Auteur connu pour ses dialogues et ses scénarios, Henri Jeanson l'est beaucoup moins pour ses écrits publiés pendant l'occupation allemande.
Cet anarchiste a manifesté ses convictions... antifascistes en publiant en juillet 1940 des éditoriaux dans le quotidien pro-hitlérien Paris-soir sous la signature X.X.X. et en prenant par la suite la direction du journal pétainiste Aujourd'hui du 10 septembre au 22 novembre 1940.
Pour illustrer son passage à Paris-Soir on reproduira plusieurs extraits de ses éditoriaux et notamment celui du 23 juillet 1940 dans lequel Henri Jeanson écrit qu'en signant l'armistice franco-allemand les Français se sont engagés sur "l'honneur" à déposer toutes les armes - c'est-à-dire les fusils mais aussi "la plume" - et que de ce fait ils doivent renoncer "au droit de critique" et s'imposer "le silence" sur la présence des Allemands dont le régime d'occupation est un "régime de tolérance" comme l'illustre leur comportement - "correction", "simplicité, "politesse" - qui est en totale contradiction avec les "mensonges" propagées au cours du conflit par la presse belliciste.
Sa contribution au journal Aujourd'hui est plus marquante puisqu'il a été pendant trois mois le rédacteur en chef de ce quotidien autorisé par la censure allemande. Sous cet angle, on s'intéressera à deux textes publiés dans le premier numéro du 10 septembre 1940.
Tout d'abord, le premier article signé par Henri Jeanson qui s'intitule "Vérité mon beau souci". Dans ce texte, approuvé par la Propaganda Staffel, bordé par les communiqués militaires allemand et italien autrement dit parrainé par Hitler et Mussolini, Henri Jeanson affirme que son action à la tête du journal Aujourd'hui ne sera guidée que par le seul souci de la vérité : "Notre métier à nous, écrivain, est d’écrire sous ta
dictée, ô vérité !"
Ensuite, le texte "Aujourd'hui : Sa raison d'être" dans lequel le journal définit un programme qui se caractérise notamment par l'antisémitisme, l'anglophobie et le soutien à la collaboration franco-allemande :
Ensuite, le texte "Aujourd'hui : Sa raison d'être" dans lequel le journal définit un programme qui se caractérise notamment par l'antisémitisme, l'anglophobie et le soutien à la collaboration franco-allemande :
"Nous voulons qu'AUJOURD'HUI participe activement à la Renaissance française.
Nous avons des ambitions et un programme. [...]
Il ne suffit pas de liquider les hommes (politiciens, fonctionnaires,
francs-maçons et ploutocrates israélites), il faut détruire leur œuvre
de mort pour la nation laborieuse, leurs systèmes souillés de
malhonnêteté civique et de mauvaise foi. [...]
Sur le plan industrielle et commercial, une entente totale avec l’Allemagne est essentielle pour ne laisser
vivre que les industries ayant de réelles possibilités et des négoces
sains et vivants. [...]
Rupture complète avec la politique anglaise basée sur l’action de la Cité de Londres."
Pour terminer, on citera le numéro d'Aujourd'hui du 6 novembre 1940 dans lequel le pétainiste Henri Jeanson appelle les Français à collaborer avec les Allemands :
"Qu’il n’y ait pas de paix possible en Europe sans un accord entre la
France et l’Allemagne, c’est là une évidence vieille de plusieurs
siècles et que nul ne songe à contester.
Cet accord, nous l’avons
toujours souhaité parce que nous avons mis la paix au-dessus des partis
et parce que nous savons qu’en temps de guerre, la liberté perd ses
droits.
Et c’est pourquoi le devoir de tout pacifiste véritable, de
tout Européen authentique est de se ranger loyalement aux côtés du
maréchal Pétain, lorsque celui-ci nous dit : « Collaborons ! »".
Guerre 1939-1940
Pacifiste, Henri Jeanson a manifesté dès septembre 1939 son opposition à la guerre contre l'Allemagne nazie en signant le tract "Paix immédiate !" de l'anarchiste Louis Lecoin dans lequel les signataires appelaient les soldats français à déposer les armes : "Que les armées, laissant la parole à la raison, déposent donc les armes !".
Toutefois, c'est pour un autre texte pacifiste, un article publié dans le numéro du 17 août 1939 du journal SIA (Solidarité Internationale Antifasciste), que la justice militaire l'a fait arrêter en novembre 1939 avant de le condamner le mois suivant à 5 ans de prison pour provocation de militaires à la désobéissance et provocation à l'insoumission.
Mobilisé, Henri Jeanson a donc passé la plus grande partie de la guerre en détention à la prison de la Santé en raison de ses convictions pacifistes. Il a été libéré en juin 1940. Dans son article "Vérité mon beau souci" de septembre 1940, Henri Jeanson attribue cette libération à la "défaite" de la France :
"Les journaux des deux cents familles qui composaient la Républiques
des camarades nous ont traité d'apatride et de défaitiste, leurs
policiers nous arrêté, leur juges nous ont condamné, mais leur défaite
nous a libéré."
On peut donc supposer que sa libération est le fait des Allemands qui sont entrés dans Paris le 14 juin 1940 et qui au cours de leur invasion ont libéré des centaines de défaitistes, principalement des communistes.
Collaboration
Libéré en juin 1940, Henri Jeanson se met aussitôt au service de l'occupant en intégrant en juillet 1940 la rédaction de Paris-soir dont le premier numéro autorisé par les Allemands a paru dans la soirée du 21 juin 1940 (numéro daté du 22 juin 1940). Ainsi, du 8 juillet au 3 août 1940, Paris-soir publiera son éditorial quotidien signé X.X.X. .
Après cette première expérience, Henri Jeanson poursuit sa carrière dans la presse collaborationniste en étant désigné rédacteur en chef du journal Aujourd'hui dont le premier numéro parait le 10 septembre 1940.
