquième colonne préparait sa jonction avec l'ennemi et que des officiers félons organisaient la reddition, des personnages touchant aux milieux ministériels cherchaient à toucher la direction illégale du Parti Communistes Français. Ils s'adressent à des gens dont ils savaient qu'ils pourraient rapporter leurs propos aux dirigeants du Parti. Il faudrait, disaient-ils, que les Communistes s'affirment pour la défense de Paris.
La direction du Parti Communiste devait plus que jamais se soustraire aux recherches de la police gouvernementale; la peine de mort avait été votée contre les Communistes. Voici la réponse qu’elle transmit en utilisant la même voie par laquelle lui étaient parvenus les propos ci-dessus :

« Le Parti Communiste considérait comme une trahison d’abandonner Paris aux envahisseurs fascistes. II considérait comme le premier devoir national d'organiser sa défense. Pour cela il faut :
1°) Transformer la caractère de la guerre, en faire une guerre nationale pour l'indépendance et la liberté.
2°) Libérer les députés et militants communistes ainsi que les dizaines de milliers d’ouvriers emprisonnés ou internés.
3°) Arrêter immédiatement les agents de l’ennemi qui grouillent dans les Chambres, dans les Ministères et jusqu'à l’Etat-Major et leur appliquer un châtiment exemplaire.
4°) Ces premières mesures créeraient l'enthousiasme populaire et permettraient une levée en masse qu'il faut décréter sans délai.
5°) Il faudrait armer le peuple, et faire de Paris une citadelle inexpugnable. »

On fît exactement le contraire de ce que préconisait le Parti Communiste. On donna à la guerre un caractère encore plus réactionnaire on arrêtant en masse des ouvriers dont le tort avait été simplement d'être délégués ouvriers ou des militants des syndicats des années auparavant. Les listes en étaient dressées an ministère de l'Intérieur. Les agents de la cinquième colonne n’eurent jamais autant de liberté pour consommer leur trahison. Au lieu d’exalter le courage et l'enthousiasme populaire, on fit tout pour soulever un vent de panique, on inventa la menace d'une « insurrection communiste », le ministre de la Propagande, Frossart, inaugura à la radio une campagne de calomnies contre les militants communistes et les Allemands étaient aux portes de Paris. On vida Paris de tous ceux qui auraient pu le mieux le défendre. Les ouvriers furent expédiés en masse sur les route l’exode sous prétexte de repliement de l'industrie alors que rien n'était prêt ailleurs, et on le savait, pour assurer la continuité du travail. On nomma le traitre Dentz gouverneur de Paris et son premier acte fut de livrer la capitale en la déclarant ville ouverte. Au lieu d’armer le peuple on distribua des armes à la police contre le peuple. Les agents eurent des mousquetons. La garde mobile fut dotée de plusieurs centaines de tanks légers qui manquaient au front et la radio, ainsi que la presse, annonçaient cyniquement que ces mesures étaient prises contre les communistes et les ouvriers parisiens.
La direction du Parti Communiste qui fit appel dans le sens indiqué plus haut ne put malheureusement pas toucher les grandes masses populaires qui eussent réagi et fait échouer les plans diaboliques des ennemis de la Patrie. Toute la police avait été mobilisée contra le Parti, ses moyens d'expression avaient été momentanément réduits, à la suite des arrestations massives et de la destruction de plusieurs centres communistes d’imprimerie."

Dans ce texte de novembre 1943, la réponse des communiste est placée aux "premier jours de juin". La date précise du 6 juin 1940 sera choisie après... le 6 juin 1944 et le débarquement des Alliés. Par ce choix réfléchi, les communistes institueront non seulement une nouvelle date dans leur calendrier commémoratif mais en plus une date commémorative concurrente de celle du 6 juin 1944.

Le récit des contacts entre le PCF et le Gouvernement Reynaud au début de juin 1940 s'étoffera au fil des années de nouveaux détails. La version définitive sera la suivante : à la fin de mai 1940, Paul Reynaud a confié au ministre des travaux publics, Anatole de Monzie, la mission de consulter la direction clandestine du PCF pour connaître sa position concernant la défense de Paris. A cette fin, le ministre a pris contact avec le physicien communiste Jacques Solomon qui comptait parmi ses connaissances le philosophe Georges Politzer qui était membre du Comité central du PCF. Ce dernier a transmis la requête du Gouvernement au responsable du Parti communiste clandestin : Benoît Frachon. Les propositions communistes pour la défense de Paris ont été transmises le 6 juin 1940 par le même circuit à Anatole de Monzie... qui avait démissionné la veille. Le Gouvernement n'a donné aucune réponse aux communistes.


