En décembre 1940, dans un Appel aux "Etudiants" rendant hommage à leur manifestation du 11 novembre sur les Champs-Elysées, le Parti communiste et les Jeunesses communistes invitent la jeunesse étudiante à se mobiliser contre "l'impérialisme britannique" et à soutenir la constitution d'un Gouvernement de Paix communiste qui s'engagera avec l'Allemagne d'Hitler dans une "vraie collaboration internationale" à l'opposé de la fausse collaboration incarnée par le Maréchal Pétain. (Doc.1)
Manifestation du 11 novembre 1940
Le
11 novembre 1940, bravant l'interdit de l'occupant allemand, des
centaines de lycéens et d'étudiants parisiens manifestent à l'Etoile et
sur les Champs-Elysées pour commémorer l'armistice victorieux de 1918. Cette
manifestation patriotique où l'on scande des "Vive de Gaulle !" est réprimée par les troupes allemandes
avec la complicité de la police française. Le bilan se traduit par de
nombreux blessés graves et légers auxquels vient s'ajouter l'arrestation
de plus d'une centaine de manifestants qui seront libérés après
plusieurs semaines de détention. Les rumeurs concernant des morts ne
seront pas confirmées par les faits. Autres conséquences : la révocation
du Recteur Gustave Roussy et la fermeture de l'Université de Paris.
A la suite de cet événement, les communistes diffusent en décembre 1940 un Appel aux "Etudiants" signé par les Régions parisiennes du Parti Communiste Français et les Régions parisiennes de la Jeunesse Communiste de France.
Cet
Appel se compose de quatre parties. Le texte débute par un hommage aux manifestants du 11 novembre dans lequel les communistes soulignent que leur mobilisation a exprimé leur désir "de vivre dans un pays libre et indépendant". Point central de leur projet pour la France, le PCF et la JCF s'attachent ensuite à montrer que la libération du territoire national sera
la conséquence d'un traité de Paix négocié par un Gouvernement
communiste et non le résultat d'une lutte armée : "ce n'est pas par la guerre que la France vaincue redeviendra libre et indépendante. C'est par la révolution socialiste".
Dans la partie suivante, ils invoquent l'exemple des relations pacifiques entre l'URSS et l'Allemagne pour affirmer qu'un Gouvernement communiste
sera en mesure de négocier avec succès un traité de Paix franco-allemand
dans le cadre d'une "vraie collaboration internationale". Enfin, ils invitent les
étudiants à s'engager dans "la voie du salut" en faisant le choix de la Révolution socialiste.
Par son contenu l'Appel aux "Etudiants !" de décembre 1940 est une parfaite illustration de la ligne pacifiste, anglophobe et anti-gaulliste du Parti communiste.
Hommage aux manifestants du 11 novembre 1940
Dans
la première partie du tract les communistes rendent hommage à
l'engagement et aux sacrifices des étudiants qui ont participé à la manifestation du 11
novembre 1940.
Sur
le premier point, ils approuvent la mobilisation étudiante en avançant
cinq motifs : les étudiants parisiens ont manifesté, "malgré l'interdiction de l'occupant", pour affirmer leur désir "de vivre dans un pays libre et indépendant", pour dénoncer le régime de Vichy, pour condamner "la propagande barbare de l'antisémitisme agencée par les
capitalistes" et enfin pour protester contre l'arrestation du professeur Paul Langevin.
On fera plusieurs remarques. D'abord, on notera que dans cet hommage de décembre 1940 les Régions parisiennes du Parti Communiste Français et les Régions parisiennes de la Jeunesse Communiste de France ne revendiquent aucune responsabilité dans l'organisation de la manifestation patriotique du 11 novembre 1940.
Ensuite, "l'occupant", qui est désigné quatre fois par ce terme dans tout le texte, n'a ni nationalité, ni idéologie, ni chef. Une amnésie passagère sûrement...
Autre élément, l'antisémitisme est présenté comme un fléau du capitalisme et non du nazisme.
Enfin, le tract mentionne le professeur Paul Langevin dont l'arrestation a été à l'origine du rassemblement communiste organisé le 8 novembre 1940 devant le Collège de France et passe sous silence le Général de Gaulle dont le nom a été scandé à la manifestation du 11 novembre 1940.
Sur le second point, les communistes condamnent la répression policière et les injures de la presse parisienne.