Sa participation ainsi que son rôle dans ce nouveau quotidien autorisé par la censure allemande sont expressément mentionnés dans l'encart publicitaire publié la veille dans Paris-soir ainsi que dans la manchette du journal :
Sa participation ainsi que son rôle dans ce nouveau quotidien autorisé par la censure allemande sont expressément mentionnés dans l'encart publicitaire publié la veille dans Paris-soir ainsi que dans la manchette du journal :
Ses fonctions dans le journal Aujourd'hui prennent fin le 22 novembre 1940. Cette éviction fait notamment suite au rappel par ses adversaires de son article publié dans le numéro de S.I.A du 17 novembre
1938 dans lequel il approuvait le geste meurtrier d'Herschel Grynspan, Juif polonais, qui avait tué le 7 novembre 1938 à l’ambassade d’Allemagne à Paris un diplomate allemand, Ernst vom Rath.
La collaboration d'Henri Jeanson n'a pas laissé indifférent... les communistes. Ainsi, La Pensée libre n° 1 de février 1941 publie un texte intitulé "La Faune de la collaboration (Ecrivain français en chemise brune)" dans lequel la revue communiste décrit les conditions dans lesquelles Henri Jeanson a pris, après son passage à Paris-soir, la direction du journal Aujourd'hui et les motifs de son éviction en soulignant avec justesse le rôle que les Allemands avaient attribué à ce nouveau quotidien de la presse parisienne :
La collaboration d'Henri Jeanson n'a pas laissé indifférent... les communistes. Ainsi, La Pensée libre n° 1 de février 1941 publie un texte intitulé "La Faune de la collaboration (Ecrivain français en chemise brune)" dans lequel la revue communiste décrit les conditions dans lesquelles Henri Jeanson a pris, après son passage à Paris-soir, la direction du journal Aujourd'hui et les motifs de son éviction en soulignant avec justesse le rôle que les Allemands avaient attribué à ce nouveau quotidien de la presse parisienne :
"Par contre, on pouvait feuilleter les quotidiens sans trouver de signatures connues, chacune de celles qu'on apercevait n'étant que le pseudonyme honteux d'un rédacteur allemand ou d'un Français famélique, prêt à manger du juif, du maçon, du communiste, du républicain, du Français, selon les ordres qu'il recevrait de ses maîtres. Faisons pourtant mention de Maurice Rostand qui n'a pas eu honte d'aller prodiguer là-dedans le reste de ses charmes déflorés.
Ce décor n'était d'ailleurs qu'un paravent derrière lequel s'agitaient des personnages bien autrement dangereux : Capgras et Henri Jeanson.
Capgras est un richissime fabricant de jus de fruits qui s'est fait mécène et dirige le Théâtre des Ambassadeurs, où sa femme, Alice Cocéa, règne par son talent acide. Du jour de l'entrée des Allemands à Paris, Capgras s'est mis à leur disposition et il a joué, pendant toute la période des débuts, le double rôle de Fürher de la presse et du théâtre. Nous allons bientôt le retrouver dans le second de ces emplois.
En ce qui concerne la presse, Capgras est à l'origine de la réapparition de l'édition parisienne de Paris-soir. C'est lui qui a dirigé, en fait, le lancement de cet affreux canard de grosse propagande lavalo-hitlérienne. Mais il avait besoin d'un homme du métier, doué d'une plume alerte et montparnassienne. Le sort mit sur sa route, un jour de la fin du printemps, son ami Jeanson, qui fut libéré, lui, par les Allemands. [...]
Donc Jeanson commença aussitôt (juillet) à collaborer à ce Paris-soir qui avait commencé par le style écumant, copié sur la presse nazie de l'époque la plus basse, l'Angríff par exemple. Capgras et son compère montrèrent alors qu'ils ne répugnaient pas à ces besognes.
Pourtant la résistance opposée à ce journal immonde par l'opinion publique, la chute des Dernières Nouvelles, la vente désastreuse de La France au Travail, du Pílori, tous ces signes prouvaient la nécessité de biaiser et de changer d'hameçon.
Abetz découvrait qu'un peuple intelligent, fin, lettré, doué d'une des plus vieilles et illustres traditions de culture, exercé au goût de la nuance, ne se maniait pas avec la trique. Jeanson fut chargé de mettre sur pied un journal destiné à piper les « honnêtes gens », les intellectuels, la partie « cultivée » de l'opinion. Ce fut Aujourd'hui.
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La consigne y est de noyer le poisson, de cacher la propagande sous l'esprit parisien, de donner en apparence la première place aux lettres, aux arts, aux « variétés », de reléguer l'odieuse « politique » dans les coins, et surtout de mettre une sourdine aux polémiques racistes, antimaçonniques, antimarxistes, qui irritent le public. L'antisémitisme, au lieu d'y être asséné, y est distillé, à closes homéopathiques. Le lecteur distrait n'y prend pas garde et absorbe le virus en douce.
Moyennant quoi, Jeanson se flatta de réussir là où le lourd Châteaubriant [fondateur de l'hebdomadaire La Gerbe] avait échoué et de réunir une gerbe de signatures brillantes, connues, « bien françaises ».
Il a pu croire qu'il allait gagner la partie.
Hélas, pour Jeanson et ses patrons, cela ne devait pas durer. Notre peuple qui a retrouvé, en quelques jours, l'art de lire entre les lignes, - cette arme des nations asservies, - a éventé la mèche. [...]
La tâche dévolue à L'Œuvre est différente, comme sont différents le public qui occupe son secteur de propagande et l'homme chargé de cette mission [Marcel Déat]. L'Œuvre se propose de travailler les dirigeants syndicaux et le personnel enseignant. [...]
Cette tâche, que l’indignation de notre peuple rend de jour on jour plus ingrate, Déat y apporte une espèce de colère noire, d’ironie sans gaieté et de pesanteur auvergnate, qui diminuent beaucoup sa prise sur le lecteur. Il ne pardonne pas à Pétain, à Maurras, à Bergery et aux familiers du Maréchal, d'avoir torpillé, en juillet, son grand projet de Parti Unique, dont il devait être le manitou, ce qui aurait fait de cet aigre ambitieux une espèce de Führer français.