Vérité communiste officielle

Pour le Parti communiste, ses propositions du 6 juin 1940 sont la preuve incontestable de sa mobilisation contre l'envahisseur allemand. Quant à l'absence de réaction du Gouvernement Reynaud, elle témoigne de sa trahison.

On notera que cette mobilisation antiallemande n'était pas une action — défendre Paris — mais une intention — proposer de défendre Paris — et que cette intention n'était pas le fruit d'une initiative spontanée mais la conséquence d'une demande gouvernementale.

En tout état de cause, ces propositions sont élevées au rang de vérité communiste officielle avec sa mention dans le rapport que Jacques Duclos prononce à la première réunion légale du Comité central du PCF qui se tient à Paris le 25 août 1944 :

"Quand Paris avait été menacé, le général Dentz avait été nommé gouverneur pour le livrer, tandis qu'il était vidé de ses ouvriers. Les tanks manquaient au front, mais il y en avait à Paris contre le peuple. La peur du peuple, et en particulier du peuple de Paris, avait déterminé la trahison.
A ce moment-là, notre Parti fit des propositions concrètes. Il proposait les mesures suivantes :
1° Transformer le caractère de la guerre, en faire une guerre nationale pour l'indépendance et la liberté;
2° Libérer les députés et militants communistes, ainsi que les dizaines de milliers d'ouvriers emprisonnés ou internés;
3° Arrêter immédiatement les agents de l'ennemi qui grouillent dans les Chambres, dans les ministères et jusque dans l'état-major et leur appliquer un châtiment exemplaire;
4° Ces premières mesures créeraient l'enthousiasme populaire et permettraient une levée en masse qu'il faut décréter sans délai;
5° Il faut armer le peuple et faire de Paris une forteresse inexpugnable.
Naturellement, les traîtres restèrent sourds à ces propositions de courage et de bon sens qui ne purent malheureusement pas être diffusées avec toute l'ampleur nécessaire." (1)



Commémoration

Dans son numéro du 6 juin 1945, l'Humanité commémore pour la première fois et le débarquement allié du 6 juin 1944 et les propositions communistes du... 6 juin 1940.

Par le choix des titres, le journal communiste indique clairement lequel de ces deux événements est le plus important :

- "Un acte historique / Les propositions communistes du 6 juin 1940".
- "Il y a un an aujourd'hui / Débarquement allié sur les plages de Normandie".

 On reproduira le paragraphe "Les propositions communistes" du premier article :

"Que font donc les communistes dans ces journées et heures cruciales ?
Comme parti, par un acte qui aurait pu retourner le cours d’une guerre dont les conditions techniques sont telles que la défense des grandes villes — l'expérience le prouve — y prend une importance primordiale, ils proposent la levée en masse, l’armement du peuple pour défendre Paris, cœur et cerveau de la France, pour faire de la capitale une citadelle inexpugnable.
Le Parti communiste français est cependant hors la loi. La répression, depuis de longs mois, s'abat inexorable sur ses militants menacés de la peine de mort par le décret Sérol. Il fait son devoir.
La direction du Parti communiste français s’emploie à faire remettre au gouvernement français ses propositions de salut national. Elles sont transmises, le 6 juin 1940, par l’intermédiaire de Georges Politzer, qui, plus tard, pris comme otage, devait tomber en héros sous les balles de la soldatesque nazie. Elles sont malheureusement rejetées par les gouvernants de juin 1940, qui firent exactement le contraire de ce que préconisait, le Parti communiste français."

Pour compenser le silence des années précédentes, les propositions communistes sont de nouveau évoquées à la une de l'Humanité du 12 juin 1945 :

Les propositions communistes du 6 juin 1940

POUR LA LEVEE EN MASSE

Nous avons publié mercredi dernier, sous la signature de Florimond Bonte, l'exposé de l'initiative prise le 6 juin 1940 par le Parti Communiste Français pour la levée en masse. Nous donnons ci-après le texte original des propositions.
La direction du Parti Communiste devait alors plus que jamais se soustraire aux recherches de la police gouvernementale, la peine de mort ayant été votée contre les communistes.
Malgré cela, elle fit la preuve du patriotisme le plus clairvoyant dans la note que le Comité Central fit parvenir au gouvernement.
On sait que celui-ci fit exactement le contraire de ce que préconisait le Parti Communiste.