Deux
remarques : 1) le tract ne dénombre aucun étudiant ou lycéen communiste
parmi les victimes, 2) il ne mentionne pas la participation des
Allemands à la répression de cette manifestation parisienne.
Paix par la Révolution socialiste
Dans la deuxième partie, les communistes entendent démontrer aux
étudiants qui ont manifesté pour l'indépendance de la
France que le projet pacifiste du PCF
répond à cette exigence.
Cette
stratégie - consistant à mettre en avant le thème de l'indépendance de
la France pour recruter dans le milieu étudiant - a été envisagée dès
l'été 1940 comme le prouve le rapport à l'IC du 5 août 1940 dans lequel Jacques Duclos, responsable du Parti communiste clandestin,
fait notamment le constat d'une jeunesse étudiante favorable à l'Angleterre et au
Général de Gaulle :
"Des renseignements que
nous avons concernant les milieux estudiantins il résulte qu'il y a
parmi les étudiants un courant anti-allemand généralement anti-nazi, une
hostilité plus ou moins grande à l'égard du gouvernement Vichy avec une
sympathie assez marquée pour l'Angleterre et pour de Gaulle (dans notre
propagande nous ne disons rien de l'Angleterre ni de ce général depuis
des semaines). Ces mêmes étudiants sont dans l'expectative en ce qui
concerne l'URSS, mais on peut les rassembler et les faire évoluer sous
le drapeau de la lutte pour l'indépendance de la France."
Tract de décembre 1940, l'Appel aux "Etudiants !" affirme que la France ne pourra recouvrer son "indépendance" qu'à la condition de se libérer de "la sujétion de l'impérialisme britannique" et de faire "la Paix" avec l'Allemagne !!!
Dans une France occupée par les armées du IIIe Reich, les communistes continuent de dénoncer l'Angleterre impérialiste comme ils l'ont fait pendant toute la durée de la guerre de 1939-1940 quand ils affirmaient que les dirigeants français étaient soumis à la volonté des banquiers de Londres. Condamnant toute alliance avec l'Angleterre capitaliste, ils considèrent que le partenaire légitime de la France doit être l'URSS.
Autre élément, les communistes écartent clairement tout recours aux armes pour libérer la France estimant que c'est la signature d'un traité de Paix franco-allemand qui permettra la libération du territoire national et et le retour des prisonniers de guerre.
La condamnation de l'impérialisme anglais et le rejet de la lutte armée sont une condamnation explicite du mouvement gaulliste et de toute forme de Résistance.
Pour négocier la Paix avec l'Allemagne il sera nécessaire de constituer un Gouvernement communiste, c'est pour cette raison que le tract plaide pour "la révolution socialiste".
Le projet du Parti communiste est donc sans aucune ambiguïté un projet pacifiste : "ce n'est pas par la guerre que la France vaincue redeviendra libre et indépendante. C'EST PAR LA REVOLUTION SOCIALISTE".
Tract de décembre 1940, l'Appel aux "Etudiants !" affirme que la France ne pourra recouvrer son "indépendance" qu'à la condition de se libérer de "la sujétion de l'impérialisme britannique" et de faire "la Paix" avec l'Allemagne !!!
Dans une France occupée par les armées du IIIe Reich, les communistes continuent de dénoncer l'Angleterre impérialiste comme ils l'ont fait pendant toute la durée de la guerre de 1939-1940 quand ils affirmaient que les dirigeants français étaient soumis à la volonté des banquiers de Londres. Condamnant toute alliance avec l'Angleterre capitaliste, ils considèrent que le partenaire légitime de la France doit être l'URSS.
Autre élément, les communistes écartent clairement tout recours aux armes pour libérer la France estimant que c'est la signature d'un traité de Paix franco-allemand qui permettra la libération du territoire national et et le retour des prisonniers de guerre.
La condamnation de l'impérialisme anglais et le rejet de la lutte armée sont une condamnation explicite du mouvement gaulliste et de toute forme de Résistance.
Pour négocier la Paix avec l'Allemagne il sera nécessaire de constituer un Gouvernement communiste, c'est pour cette raison que le tract plaide pour "la révolution socialiste".
Le projet du Parti communiste est donc sans aucune ambiguïté un projet pacifiste : "ce n'est pas par la guerre que la France vaincue redeviendra libre et indépendante. C'EST PAR LA REVOLUTION SOCIALISTE".