On a vu une trace de ces luttes de crabes dans l'article venimeux par lequel Jeanson, porte-plume de Bergery, a essayé de discréditer Déat, la veille du jour où L'Œuvre allait reparaître à Paris [L'Œuvre du 21 septembre 1940].
Déat, Jeanson et leurs équipes ont beau s'épuiser en distinguos entre la politique extérieure de Laval, qui est belle, qui est bonne, qui est pure, qui est sainte, et la politique intérieure de Vichy, qui est bête, brutale et destructive, ils ne convainquent personne : le Français, plus malin que ses pions ne le croient, ne fait pas de différence entre les fascistes soi-disant français de Vichy, et les fascistes ouvertement hitlériens qui forment l'entourage de Doriot et de Brinon à Paris. Et le Français a raison.
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Post-scripium. - La roue tourne si vite, si vite les figurants apparaissent et s'éclipsent, en ce régime dit de la stabilité, que le temps même de prendre un instantané, le paysage a changé. Par exemple, quinze jours après que le collectif de nos collaborateurs littéraires nous avait envoyé l'article ci-dessus, Jean Piot avait résigné ou dû résigner son fauteuil à L'Œuvre et Jeanson était chassé de la direction d'Aujourd'hui.
En soi, ce dernier événement n'aurait pas de quoi retenir l'attention, si La Gerbe, organe quasi-officiel de l'Ambassade de la rue de Lille, ne lui avait donné sa signification politique en liant le départ de Jeanson à la « disparition » de Bergery, lequel serait tombé en disgrâce à Vichy et se serait réfugié à Berne ! Et La Gerbe de pousser des cris de joie en piétinant les vaincus avec une élégance « bien française ». Pour nous qui ne faisons pas de choix entre ces messieurs, tous ennemis du peuple français, nous attendons patiemment qu'un demi-tour de la roue ait ramené au pinacle les vaincus de l'heure et qu'ils piétinent à leur tour les triomphateurs de cette semaine. Et Dieu sait si Bergery, Jeanson et consors sont experts à cet aigre sport !
Jeanson est remplacé, à la tête d'Aujourd'huí, par un « ultra », Georges Suarez, le collaborateur de toutes les feuilles hitlériennes et anti-françaises de ces dernières années, le cambrioleur des papiers posthumes de Briand. Ses premiers articles ont dû enchanter à la fois Vichy et Berlin. « Pétain ou la démocratie, il faut choisir ». Voilà qui est net."
On fera remarquer que la revue communiste affirme qu'Henri Jeanson a été libéré par les Allemands : "Le sort mit sur sa route, un jour de la fin du printemps, son ami Jeanson, qui fut libéré, lui, par les Allemands."
La Pensée Libre
Malgré la publication dans son premier numéro - le seul de l'année 1941 - d'un virulent réquisitoire contre les collaborateurs de la presse parisienne et vichyssoise, La Pensée Libre ne s'inscrit pas dans la Résistance.
En effet, cette revue fondée par trois intellectuels communistes - Georges
Politzer, Jacques Decour et Jacques Solomon - suit fidèlement la ligne Parti en dénonçant le caractère impérialiste de la guerre et en expliquant que sa cause n'est pas le nazisme mais le capitalisme.
Illustration de ce fait, dans son éditorial intitulé "Notre Combat", la revue communiste justifie son titre en expliquant que la pensée de ses
contributeurs peut être qualifiée de "libre" car ils n'ont aucun lien - "matériel" ou "idéologique" - avec les impérialismes français, anglais ou allemand qui sont tous responsables de la guerre :
"Cette revue s'appelle la PENSEE LIBRE par ce qu'elle est rédigée par des savants, des écrivains, des penseurs et des artistes libres de tout lien matériel et idéologique avec les impérialismes qui ont jeté les peuples, pour la seconde fois au XXe siècle, dans une guerre pour le partage du monde."
En d'autres termes, la pensée n'est libre qu'à la condition d'être soumise à l'URSS et à Staline !!!
Autre exemple, cette condamnation de l'Angleterre impérialiste dans le texte "L'avenir de la science" :
Autre exemple, cette condamnation de l'Angleterre impérialiste dans le texte "L'avenir de la science" :
"Quand, par exemple, le gouvernement de l'Angleterre «
démocratique » persécute, lui aussi, ceux qui démontrent que la guerre
actuelle a un caractère impérialiste du côté de tous les belligérants et
qu'elle se poursuit, en dernière analyse, pour le profit capitaliste,
des deux côtés; il y a là un acte de persécution à l'égard de ceux, qui
pour éclairer les masses populaires, opposent au mensonge de la
propagande de guerre la vérité scientifique. Car l'affirmation
selon laquelle l'enjeu de cette guerre, ce sont les colonies,
l'hégémonie en Europe et dans le monde, et que les principaux
responsables ce sont les trusts de tous les pays, n'est pas une thèse
politique ordinaire; c'est la seule thèse politique conforme à la vérité
scientifique, c'est-à-dire aux faits et à leurs rapports effectifs.
Mais aucun des impérialismes belligérants ne peut supporter cette vérité objective, et c'est pourquoi ils font tous de l'obscurantisme."
Signalons que la "vérité scientifique" selon laquelle "la guerre
actuelle a un caractère impérialiste du côté de tous les belligérants" s'effondrera le 22 juin 1941 avec l'invasion de l'URSS par les armées allemandes.
Preuve supplémentaire que la "Pensée Libre"
- malgré son titre et sa diffusion clandestine - n'est pas une
publication de la Résistance, la revue communiste défend dans son
éditorial "Notre Combat"
le projet du Parti communiste à savoir la Paix avec l'Allemagne
(libération nationale) et la Révolution socialiste (libération sociale)
:
"Unis avec le peuple de notre pays, unis avec tous ceux qui, dans l'Europe opprimée et dans le monde entier, luttent contre les forces de régression sociale et d'oppression nationale, nous entendons travailler pour un avenir de liberté et pour cette paix qu'un nouveau Versailles, quels que puissent être ses bénéficiaires, serait à nouveau incapable d'assurer."
