Le 13 juillet 1940, veille de la Fête Nationale, le Général de Gaulle s'exprime à la Radio de Londres pour appeler les Français à s'engager contre l'Allemagne : "Français ! Sachez-le, vous avez encore une armée de combat".
Dans cet Appel, le Chef de la France Libre dénonce le défaitisme du Maréchal Pétain : "Et c'est encore de la sénilité ou bien de la trahison que de prétendre que la guerre est une entreprise désespérée", expose la raison de son engagement : "Eh bien ! puisque ceux qui avaient le devoir de manier l'épée de la France l'ont laissé tomber, brisée, moi, j'ai ramassé le tronçon du glaive, fixe l'objectif de son mouvement : "il s'agit de faire tout le possible, activement ou passivement, pour que l'ennemi soit battu " et enfin indique ce que doit signifier le 14 juillet 1940 : "Si donc le 14 juillet 1940 est un jour de deuil pour la Patrie, ce
doit être, en même temps, une journée de sourde espérance. Oui, la
victoire sera remportée. Et elle le sera, j'en réponds, avec le concours
des armes de la France.
Document 1 :
DISCOURS
PRONONCE A LA RADIO DE LONDRES le 13 juillet 1940
Ce soir, veille du 14 juillet, il n'est pas une pensée française qui ne soit pour la France seule.
Non pas, bien entendu que nous devions nous tenir plongés dans l'affliction, ni nous ensevelir dans la résignation. Cet excès de douleur et cet abandon feraient le jeu de nos ennemis.
Le slogan d'une France pécheresse, justement punie de ses fautes et qui court à l'expiation, voilà qui convient tout à fait à nos vainqueurs du moment. Voilà qui répond trop bien aux remords et aux intérêts de ceux qui ont capitulé.
Pour l'instant, il s'agit de faire tout le possible, activement ou passivement, pour que l'ennemi soit battu. Qu'il le soit et nous renaîtrons, qu'il ne le soit pas et chaque jour il nous brisera, nous pillera, nous étouffera davantage. Prétendre que la France puisse être et demeurer la France sous la botte d'Hitler et le sabot de Mussolini, c'est de la sénilité ou de la trahison.
Et c'est encore de la sénilité ou bien de la trahison que de prétendre que la guerre est une entreprise désespérée. Ceux qui le disent à la France, à supposer qu'ils le disent de bonne foi, prouvent qu'ils n'ont rien compris au monde tel qu'il est.
Le monde ne se limite pas au champ de bataille sur lequel l'incompréhension de nos chefs nous livra sans moyens à la force mécanique allemande. Le monde comprend une Europe où nos alliés anglais qui, déjà, tiennent les mers et commencent à dominer le ciel, se renforcent chaque jour. Le monde comprend une Afrique, une Asie, une Amérique
pleine d'immenses possibilités. Oui, l'ennemi a réussi à réduire plusieurs de ses voisins immédiats. Mais chaque pas en avant le met devant une tâche plus dure. La France même partagée, même pillée, même livrée, n'a pas à jouer perdu.
Eh bien ! puisque ceux qui avaient le devoir de manier l'épée de la France l'ont laissé tomber, brisée, moi, j'ai ramassé le tronçon du glaive. Je suis en mesure d'annoncer qu'il existe déjà sous mes ordres une force militaire appréciable, capable de combattre à tout instant sur terre, dans les airs et sur mer. J'ajoute que cette force augmente tous les jours et je veux que l'on sache de quelle magnifique qualité est la jeunesse française qui accourt s'y engager. Il n'y a pas à douter une seconde que cette force ira en croissant au fur et à mesure de la guerre. Français ! Sachez-le, vous avez encore une armée de combat.
Si donc le 14 juillet 1940 est un jour de deuil pour la Patrie, ce doit être, en même temps, une journée de sourde espérance. Oui, la victoire sera remportée. Et elle le sera, j'en réponds, avec le concours des armes de la France.
Charles de Gaulle,
Discours au Français,
Tome 1 1940-1941, 1944, pp. 27-28
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