Le Parti Communiste considérerait comme une trahison d’abandonner Paris aux envahisseurs fascistes. Il considère comme le premier devoir national d’organiser sa défense. Pour cela, il faut :
1° Transformer le caractère de la guerre, en faire une guerre nationale pour l’indépendance et la liberté;
2° Libérer les députés et militants communistes ainsi que les dizaines de milliers d'ouvriers emprisonnés ou internés ;
3° Arrêter immédiatement les agents de l’ennemi qui grouillent dans les Chambres, dans les Ministères et jusqu’à l’Etat-Major, et leur appliquer un châtiment exemplaire;
4° Ces premières mesures créeraient l’enthousiasme populaire et permettraient une levée en masse qu’il faut décréter sans délai;
5° Il faut armer le peuple, et faire de Paris une citadelle inexpugnable.

Dès l'année suivante, illustration de l'obsession des communistes de vouloir impérativement démontrer qu'ils ont résisté non seulement avant le 22 juin 1941 mais aussi avant le général de Gaulle, les propositions du 6 juin 1940 sont exhibées comme la preuve qu'ils ont été les premiers résistant.

En d'autres termes qu'ils ont fondé la Résistance avant même l'événement qui l'a justifié à savoir la demande d'armistice du 17 juin 1940.

Un exemple, dans son numéro du 22 juin 1946, France nouvelle, hebdomadaire du Comité central du PCF, affirme, à l'occasion des célébrations officielles de l'anniversaire de l'appel du 18 juin 1940, que les propositions du 6 juin 1940 ont été le premier appel à la Résistance !!!

Le titre de l'article en reflète d'ailleurs parfaitement le contenu : "Dès le juin 1940 / Le Parti Communiste Français prenait l'initiative de la résistance à l'ennemi".

On reproduira cinq extraits du texte. Le premier conteste la primauté de l'appel du général de Gaulle :

"Le 18 juin a été l'occasion de cérémonies officielles célébrant l'anniversaire de l'appel lancé en 1940 par le général de Gaulle. [...]
D'aucuns voient dans les paroles prononcées le 18 juin 1940 par le général De Gaulle au micro de Londres le premier signal de la Résistance Française, et ils décernent à celui qui les prononça le titre envié de «  premier résistant de France ».
Une telle interprétation des événements de juin 1940 présente le tort d'omettre le rôle primordial joué par notre Parti durant toute cette période cruciale sur le sol même de la patrie."

Le second reproduit le passage titré "L'appel historique du 6 juin 1940" :

"Lorsque cette politique contraire aux intérêts français porta ses fruits néfastes et que Paris se trouva menacé par l'avance des panzerdivisions ennemies le Parti Communiste tenta une fois encore d'éviter à la France et à la capitale les misères de l'occupation, la honte de la défaite.
La direction illégale de notre Parti transmit le 6 juin 1940 à des personnages touchant aux milieux ministériels les propositions suivantes :
Le Parti Communiste considérait comme une trahison d’abandonner Paris aux envahisseurs fascistes. II considérait comme le premier devoir national d'organiser sa défense. Pour cela il faut :
1° Transformer la caractère de la guerre, en faire une guerre nationale pour l'indépendance et la liberté.
2° Libérer les députés et militants communistes ainsi que les dizaines de milliers d’ouvriers emprisonnés ou internés.
3° Arrêter immédiatement les agents de l’ennemi qui grouillent dans les Chambres, dans les Ministères et jusqu'à l’Etat-Major et leur appliquer un châtiment exemplaire.
4° Ces premières mesures créeraient l'enthousiasme populaire et permettraient une levée en masse qu'il faut décréter sans délai.
5° Il faudrait armer le peuple, et faire de Paris une citadelle inexpugnable.
C'était là le dernier moyen qui s'offrait encore pour éviter la catastrophe. Malheureusement, le gouvernement, où Paul Reynaud succédait à l'homme de Munich, ne répondit qu'en faisant redoubler le terrorisme policier contre nos militants."

Le troisième évoque l'appel du général de Gaulle :

"C'est alors que, 12 jours après l'appel à la levée en masse lancée par le Parti Communiste Français, le général de Gaulle adressa aux Français, l'allocution suivante, prononcée à Londres, le 18 juin : [..]"

Le quatrième reprend le passage "Parti Communiste et Résistance" :

"Cette Résistance de l'intérieur, où les dangers et les risques sont immenses, le Parti Communiste Français y prend part, activement, dès juin 1940.
Certains de nos adversaires, voulant mettre en cause le caractère national de la politique suivie par notre Parti, prétendent que celui-ci n'est entré dans la Résistance qu'à partir de juin 1941, depuis l'agression hitlérienne contre l'Union Soviétique. Rien n'est plus faux.
Nous avons vu que le Parti Communiste Français prenait nettement position, dès avant le 18 juin 1940, dès avant la chute de Paris.
Comment oublier que le Parti Communiste Français a été la seule formation politique d'avant guerre à s'intégrer - d'un seul bloc - dans la lutte contre les nazis et les valets vichystes à leur dévotion.
Comment oublier que le Parti Communiste Français fut toujours à la pointe du combat contre l'occupant, comme en témoignent les innombrables faits d'armes des Francs-Tireurs et Partisans Français ?"