Paris-Soir
On peut attribuer à Henri Jeanson les éditoriaux signés X.X.X. qui ont été publiés dans Paris-soir du 8 juillet au 3 août 1940 en avançant les arguments suivants :
D'abord, la Pensée libre de févier 1941 fait état de la collaboration d'Henri Jeanson à Paris-soir "en juillet" 1940 : "Donc Jeanson commença aussitôt (juillet) à collaborer à ce Paris-soir. La revue communiste affirme même qu'il a assumé la fonction de rédacteur en chef à la demande de Roger Capgras.
Ensuite, on citera trois ouvrages publiés après guerre par le journaliste d'extrême droite Henri Coston qui pendant l'occupation a participé à de nombreuses publications pro-allemandes et notamment Paris-soir en juillet 1940 [Ex : Paris-soir du 9 juillet 1940] :
1) dans Les Francs-Maçons sous la Francisque, il écrit que "L'armistice signé, Roger Capgras, mandataire aux Halles (de profession) et directeur de théâtre (par vocation), prit la direction effective de Paris-Soir, avec Henri Jeanson comme rédacteur en chef". (1)
1) dans Les Francs-Maçons sous la Francisque, il écrit que "L'armistice signé, Roger Capgras, mandataire aux Halles (de profession) et directeur de théâtre (par vocation), prit la direction effective de Paris-Soir, avec Henri Jeanson comme rédacteur en chef". (1)
2) il précise dans son livre Partis, journaux et hommes politiques d’hier et d’aujourd’hui que "Jeanson signait X.X.X. des articles ironiques et mordants fort peu vichissois ou lavalistes dans le Paris-Soir repris par Capgras en juillet". (2)
3) enfin dans L'âge d'or des années noires il mentionne qu'il faisait partie de la rédaction de Paris-soir dirigée par Jeanson en juillet 1940 :
"Après l'éviction de François Janson (que l'on avait pris pour Henri
Jeanson), le véritable Jeanson fut chargé d'animer la nouvelle équipe :
celle-ci comprenait, en juillet 1940, outre Albert Nad, Georges
Dessoudeix et moi-même au secrétariat de rédaction; René Saint-Serge (R.
de Maintenon), André Margot, Jean Drault, ma vielle amie Suzy Mathis — « tante Suzy de Radio-Tour Eiffel » — Yvonne Jeanne, une sportive, Andrée Morane, Max
Roussel, que sais je encore ? Les opinions étaient variées : Henri
Jeanson, avec qui je m'entendais fort bien, était nettement de gauche :
c'est lui qui signait XXX les éditoriaux ironiques et mordant de
Paris-Soir." (3)
On retrouve les mêmes
affirmations dans L'A.B.C. du journalisme, cours élémentaire en 30 leçons, livre écrit en 1951 par... sa femme, Gilberte Henri-Coston :
"Tandis que le Paris-Soir de Prouvost poursuivait sa publication à Lyon, à Marseille et à Toulouse, un nouveau Paris-Soir sortait rue du Louvre. Son animateur était un ancien garçon d'ascenseur du journal, l'Alsacien Schiesslé. La rédaction, était sous les ordres d'un ancien reporter de L'Auto, François Janson,
que Schiesslé avait pris pour le « vrai Jeanson », celui du Canard Enchaîné.
Lorsqu'on eut enfin découvert Henri Jeanson, on le chargea de
l'éditorial et on lui confia la direction de la nouvelle équipe de
Paris-Soir, où figuraient entre autres un directeur de théâtre, Roger
Capgras, et Georges de La Fouchardière, qui signait « Jean Chatel » des chroniques pleines de mordant." (4)
De plus, le contenu des éditoriaux de Paris-soir se rapproche par leur thème et leur vocabulaire des textes publiés par Jeanson dans Aujourd'hui et notamment le numéro du 10 septembre 1940.
Ainsi, les éditoriaux des 8, 19 et 26 juillet 1940 ainsi que l'article "Vérité mon beau souci" du 10 septembre 1940 condamnent "la République des camarades" :
Ainsi, les éditoriaux des 8, 19 et 26 juillet 1940 ainsi que l'article "Vérité mon beau souci" du 10 septembre 1940 condamnent "la République des camarades" :
- Editorial du 8 juillet 1940 : "La République des camarades a vécu et la France à bien failli en mourir".
- Editorial du 19 juillet 1940 : "Laissez derrière vous [Monsieur le Maréchal] les dialecticiens du vide, [...] les tenanciers du suffrage universel qui croient encore que la République des camarades continue, [...]."
- Editorial du 26 juillet 1940 "Méfiez-vous [citoyen MARQUET] de votre entourage et dites-vous que vous ne trouverez pas l'inspiration gouvernementale parmi les amis des amis, des copains des copains de la République des camarades [...]."
- Editorial du 19 juillet 1940 : "Laissez derrière vous [Monsieur le Maréchal] les dialecticiens du vide, [...] les tenanciers du suffrage universel qui croient encore que la République des camarades continue, [...]."
- Editorial du 26 juillet 1940 "Méfiez-vous [citoyen MARQUET] de votre entourage et dites-vous que vous ne trouverez pas l'inspiration gouvernementale parmi les amis des amis, des copains des copains de la République des camarades [...]."
- Article "Vérité mon beau souci" du 10 septembre 1940 : "Les journaux des deux cents familles qui composaient la République des camarades nous ont traité d'apatride et de défaitiste, leurs
policiers nous arrêté, leur juges nous ont condamné, mais leur défaite
nous a libéré."