"Vraie collaboration internationale"
Dans
la troisième partie, les communistes mettent en avant l'exemple de
l'URSS pour convaincre les étudiants que la Révolution socialiste
garantira la Paix avec l'Allemagne.
1) l'URSS : modèle historique.
Le tract fait d'abord référence à la Révolution russe qui a permis aux bolchéviks de faire la Paix avec l'Allemagne en 1918 :
"Comme c'est par la Révolution socialiste que la Russie, poussée à l'abime par
le Tsar, a recouvré sa force, sa liberté, son prestige, a fait de sa
jeunesse la plus heureuse du monde, a mis à la place d'honneur le
Travail et la Science".
Thème récurrent de la propagande communiste, l'exemple bolchéviks de 1918 sera célébré dans la brochure "Jeunesse de France" diffusée en janvier 1941 par les Jeunesses Communistes :
"Jeune
homme de vingt ans, les communistes ne veulent pas te farder la vérité.
C'est leur héroïque destin d'aller souvent contre le courant. Nous
proclamons dès lors sans réticence que si nous avions dirigé les
destinées de la France en juin 1940, comme
les bolchéviks dirigeaient les destinées de la Russie en 1918, NOUS AURIONS MIS FIN A LA GUERRE, NOUS AURIONS SIGNÉE LA PAIX COMME LES BOLCHEVIKS L'ONT SIGNÉE EN 1918.
La
paix que signèrent les bolchéviques en 1918 était très dure. Mais elle
était signé par un gouvernement du peuple qui s'attachait à la
réorganisation socialiste du pays, qui expropriait les capitalistes et
les propriétaires fonciers.
La
paix qu'eût signée UN GOUVERNEMENT FRANÇAIS POPULAIRE, AMI ET ALLIE DE L'UNION SOVIÉTIQUE, eût été le signal du relèvement du pays dans l'indépendance".
2) l'URSS : modèle des négociations avec l'Allemagne.
Après
l'argument historique, les communistes mettent en avant que c'est le
système économique d'un pays qui détermine le succès ou non des
négociations avec l'Allemagne.
Pour
étayer leur démonstration ils comparent les négociation menées par
Molotov à Berlin en novembre 1940 à celles conduites par Pétain en
octobre 1940 au cours de sa rencontre avec Hitler.
Dans le premier cas, "l'URSS sort de la négociation plus forte et plus prestigieuse" au motif que Molotov est le représentant de "l'ordre socialiste"
On fera remarquer que le tract ne précise pas l'objet de ces négociations : Viatcheslav Molotov,
chef du gouvernement soviétique et ministre des Affaires étrangères, a
séjourné à Berlin, du 12 au 14 novembre 1940, pour négocier avec le Chancelier Hitler et Joachim Ribbentrop l'adhésion de l'URSS au Pacte tripartite qui a été signé le 27 septembre 1940 entre l'Allemagne, le Japon et l'Italie. Ces
négociations visaient à organiser le partage de l'Europe et de l'Asie
entre les quatre dictatures. Elles ont échoué au vu des prétentions
soviétiques sur l'Europe danubienne et balkanique.
Dans le second cas, "la France sort de la négociation un peu plus exsangue, un
peu plus affaibli" au motif que Pétain est le représentant du "vieil ordre capitaliste, décrépi et condamné".
Notons
que le régime de Vichy est condamné par les communistes parce qu'il
sert les oligarchies capitalistes et non pour son projet pacifiste.
Conclusion
de cette démonstration, si la France adopte un régime socialiste, elle
pourra négocier avec succès avec l'Allemagne d'Hitler.
3) l'URSS : modèle d'un gouvernement communiste.
Prenant
toujours exemple sur l'URSS dont les relations pacifiques avec
l'Allemagne doivent servir de modèle aux relations franco-allemandes,
les communistes précisent ce que serait leur action en politique
étrangère s'ils étaient "Maîtres du pouvoir en France".
a) "ils défendraient la vraie collaboration internationale fondée sur l'égalité des droits entre les peuples".