Le dernier extrait porte sur les appels du 10 juillet 1940 et du 15 mai 1941 qui sont évoqués dans le passage "Des faits, en voilà" :

"C'est en juillet 1940 que les secrétaires du Parti, Maurice Thorez et Jacques Duclos lançaient par la voie de la presse clandestine, l'appel suivant au peuple de France :
La France encore toute sanglante veut vivre libre et indépendante. Jamais un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d'esclaves. La France ne deviendra pas une sorte de pays colonisé, la France au passé si glorieux ne s'agenouillera pas devant une équipe de valets prêts à toutes les besognes. C'est dans le peuple que résident les grands espoirs de Libération nationale et sociale. Et c'est autour de la classe ouvrière ardente et généreuse, pleine de confiance et de courage, que peut se constituer le Front de la Liberté, de l'Indépendance et de la renaissance de la France.
Paroles remarquables par leur lucidité, leur sens aigu des réalités, leur patrimoine, et qui se passent de commentaires. [...]
Enfin, c'est le 15 mai 1941 que le Parti Communiste Français mettait en application l'idée du rassemblement de tous les patriotes, sans distinction de convictions politiques ou religieuses, au sein d'un Front National de lutte pour l'indépendance de la France. Il était solennellement déclaré ce jour-là :
Guidé par le souci exclusif de réaliser l'union de la Nation pour la cause sacrée entre toutes de l'indépendance nationale, le Parti Communiste, mettant au-dessus de tout l'intérêt du pays, déclare solennellement qu'en vue d'aboutir à la création d'un large Front de Libération nationale, il est prêt à soutenir tout gouvernement français, toute organisation et tous les hommes dont les efforts seront orientés dans le sens d'une lutte véritable contre l'oppression nationale subie par la France et contre les traitres au service de l'envahisseur.
Tels sont les documents irréfutables qui démontrent l'action nationale engagée contre l'ennemi par le Parti Communiste, avant comme après le message radiodiffusé du général de Gaulle.
Tels sont les documents irréfutables qui clouent au pilori les calomniateurs de notre Parti."


Absurdité

Avant même de prouver que les propositions du 6 juin 1940 sont une fiction inventée par les communistes, on fera remarquer l'absurdité de la démarche en elle-même.

En effet, si l'on suit le récit communiste, le gouvernement Reynaud, qui combattait les communistes parce qu'ils étaient pour la Paix avec Hitler, les aurait sollicités pour organiser la défense de Paris et n'aurait formulé aucune réponse à la réaction positive des communistes.

A l'inverse, les communistes, qui accusaient le Gouvernement Reynaud de trahison parce qu'il ne voulait pas faire la Paix avec les nazis, auraient accueilli favorablement sa demande de défendre Paris et jugé ensuite que son absence de réponse était la preuve de... sa trahison.


Invention

De nombreux éléments permettent d'affirmer que les propositions du 6 juin 1940 sont en fait une invention du Parti communiste de la fin de 1943 et qu'elles s'inscrivent dans sa tentative de réécrire l'Histoire et plus précisément de transformer son pacifisme de 1939-1941 en patriotisme.

Tout d'abord, il n'existe aucun exemplaire des propositions remises au Gouvernement Reynaud le 6 juin 1940. Ce fait est d'autant plus surprenant que le tract publié en octobre en 1943 précise que ces propositions ont fait l'objet d'une diffusion limitée dans le public : "La direction du Parti Communiste qui fit appel dans le sens indiqué plus haut ne put malheureusement pas toucher les grandes masses populaires."

Ensuite, la presse communiste de juin 1940 ne fait aucune référence à ces propositions touchant à la défense de Paris. Mieux, elles ne seront jamais mentionnées dans la propagande communiste (tracts, l'Humanité, brochures, revues etc...) avant la fin de...1943 et le tract "L'activité nationale et le Parti communiste : Constance et Inflexibilité". Comment expliquer ce silence sur la période antérieure ? La modestie ?

De même, il n'y a rien dans les échanges à la même période entre le Parti communiste et l'Internationale communiste concernant un engagement des communistes dans la lutte armée pour défendre Paris.

Enfin, il est à noté qu'aucun membre du Gouvernement Reynaud n'a jamais témoigné avoir eu directement (Paul Reynaud et Anatole de Monzie) ou indirectement (les autres membres comme... le général de Gaulle) connaissance de cette initiative communiste.