Autre exemple, les idées développées dans les éditoriaux de X.X.X. sont reprises sous forme de propositions dans le texte programmatique "Aujourd'hui : sa raison d'être" publié dans Aujourd'hui du 10 septembre 1940 :
- Editoriaux : "Assez de fonctionnarisme négatif." (12 juillet 1940) - "Dans chaque région, une Chambre de corporations composée de vingt
membres, à Paris une Chambre haute composée d'un délégué de chaque
Chambre des corporations" (15 juillet 1940) - "Nier ses erreurs, c'est un peu se déshonorer. Les reconnaître, c'est au contraire faire preuve de dignité humaine." (23 juillet 1940) - "CONSTRUISONS", "Liquidons le passé." (24 juillet 1940) - "Nous exigeons des actes. Pas des gestes : des actes." (26 juillet 1940) - "Il nous faut penser à la liquidation du passé" (30 juillet 1940 ), "Cette formule, nous devons la faire notre. C'est par nos propres moyens [...]" (3 août 1940).
- Texte "Aujourd'hui : sa raison d'être" : "un fonctionnarisme créé par le favoritisme [doit être supprimé] - "constitution régionale et nationale des corporations et d'une chambre corporative" - "Elle [La France] doit être « beau joueur », reconnaître ses fautes" - "Construction" - "Liquidation du passé" - "Le peuple doit savoir, et les actes doivent lui prouver, que le gouvernement travaille pour lui."- "[La France doit] se réhabiliter elle-même".
On fera remarquer qu'il y a aussi une concordance sur la forme entre les textes de Paris-soir et l'article de Jeanson, "Vérité mon beau souci", avec l'utilisation en fin de phrase des trois petits points (...).
Enfin, on pourra mettre en avant un dernier élément comme indice concordant : la référence au cinéma. Ainsi, l'éditorial du 16 juillet 1940 dénonce le rôle néfaste des intermédiaires et cite au nombre des activités victimes de ce fléau... "les studios de cinémas". Ajoutons que l'éditorial du 31 juillet 1940 prend la forme d'un... dialogue entre un Parisien resté à Paris et un Parisien qui revient de Vichy.
(1) Henri Coston, Les Francs-Maçons sous la Francisque, 1990, p. 157.
(2) Henri Coston, Partis, journaux et hommes politiques d’hier et d’aujourd’hui, 1960.
(3) Henri Coston, L'âge d'or des années noires, 1996, p. 47.
(4) Gilberte Henri-Coston, L'A.B.C. du journalisme, cours élémentaire en 30 leçon, 1951, p. 57.
Editoriaux de Jeanson
Dans ses éditoriaux publiés en juillet 1940 dans Paris-soir, Henri Jeanson défend des positions pro-allemandes, pétainistes, antisémites et anglophobes. Toutes les caractéristiques... du Résistant de la première heure.
1) engagement pro-allemand.
Militant... antifasciste, Henri Jeanson écrit dans son éditorial du 23 juillet 1940 qu'en signant l'armistice franco-allemand les Français se sont engagés sur "l'honneur" à déposer toutes les armes - c'est-à-dire les fusils mais aussi "la plume" - et que de ce fait ils doivent renoncer "au droit de critique" et s'imposer "le silence" sur la présence des Allemands dont le régime d'occupation est un "régime de tolérance" comme l'illustre leur comportement - "correction", "simplicité, "politesse" - qui est en totale contradiction avec les "mensonges" propagées au cours du conflit par la presse belliciste :
L'Armistice n'est pas la Paix
Nous
avons mis la signature « France » au bas du traité d'armistice. Cette
signature, nous devons la respecter si nous voulons être respectés à
notre tour.
Quand on signe un armistice on s'engage sur l'honneur à déposer les armes. Toutes les armes.
Pas seulement les fusils.
Mais aussi la plume...
On renonce au droit de critique.
« On ne transige pas avec l'honneur », écrivait Napoléon.
L'honneur n'a pas de nuances...
Et il n'est pas d'honneur sans loyauté.
Bien des gens s'imaginent que tout est fini et s'étonnent naïvement que la vie ne reprenne pas sur son rythme d'il y a un an...
N'oublions pas que la guerre n'est pas terminée pour tout le monde et que l'Europe est en état de siège.
Nous nous sommes exclus nous-mêmes de la lutte, mais la lutte ne s'en poursuit pas moins.
Cette lutte, nous en sommes responsables.
Il
ne s'agit pas de tergiverser : c'est nous qui, sous le gouvernement de
M. Daladier, avons déclaré la guerre. C'est nous qui avons pris cette
responsabilité : « La France commande ! » affirmait M. Daladier, au
cours de la fameuse séance du 2 septembre 1939.
Un seul parlementaire se leva pour essayer de sauver la paix. Il s'appelait Gaston Bergery. Et la Chambre, qui représentait le pays, refusa de l'entendre.
Ce jour-là, M. Bergery, devant la volonté du pays, dut renoncer, lui aussi, au droit de critique.
Nous avons subi, sous le proconsulat de M. Edouard Daladier, une répression criminelle.
Cette répression, nous nous y sommes résignés, et même souvent nous l'avons encouragée.
Nous nous étions volontairement condamnés au silence.
Ce silence, nous devons l'observer plus que jamais.
Car
si nous vivons sous un régime d'occupation, nous devons reconnaître que ce régime — conséquence logique des fautes par nous commises — est un
régime de tolérance.
Nul ne peut prétendre qu'il ait été personnellement humilié par les troupes allemandes.
Nous
recevons des milliers de lettres de réfugiés qui tiennent à rendre
hommage, non seulement à la correction des Allemands, mais encore à la
manière élégante dont ils se sont comportés avec eux.
Les Allemands ne font pas de leur victoire un instrument de supplice, bien au contraire.
Et ils ont infligé, par la simplicité de leur attitude un démenti formel aux mensonges dont nous étions intoxiqués.
Rendons-leur donc leur politesse.
Nier ses erreurs, c'est un peu se déshonorer.
Les reconnaître, c'est au contraire faire preuve de dignité humaine.
Quand le vin est tiré, dit un proverbe de chez nous, il faut le boire.
Buvons-le donc en nous félicitant que ce soit du vin.
Notre faute est totale.
Tous nous sommes coupables. Tous nous sommes complices.