Après avoir rappelé qu' "aucune
revanche militaire ne sauvera la France", les communistes affirment que le traité de Paix qu'il signeront avec Hitler sera conforme aux intérêts du peuple français et aux intérêts du peuple allemande au motif que les deux parties négocieront sur un pied d'égalité. Ce traité de Paix sera pour cette raison la manifestation d'une véritable collaboration entre la France communiste et l'Allemagne nazie.
Ils mettent en avant ces éléments avec un objectif précis : souligner la différence entre la collaboration communiste - "la vraie collaboration" - et la collaboration pétainiste. La première par ses caractéristiques garantira la paix.. La seconde sera un échec parce qu'elle est soumise aux exigence allemandes.
Ils mettent en avant ces éléments avec un objectif précis : souligner la différence entre la collaboration communiste - "la vraie collaboration" - et la collaboration pétainiste. La première par ses caractéristiques garantira la paix.. La seconde sera un échec parce qu'elle est soumise aux exigence allemandes.
Cette collaboration communiste a été définie dans un texte publié en décembre 1940 sous le titre "La politique de Montoire-sur-(le-)Loir".
b) "Ils proclameraient le droit à indépendance des peuples coloniaux".
Le soutien à "l’indépendance des peuples coloniaux" vise un double objectif : ne pas permettre l'implantation de la France Libre sur les territoires de l'Empire français et empêcher la mobilisation de ces peuples dans la guerre contre l'Allemagne nazie.
c) "Ils briseraient l'isolement de la France et grâce à eux notre pays ne serait ni bafoué, ni affamé, parce qu'il serait l'allié de l'Union Soviétique".
La revendication d'une alliance diplomatique et économique avec l'Union soviétique est une constante de la propagande communiste qui présente l'URSS comme le modèle et la garantie de la Paix avec l'Allemagne.
Pour terminer, on mentionnera que tous ces engagements seront repris dans le programme de gouvernement publié par le Parti communiste en février 1941 sous le titre "Pour le salut du Peuple de France" :
Le soutien à "l’indépendance des peuples coloniaux" vise un double objectif : ne pas permettre l'implantation de la France Libre sur les territoires de l'Empire français et empêcher la mobilisation de ces peuples dans la guerre contre l'Allemagne nazie.
c) "Ils briseraient l'isolement de la France et grâce à eux notre pays ne serait ni bafoué, ni affamé, parce qu'il serait l'allié de l'Union Soviétique".
La revendication d'une alliance diplomatique et économique avec l'Union soviétique est une constante de la propagande communiste qui présente l'URSS comme le modèle et la garantie de la Paix avec l'Allemagne.
Pour terminer, on mentionnera que tous ces engagements seront repris dans le programme de gouvernement publié par le Parti communiste en février 1941 sous le titre "Pour le salut du Peuple de France" :
"1° Libération du territoire national et des prisonniers de guerre.
Pour mener cette tâche à bien, le Gouvernement du Peuple mettrait tout en
œuvre pour établir des relations PACIFIQUES avec tous les peuples; il
s'appuierait sur la puissance que lui conféreraient LA CONFIANCE DU
PEUPLE FRANCAIS, LA SYMPATHIE DES AUTRES PEUPLES ET L'AMITIE DE L'UNION
SOVIETIQUE.
2°
Etablissement de rapports fraternels entre le peuple français et le
peuple allemand en rappelant l'action menée par les communistes et par
le peuple français contre le traité de Versailles, contre l'occupation
du bassin de la Rhur, contre l'oppression d'un peuple contre un autre
peuple.
3°
Conclusion d'un pacte d'amitié et d'un traité commercial avec l'URSS et
poursuite résolue d'une politique de paix destinée à tenir la France
en dehors du conflit impérialiste.
4°
Proclamation du droit pour les minorités nationales et pour les
peuples des colonies, des territoires sous mandat et des protectorats à
l'indépendance et à la libre disposition d'eux-mêmes. Le Gouvernement du
Peuple exalterait l'exemple donné par l'URSS au sein de laquelle des
nations sont unies dans une indépendance complète et dans une égalité
absolue de droits."
"La voie du salut"
La
dernière partie du tract appelle les étudiants à choisir entre le
projet pacifiste du Maréchal Pétain et celui du Parti communiste en
soulignant que le premier est associé à l'exploitation capitaliste et le
second à l'émancipation socialiste.
Pour les communistes "la voie du salut" ne fait aucun doute : c'est la Révolution socialiste.