L'Humanité clandestine

Illustration du pacifisme du PCF en mai-juin 1940 : l'Humanité clandestine.

Dans tous ses numéros diffusés entre le 10 mai 1940 (offensive allemande) et le 17 juin 1940 (demande d'armistice), l'organe central du Parti communiste français a appelé à la constitution d'un Gouvernement de Paix communiste.

Premier numéro publié après l'offensive allemande déclenchée le 10 mai, l'Humanité n° 46 du 15 mai 1940 réagit à cet événement en appelant les Français à se mobiliser pour... la paix :

"C'est ainsi que nous imposeront le gouvernement dont parlait Maurice Thorez dans ce journal :
« Un gouvernement de paix s'appuyant sur les masses populaires, donnant des garanties contre la réaction, assurant la collaboration avec l'Union Soviétique pour le rétablissement de la paix générale ». Un gouvernement assurant « l'indépendance de notre pays en le libérant de la tutelle des agents du capital français et anglais »."

Les trois numéros suivants ont été publié dans la même semaine :

l'Humanité n° 47 du 17 mai 1940 :

"PEUPLE DE FRANCE ! Pour la paix, le pain, la liberté, l'indépendance, SOIS UNIS !
Lutte pour :
Un gouvernement de paix, s'appuyant sur les masses populaires, prenant des mesures contre la réaction, un gouvernement qui s'entende sans délai avec l'Union Soviétique pour le rétablissement de la Paix générale dans le monde."

l'Humanité n° 48 du 20 mai 1940 :

"Il faut constituer un gouvernement de paix, s'appuyant sur les masses populaires, prenant des mesures immédiates contre la réaction et s'entendant avec l'URSS pour rétablir la paix générale."

l'Humanité n° 49 du 24 mai 1940 :

"L'intérêt de la patrie, pour le peuple travailleur, se résume dans les mots : PAIN, LIBERTE, PAIX.
Seul un gouvernement du peuple, s'appuyant sur les masses populaires, prenant des mesures contre la réaction, et réalisant une entente avec l'Union Soviétique pour le rétablissement de la paix, peut lui assurer satisfaction."

Le numéro suivant porte le n° 54 et est daté du 14 juin 1940. Il a été préparé après le départ de Benoît Frachon. Conformément à une réunion qui s'était tenue entre le 5 et le 10 juin, le Chef du Parti communiste clandestin a quitté la capitale avec ses camarades avant l'arrivée des troupes allemandes. Deux exceptions : Gabriel Péri et Jean Catelas. Ce dernier a reçu la mission de diriger l'action du Parti dans la région parisienne. Symbolique cette action a toutefois permis la diffusion d'un numéro de l'Humanité le jour de... l'entrée des troupes allemandes dans Paris le 14 juin.

l'Humanité n° 54 du 14 juin 1940 :

"Le peuple veut un gouvernement qui s'appuie sur les masses populaires, qui libèrent les communistes, qui mettent en prison les fascistes et tous les hitlériens et tous les responsables de 5 ans de politique extérieure pro-fasciste, qui rétablisse les libertés démocratiques, qui permettent au parti communiste de s'exprimer librement, aux syndicats dissous de défendre les droits des ouvriers, aux élus communistes de défendre les travailleurs, paysan, petits commerçants, un gouvernement qui soulage les petites gens et prenne des mesures pour la confiscation des bénéfices de guerre et le prélèvement sur les grosses fortunes.
Un gouvernement qui s'entendent avec l'Union soviétique pour rétablir la paix générale dans le monde".

On fera remarquer que ce texte accuse le gouvernement du Font populaire d'avoir mené une "politique extérieure pro-fasciste" !!!

Le numéro suivant a été le premier numéro diffusé sous le responsabilité de Jacques Duclos qui a pris la direction du Parti communiste clandestin à son arrivé dans la capitale le 15 juin après avoir quitté quelques jours plus tôt Bruxelles.

l'Humanité n° 55 du 17 juin 1940 :

"Est-ce que la Cité de Londres obtiendra la continuation du massacre de nos frères et de nos fils pour permettre à l'Angleterre impérialiste avec ses 40 Millions d'habitants, d'en exploiter 400 Millions ?
Ou la volonté de paix du peuple français obtiendra-t-elle gain de cause ?
C'est du peuple lui-même que dépend la réponse ! Par notre action nous devons imposer une paix dans la sécurité, en exigeant par tous les moyens, un gouvernement s'appuyant sur les masses populaires, s'entendant avec l'URSS, pour le rétablissement de la paix générale dans le monde."