Nos maîtres nous ont trahi, nos maîtres nous ont menti, nos maîtres nous ont ruiné.
Mais nous les avions choisis.
Ils nous ont déçu, c'est possible.
Mais quand nous leur avions confié nos espérances, ignorions-nous leur passé ?
« Mea culpa » !
X. X. X.
(Paris-soir du 23 juillet 1940) |
2) Pétainisme.
Dans ses éditoriaux, Henri Jeanson dénonce Vichy - où se côtoie hommes politiques, journalistes, hauts fonctionnaires et généraux - comme le refuge des hommes du
passé : "Politiciens d'hier, fonctionnaires d'hier, publicistes d'hier ont fini leur temps. / Le peuple français les récuse et les chasse." (29 juillet 1940)
Le Maréchal
Pétain fait toutefois exception à la règle : "Faisons
confiance au grand soldat qui préside désormais à ses destinées [aux destinées de la France] pour
lui façonner avec son cœur de Français une âme plus virile et plus forte
et pour lui insuffler un idéal régénéré." (8 juillet 1940), "Nous avons pour le maréchal Pétain un respect justifié par la reconnaissance." (13 juillet 1940), "Le peuple français supplie le Maréchal Pétain d'être circonspect et intransigeant dans le choix de ses collaborateurs." (29 juillet 1940).
La formation par Pierre Laval le 12 juillet 1940 du premier Gouvernement de Vichy sera encore l'occasion pour Jeanson de manifester sa dévotion exclusive pour le Maréchal Pétain :
"Pétain ? Oui. / Son état-major ? Non. [...] / Nous ne voulons pas de Laval : nous voulons Pétain. / Nous voulons Pétain parce qu'en lui se cristallise l'image de notre pays. / Nous voulons Pétain à la tête d'un gouvernement d'action." (15 juillet 1940)
Et de souligner par la suite que les conditions permettant le succès du Maréchal Pétain ne sont pas réunis à Vichy :
"Sur le plan gouvernemental, le Maréchal Pétain, qui garde
maîtrise, sang-froid et sagesse, subit le double assaut des hommes
politiques d'hier et de la franc-maçonnerie des généraux vaincus. [...] / Nous demandons à notre grand Maréchal de ne rien céder aux aventuriers qui l'assiègent. / Mais peut-on méditer avec profit dans l'atmosphère de
Vichy ? / Peut-on créer dans un monde en décomposition ? / Peut-on
travailler dans le cercle bruyant des besogneux sans scrupules ? / On ne fait pas un gouvernement avec une foule..." (29 juillet 1940).
Toutes ces interrogations expliquent son Appel du 19 juillet dans lequel il demandait au Maréchal Pétain de s'installer avec son gouvernement à Paris :
Le gouvernement
tient à s'installer
en dehors de la capitale
Les
prisonniers, les femmes et les enfants sans foyer, les ouvriers sans
travail, tous ceux qu'un gouvernement de sans-patrie a abandonné vous
demandent, Monsieur le Maréchal, de revenir ici.
Ils ont besoin de votre présence pour revivre et pour espérer.
Songez,
Monsieur le Maréchal, que les femmes dont les maris sont prisonniers
quelque part en Allemagne ou en France, que les fils de ces hommes et de
ces femmes sont des espèces de veuves provisoires, les autres des
espèces d'orphelins momentanés.
Revenez, Monsieur le Maréchal, revenez en hâte; ils sont inquiets, désemparés, sans soutien.
Il vous faut rejoindre sans délai cette grande famille française...
La
dramatique situation des soldats que vous aimez, de ce combattants
d'hier, de ces compagnons d'armes qui subissent non seulement la dure
vie de l'internement, mais qui souffrent aussi d'être privés de
nouvelles, exige votre retour.
On vous attend, Monsieur le Maréchal.
On vous appelle, Monsieur le Maréchal.
Répondez « Présent ! » à ces victimes d'une guerre qui fut à la fois préméditée comme un crime et improvisée comme un pique-nique !
Laissez derrière vous ceux qui ne comprennent pas que les heures comptent quand il s'agit de la vie des Français.
Laissez derrière vous dialecticiens du vide, les «
je m'en-vichystes » de la politiquaillerie, les fabricants de
combinaisons suspectes, les amateurs de portefeuille, les paperassiers
des grandes commissions, les tenanciers du suffrage universel qui
croient encore que la République des camarades continue, que le régime
de l'assiette eu beurre et du pot de vin va recommencer.
Rompez avec ces mauvais bergers désormais sans troupeau.
Paris vous attend, car Paris a besoin d'une âme.
X. X. X.
(Paris-soir 19 juillet 1940) |
Un exemple de cet "esprit parisien" dont Henri Jeanson serait l'un des représentants : "les «
je m'en-vichystes » de la politiquaillerie". Précisons que cette dénonciation de Vichy ne vise pas Pétain.
3) Antisémitisme.
Dans son éditorial du 20 juillet 1940, Henri Jeanson dénonce les "agents des ploutocraties des grands israélites" qui sont arrivés à Paris pour vider les coffres-fort de leur mandant :
Les agents des ploutocraties
des grands israélites
et des politiciens fuyards
tentent de revenir
Que contiennent les coffres des grandes banques ?
Combien fabrique-t-on de faux papiers pour faire disparaître le nom des propriétaires véritables ?
La souffrance et la mort des femmes, des enfants et des jeunes hommes n'ont rien appris à tous ceux qui ont fait le malheur de la France.
C'est à croire qu'ils n'ont rien vu, rien entendu, rien senti, embusqués qu'ils étaient dans leur égoïsme atavique...
Ce qu'ils veulent à présent, c'est sauver leurs coffres-fort, par procuration.
Toujours les intermédiaires !
Déjà les amis des grands juifs arrivent à Paris. Il s'agit pour eux, non de recommencer la France, mais de continuer leur république, de récidiver dans le crime, la concession et calomnie...
Les coffres des grandes banques recèlent d'inestimables œuvres d'art. Ces œuvres d'art ont été « planquées » là par les grands affairistes israélites d'hier...