Publié en décembre 1940, l'Appel aux "Etudiants !" est un tract pacifiste (paix avec l'Allemagne), anti-gaulliste (rejet de la lutte armée) et anglophobe
(dénonciation de l'impérialisme anglais). Il se caractérise aussi
par une condamnation du régime de Vichy en raison de sa forme
capitaliste et non pour son pacifisme, et par un éloge de l'URSS qui est
présentée comme le modèle du régime socialiste. Enfin, ce tract apporte
la preuve formelle que le Parti Communiste Français et la Jeunesse Communiste de France n'ont aucune responsabilité dans l'organisation de la manifestation
patriotique du 11 novembre 1940.
Document 1 :
Etudiants !
Le
11 novembre, vous avez, malgré l'interdiction de l'occupant, célébré le
souvenir de vos pères et de vos frères aînés tués dans l'autre guerre.
VOUS AVEZ EU RAISON !
Vous avez voulu affirmer le désir de la jeunesse française de vivre dans un pays libre et indépendant.
VOUS AVEZ EU RAISON !
Du
même coup vous avez flétri le gang d'aventuriers et de traîtres qui,
autour du Maréchal failli, flanqué de son Laval et de son Maurras et
béni chaque matin par l'ACTION FRANCAISE, met la France à l'encan, et
rêve de la transformer en pays colonial.
VOUS AVEZ EU RAISON !
Vous
avez désavoué la propagande barbare de l'antisémitisme agencée par les
capitalistes qui travaillent pour leur compte et le compte de
l'occupant.
VOUS AVEZ EU RAISON !
Vous avez protesté contre l'arrestation de Paul LANGEVIN, odieux attentat contre l'intelligence française.
VOUS AVEZ EU RAISON !
Vous
avez ressuscité les plus belles et les plus généreuses traditions du
Quartier Latin, celles qui remontent à l'époque où à l'appel de Michelet
et d'Edgar Quinet, la jeunesse des écoles se lançait au secours de la
liberté menacée par le Césarisme, où l'on criait du même cœur : "Vive la
Nation ! Vive la Révolution ! "
Les réacteurs de 1940, qui ne sont au pouvoir que sous la protection des baïonnettes de l'occupant vous ont frappés sauvagement.
Quelques uns des vôtre ont été tués, d'autres internés. L'université a
été fermée. Les feuilles qui servent l'occupant, la feuille de Doriot,
celle de Jeanson et celle de l'italien Dieudonné-Dodiati vous ont
bassement injuriés.
JEUNES AMIS,
Nous
appartenons aux Jeunesses Communistes, au Parti Communiste,
c'est-à-dire à des organisations dont les journaux ont été interdits et
les militants persécutés par les équipes de criminels, de traîtres et de
sans patrie qui gouvernent la France depuis plus d'un an.
De leurs prisons, de leurs camps, de l'illégalité où ils ont été précipités, les Communistes vous tendent une main fraternelle.
Alors que tous les autres se moquent ou vous injurient, ils vous expriment, jeunes étudiants, leur solidarité et leur sympathie.
Au
nom de cette solidarité et de cette sympathie, ils vous disent
cordialement comment eux conçoivent le salut du pays, l'indépendance de
la France qui est, n'est-il pas vrai notre objectif commun.
Assurer l'indépendance de la France, c'est permettre à ce pays d'être libéré de la sujétion de l'impérialisme britannique.
Dans
une France meurtrie par la défaite où l'ont entraînée des politiciens
tarés et des généraux traîtres ou incapables, l'indépendance de la
France doit être recouvrée dans la paix. Soucieux, comme vous, de rendre
à la France son indépendance et de la soustraire au vasselage et à la
colonisation que lui préparent les hommes de Vichy et leurs maîtres de
Paris, les Communistes vous disent :
|
Ce n'est pas par la guerre que la France vaincue redeviendra libre et indépendante.
CEST PAR LA REVOLUTION SOCIALISTE
Comme
c'est par la Révolution socialiste que la Russie, poussée à l'abime par
le Tsar, a recouvré sa force, sa liberté, son prestige, a fait de sa
jeunesse la plus heureuse du monde, a mis à la place d'honneur le
Travail et la Science.
Vous
voulez savoir pourquoi lorsque Laval et Pétain négocient à Montoire
avec le Fuhrer la France sort de la négociation un peu plus exsangue, un
peu plus affaibli ?