Or, on s'efforce aujourd'hui de vider ces coffres, de faire le vide.
On se dépêche.
Vide et vite !
Il y a ici des receleurs amateurs qui ont pour mission de substituer leur nom de Français authentiques au nom de certains métèques.
Passez muscade : Rien dans les mains, rien dans les poches. On escamote et l'on s'en va !
Il faut que les agents louches, même « s'ils portent de grand noms », même s'ils se croient invulnérables, sachent bien que leur crime est aussi grave, aussi impardonnable que celui des fuyards, car ils ajoutent à la tentative de détournement du bien public la honte d'avilir leur nom de Français.
Il faut qu'ils sachent que l'ère des petites combines, des trafics clandestins, que l'âge « des affaires sont les affaires » ont fin une fois pour toute.
Les coffres-forts sont de petites bastilles qui s'écrouleront comme s'est écroulée l'autre.
Et il faut qu'ils se souviennent que des têtes illustres ont naguère servi de protège pointes aux piques des révolutionnaires.
Il faut qu'ils se disent bien que le système démocratique breveté S.G.D.G.[Sans Garantie Du Gouvernement] a fait son temps.
Nous tenons pour périmé le fameux axiome qui prétendait que les amis de nos amis étaient nos amis, car nous avons payé cher l'acquisition de cette vérité : les amis de nos amis sont souvent les amis de nos ennemis.
X. X. X.
(Paris-soir 20 juillet 1940) |
On notera la référence à la Révolution française !!! pour justifier la menace de répression visant les Français qui se sont fourvoyés en aidant les "grands affairistes israélites" à vider leurs coffres-forts :
"Les coffres-forts sont de petites bastilles qui s'écrouleront comme s'est écroulée l'autre.
Et il faut qu'ils se souviennent que des têtes illustres ont naguère servi de protège pointes aux piques des révolutionnaires."
4) Anglophobie.
L'anglophobie d'Henri Jeanson se manifeste dans son texte du 9 juillet 1940 intitulé "Attention, Monsieur Churchill !" :
"Aujourd'hui,
la France a recouvré sa liberté d'action vis-à-vis de Londres. Elle ne
veut plus être l'auxiliaire de l'impérialisme anglais. [...]
« L'ex-alliée » française est devenue pour Churchill une ennemie le jour où elle a cessé d'être une dévouée servante."
Aujourd'hui du 10 septembre 1940
Premier article signé de Henri Jeanson approuvé par la censure allemande, "Vérité mon beau souci" est publié dans Aujourd'hui du 10 septembre 1940 :
VÉRITÉ
mon beau souci
par Henri Jeanson
à jean Giono
APRÈS un an de silence forcée, nous voici de nouveau devant la page blanche.
Dans quelques instants, cette page ne sera plus qu'un article de journal.
Et il dépend de nous que cet article soit une bonne ou mauvaise action.
Ou plus simplement un article de plus parmi tant d'autre.
Il s'agit, une fois encore, pour nous, de servir ce que nous croyons être la vérité et si, à cette minute, notre main tremble un peu, si notre plume hésite, si notre cœur bat à un rythme accéléré, c'est que la vérité est une personne terriblement impressionnante, terriblement exigeante, une personne dont la présence ne nous a jamais semblé plus nécessaire...
Vérité, nous pouvons nous regarder en face, car nous nous sommes toujours personnellement efforcé de penser, d'écrire, de vivre et de combattre sous ton signe, même lorsque nous nous trompions.
Ta place est ici.
Avec nous.
Longtemps, tu fais interdite de séjour et lorsque, bravant les consignes, tu te montrais dans les salles de rédaction, les journalistes à la chaînes feignaient de ne pas te voir.
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PENDANT des années, les grandes tribunes de la grande presse ont été
occupées, monopolisées, par les émissaires de l’imposture, les
fabricants de panique à la ligne, les esclaves de la manchette et les
faussaires de l’information.
On te faisait doubler – ô vérité ! – par
de petits mensonges qui portaient un masque à ta ressemblance et qu’on
ramassait dans les antichambres ministérielles, dans les halls des
grandes banques, dans les officines politiques.
On mentait à droite et à
gauche.
On mentait partout.
Trompés au jour le jour par des
directeurs de conscience sans conscience, 39 millions de Français
connaissent aujourd’hui le prix de revient du mensonge.
Il leur a fallu
une guerre et une débâcle pour comprendre ce qu’ils se refusaient à
comprendre.
Nous n'avons, nous, Dieu merci aucun remords.
Nous nous sommes, en effet, jamais solidarisé avec les truqueurs de l'opinion, les bellicistes professionnels, les pousse-au-crime et les gamelinards.
Nous étions de ceux pour qui la paix était une raison d'être et que nous nous avons toujours pensé que le mensonge est une servitude, que c'est faire un marché de dupe que de sacrifier sa vérité à la liberté, nous reprenons aujourd'hui la plume d'un cœur triste, mais léger...
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NOUS n'avons jamais cessé de dénoncer ceux qui prétendaient au nom d'une liberté théorique et d'une République sans justice, jeter sur les champs de bataille une jeunesse armée de fusils Euréka par des munitionnaires sans scrupule.
Nous avons voulu prévenir le crime.
Et les criminels nous ont jeté en prison.
Nous ne regrettons rien, car le bonheur c'est aussi quelque fois de savoir choisir sa souffrance...
Les journaux des deux cents familles qui composaient la Républiques des camarades nous ont traité d'apatride et de défaitiste, leurs policiers nous arrêté, leur juges nous ont condamné, mais leur défaite nous a libéré...
Cette défaite n’a pas libéré que nous.
Elle aura eu ceci de bon qu’elle a aussi libéré la France des trusts, des banques, et
des radicaux-socialistes.
Nous passions pour de mauvais Français parce que nous refusions de faire partie de la France de M. Daladier, de la France de la bande Bollack, de la France de M. Prouvost de « Paris-Soir », de la France qui fit à Versailles, en 1918, le malheur de l'Europe.