Vous
voulez savoir pourquoi lorsque Molotov négocie à Berlin ou ailleurs,
l'URSS sort de la négociation plus forte et plus prestigieuse ?
C'est parce que Laval-Pétain représentent les oligarchies ennemies du peuple, le vieil ordre capitaliste, décrépi et condamné.
C'est parce que Molotov est l'interprète sûr de l'ordre nouveau, de l'ordre du peuple, de l'ordre socialiste.
L'expulsion
des aventuriers de Vichy, la constitution d'un gouvernement du peuple,
la Révolution socialiste dont les communistes sont les champions, voilà
les conditions de la libération et de la renaissance française. Aucune
revanche militaire ne sauvera la France si la Révolution ne lui
conquiert pas l'indépendance qui lui a été ravie. Et par contre la
révolution socialiste peut et doit panser toutes les blessures de la
défaite.
Maître
du pouvoir en URSS, les communistes ont préservé le peuple soviétique
de la guerre et ils ont étendu le domaine du socialisme.
Maître
du pouvoir en France, les communistes, observant les mêmes principes,
feraient de la France un pays libre, digne et respecté.
Ils défendraient la vraie collaboration internationale fondée sur l'égalité des droits entre les peuples telle que l'a proclamée la Constitution de l'URSS.
Ils proclameraient le droit à l'indépendance des peuples coloniaux,
ils briseraient l'isolement de la France et grâce à eux notre pays ne
serait ni bafoué, ni affamé, parce qu'il serait l'allié de l'Union
Soviétique, de son invincible Armée Rouge et de sa puissante économie
socialiste.
Jeunes camarades des écoles, voilà la voie du salut !
Nous
vous convions à vous y engager avec nous; vous risqueriez, si vous vous
y refusiez, de voir stériliser votre magnifique effort pour
l'indépendance du pays et vous deviendriez des « pèlerins du néant » au
lieu d'être des artisans du redressement français.
Etre livrés par Pétain-Laval, ou être défendus par un gouvernement du peuple !
Vivre
en esclaves sous la coupe de politiciens suspects « criblés de dettes
et de crimes », ou vivre indépendants et libres par le socialisme.
La servitude ou la Révolution socialiste, dont les communistes lèvent le drapeau.
Voilà le choix qui s'impose à vos vingt ans, à vos enthousiasmes, à vos intelligences.
Dites
que vous avez choisi le progrès contre la barbarie, que vous voulez
être les compagnons de route d'hommes courageux qui luttent pour le
grand idéal humain du communisme. Et qu'à nouveau le Quartier latin
résonne de ces deux magnifiques appels complémentaires :
VIVE LA NATION ! VIVE LA REVOLUTION !
Les Régions Parisiennes du Parti Communiste Français (SFIC)
Les Régions Parisiennes de la Jeunesse Communiste de France
[Signalons que l'Appel aux "Etudiants !" reprend des passages d'un article de Gabriel Péri, "Situation internationale - Cinq mois après l'armistice, où en sommes-nous ?" (document 2), publié en décembre 1940 dans le n° 1 de La Voix de Paris-Ouest] |
Document 2 :
SITUATION INTERNATIONALE
_____________________
Cinq mois après l'armistice,
où en sommes-nous ?
Cinq mois se sont écoulés depuis la signature de l'armistice franco-allemand et franco-italien.
Quels événements ont marqué cette période et quelles perspectives s'offrent aux travailleurs de France ?
LA GUERRE SE PROLONGE [...]
LA GUERRE S'ETEND [...]
LE PACTE TRIPARTITE [...]
LA POLITIQUE DE MONTOIRE [...]
L'URSS,
LA POLITIQUE DES COMMUNISTES
En
même temps qu'ils souscrivent à ce diktat, les dirigeants
banqueroutiers de Vichy s'entêtent dans une politique d'antisoviétisme
imbécile que l'histoire a définitivement condamnée et que la
clairvoyance diplomatique de Staline et des Bolchéviks a mis partout en
échec.
L'URSS
a préservé la paix sur son territoire. Mais elle n'a pas acheté la paix
au prix de compromis qui affaiblissent ou diminuent. Elle a sauvé la
paix tout en fortifiant l'Etat prolétariat, en étendant le domaine du
socialisme à l'Ukraine, à la Biélorussie [NdB : la partie orientale de la Pologne annexée par l'URSS a été rattachée à l'Ukraine et à la Biélorussie], à la Bessarabie et à la Bukovine, aux Etats Baltes [NdB : toutes ces annexions sont la conséquences directes du Pacte germano-soviétique], en fortifiant des relations pacifiques avec un grand nombre de gouvernants.
Dans
un monde où les impérialismes s'affrontent, et où n'existe qu'un
pouvoir socialiste, deux principes inspirent la politique stalinienne :
Ne pas tirer les marrons du feu pour aucun des impérialismes en présence
! Ne pas permette une organisation du monde qui serait réalisée - comme
cela fut tenté à Munich - à l'exclusion de l'URSS, c'est-à-dire contre
l'URSS et contre le prolétariat international. Ce sont ces principes qui
ont inspiré à l'URSS son exigence de participer, le 18 octobre, à la
conférence des Etats Danubiens. Ce sont ces principes qui ont inspiré
Molotov au cours de ses conversations du 13 novembre avec les dirigeants
allemands.
La politique que pratique les communistes maîtres du pouvoir en URSS
c'est celle que pratiqueraient les communistes français s'ils étaient
maîtres du pouvoir en France.
Ils
défendraient la vraie collaboration internationale celle qui est fondée
sur l'égalité en droit de tous les peuples et le respect de leur
indépendance, sur la constitution d'une Fédération des peuples libres
analogues à la Fédération Soviétiques; ils proclameraient le droit à
l'indépendance des peuples des colonies, ils briseraient l'isolement de
la France et, grâce à eux, la France ne serait ni bafouée ni affamée
parce qu'elle serait l'alliée de la Grande Union Soviétique et de son
invincible Armée Rouge, de sa prodigieuse économie socialiste.
Quand
Laval et Pétain négocient à Montoire, la France sort de la négociation
un peu plus asservie, un peu plus dépendante, un peu plus humiliée.
Quand Molotov négocie à Berlin ou ailleurs, l'URSS sort de la
négociation plus forte, plus prestigieuse.
Parce
que Pétain et Cie, maintenus au pouvoir par l'occupant, sont les
ennemis du peuple de France; parce que Molotov est l'interprète fidèle
de la volonté des peuples libres de l'URSS.
Et
le choix s'impose aux Français : Etre trahis par Laval-Pétain, être
défendu par un gouvernement du Peuple. Vivre en esclaves sous la coupe
d'un gouvernement d'aventuriers et de réaction antifrançaise. Vivre
indépendants et libres dans la justice sociale par le socialisme, dont
les communistes sont les seuls représentant authentiques.
(La Voix de Paris-Ouest n° 1 de décembre 1940 ) |
Organe de la Région Paris-Ouest du PCF, La Voix de Paris-Ouest n° 1 de décembre 1940 publie dans une édition imprimée un article intitulé "Cinq mois après l'armistice, où en sommes-nous ?".
On peut attribuer ce texte à Gabriel Péri en s'appuyant sur une brochure communiste de mars 1942 intitulée "Un héros de la libération nationale mort pour la France / Gabriel Péri vous parle" :
Membre du Comité central du PCF, député de Seine-et-Oise, Gabriel Péri est un ancien dirigeant des Jeunesses communistes.
On peut attribuer ce texte à Gabriel Péri en s'appuyant sur une brochure communiste de mars 1942 intitulée "Un héros de la libération nationale mort pour la France / Gabriel Péri vous parle" :
"Il écrit ensuite une série d'autres ouvrages et études : « NOUS ACCUSONS» « LA GRANDE TRAHISON DES ANCIENS COMBATTANTS » « JEUNESSE DE FRANCE » « IL A VINGT ANS LE PARTI COMMUNISTE » « STALINE » « LA POLITIQUE DE MONTOIRE » « LES ETATS-UNIS ET LA GUERRE MONDIALE » « L'EXTREME-ORIENT ET LA GUERRE » « LE NAZISME N'EST PAS LE SOCIALISME » « HUIT MOIS [cinq mois] APRES L'ARMISTICE,OU EN SOMMES NOUS ? », etc..."
Membre du Comité central du PCF, député de Seine-et-Oise, Gabriel Péri est un ancien dirigeant des Jeunesses communistes.