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AUJOURD'HUI, notre sort ne dépend plus
d’une presse vénale et d’un gouvernement de vieillards et de pleutres.
Il ne dépend que de nous.
Ce pays dont nous rêvions, il peut devenir
une réalité.
À condition que nous exercions tous honnêtement
notre métier.
Notre métier à nous, écrivain, est d’écrire sous ta
dictée, ô vérité !
Car on ne construit que dans la lumière.
La nuit ne
laisse que des ruines
(Aujourd'hui n° 1 du 10 septembre 1940) |
Le premier numéro d'Aujourd'hui publie aussi un texte programmatique non signé qu'on peut attribuer par principe à Henri Jeanson en raison de sa fonction de rédacteur en chef. Dans ce texte intitulé "Aujourd'hui : Sa raison d'être", le journal apporte son soutien au Maréchal Pétain et définit sa ligne comme antisémite, anglophobe et pro-allemande :
Aujourd'hui : Sa raison d'être
En créant AUJOURD'HUI nous ne voulons pas vendre pour cinquante centimes un journal de plus.
Nous voulons qu'AUJOURD'HUI participe activement à la Renaissance française.
Nous avons des ambitions et un programme.
Ce programme nous l'exposons ici, en toute honnêteté pour éviter tout malentendu entre nos lecteurs et les collaborateurs d'AUJOURD'HUI.
Plan politique intérieur.
Les révolutions modernes ont été conduites et réalisées par les masses populaires, qui ont porté au pouvoir les chefs en qui elles avaient une confiance totale, et ces masses leur ont donné les pleins pouvoirs.
La puissance est née de la valeur des chefs.
Aujourd'hui la France se trouve dans une situation physique et morale telle que le changement doit commencer par la tête et, si les chefs sont dignes du pouvoir, la révolution se fera en sens inverse, mais le résultat doit être être le même.
Les chefs doivent être intègres, audacieux, intelligents, compétents et travailleurs.
Aucune faute ne leur est permise.
Le peuple doit savoir, et les actes doivent lui prouver, que le gouvernement travaille pour lui.
Il doit savoir que la guerre actuelle est une guerre constructive, qu'il aurait pu éviter, s'il avait eu le courage nécessaire pour se débarrasser d’un gouvernement et d’une administration indignes.
Le peuple doit comprendre que la politique nationale ne correspond plus avec la vitesse du monde nouveau et que l'instruction et l'éducation généralisées amèneraient l'éclatement des frontières économiques et morales des Etats pour aboutir à une politique européenne.
L'Allemagne a compris la première et, ne pouvant discuter avec la ploutocratie et le capitalisme taré, elle a préparé la croisade de l'émancipation des peuples d'Europe.
La France en retard n'avait plus d`idéal ni de but, elle a joué derrière l'Angleterre une partie folle sans enthousiasme, elle a perdu.
Elle doit être « beau joueur », reconnaître ses fautes et se réhabiliter elle-même.
Liquidation du passé.
Il ne suffit pas de liquider les hommes (politiciens, fonctionnaires, francs-maçons et ploutocrates israélites), il faut détruire leur œuvre de mort pour la nation laborieuse, leurs systèmes souillés de malhonnêteté civique et de mauvaise foi.
L'Etat au service de la fiance et des banques, la presse vendue et un fonctionnarisme créé par le favoritisme et non par les compétences, tout cela doit être supprimé.
Construction.
La finance au service de l'Etat.
La Presse libre, mais contrôlée sur le plan honnêteté, loyauté et vérité.
Le travail strictement réglementé.
Les compétences utilisées.
Les solutions nouvelles pour le bien du pays, voilà les bases du programme de demain.
Sur le plan agricole.
Exploitation totale du territoire par une colonisation intérieure.
Financement des productions sans exploitation bancaire.
Commercialisation des produits agricoles vers les marchés naturels de de la France.
Education du paysan français vers le maintien des cultures de produits de qualité.
Sur le plan artisanal et industriel.
Toutes les tentatives du passé ayant fait faillite par suite des lenteurs et des mesquineries administratives, il est essentiel de faire table rase des choses existantes.
Trois points essentiels :
Banque artisanale.
Foire-exposition permanente.
Ecoles artisanales.
Le département du Commerce aura la charge des réalisations au point de vue exportation.
Sur le plan industriel et commercial.
Une entente totale avec l`Allemagne est essentielle pour ne laisser vivre que les industries ayant de réelles possibilités et des négoces sains et vivants.
Pour l'ensemble de la production, la constitution régionale et nationale des corporations et d'une chambre corporative s'impose d'extrême urgence.
Sur le plan financier.
Les solutions les plus radicales sont essentielles, afin d'assainir totalement la situation de l'Etat.
Le changement de la monnaie, l'annulation de la dette et la stabilisation des ressources de l'Etat sont au premier plan des réalisations nécessaires avec une liquidation immédiate des impôts échus.
Sur le plan éducation nationale et propagande.
Le programme est immense, mais c'est de la liaison de l'Education nationale avec la Propagande en utilisant l'instruction, les sports, les arts, le théâtre et le cinéma que se fera le relèvement moral de la France.
C'est dans ce département qu'il faut intégrer la protection de la famille.
Sur le plan international.
Les Etats-Unis d'Europe avec la suppression des frontières économiques et l'interpénétration des jeunesses par les sports et les arts.
Rupture complète avec la politique anglaise basée sur l'action de la Cité de Londres.
Politique coloniale européenne et non nationale, les colonies étant avant tout des terres sous mandat et non des propriétés fixes d'Etats.
Enfin une position mondiale sur le plan économique, l'Union européenne imposant ses conditions et ne recevant plus d'ordres ou de directives des mondes soi-disant nouveaux.
Ces quelques idées peuvent fixer la position du journal sur les grands problèmes, mais, à l'heure actuelle, il est impossible à la France de rien réaliser, tant que sa situation intérieure ne sera pas rétablie;
(Aujourd'hui n° 1 du 10 septembre 1940) |