Sur le site Retronews, "le site de presse de la BnF", on peut consulter les numéros du journal Aujourd'hui, quotidien qui a paru avec l'autorisation de l'occupant allemand de 1940 à 1944.
Ce journal autorisé par les nazis présente la particularité d'avoir été fondé par un homme de gauche : le journaliste Henri Jeanson.
Compte tenu de ces éléments, on lira avec intérêt la fiche de présentation proposée par le site :
Compte tenu de ces éléments, on lira avec intérêt la fiche de présentation proposée par le site :
"Aujourd’hui est un quotidien français ayant paru entre 1940 et 1944. À son départ, la publication se veut indépendante du régime de Vichy et la rédaction est composée de personnes issues de la gauche. Néanmoins, le contexte politique ne favorise pas la pérennité d’un tel projet : le journaliste Henri Jeanson, fondateur du périodique, doit quitter son poste de directeur lorsqu’il refuse de se montrer hostile aux Juifs et est remplacé par le futur collaborateur Georges Suarez qui réorientera la publication vers une ligne favorable au pouvoir en place. Le journal cesse de paraître le 16 août 1944, quelques jours avant la libération de Paris, et Suarez sera exécuté le 9 novembre 1944 suivant. Parmi les nombreux collaborateurs de renom qui ont participé aux premiers numéros, on trouve Jean Anouilh, Henry Troyat, les dessinateurs Bécan et Raoul Guérin ou le poète Robert Desnos."
Après avoir indiqué que le journal Aujourd'hui rassemblait des "personnes issues de la gauche", Retronews affirme d'une part que cette publication se voulait "indépendante du régime de Vichy" et d'autre part que Henri Jeanson a quitté ses fonctions parce qu'il "refusait de se montrer hostile aux Juifs".
Vraiment ???
Est-ce que Retronews a lu les numéros qu'il a mis en ligne ?
Pallions à cette défaillance en portant à sa connaissance les numéros des 12 octobre 1940, 28 octobre 1940 et 6 novembre 1940.
Les éditoriaux de ces trois numéros constitueront une parfaite illustration de la ligne politique du journal Aujourd'hui.
Vraiment ???
Est-ce que Retronews a lu les numéros qu'il a mis en ligne ?
Pallions à cette défaillance en portant à sa connaissance les numéros des 12 octobre 1940, 28 octobre 1940 et 6 novembre 1940.
Les éditoriaux de ces trois numéros constitueront une parfaite illustration de la ligne politique du journal Aujourd'hui.
Aujourd'hui du 12 octobre 1940
"Chef de l'Etat français" dans le cadre du régime qu'il a fondé le 11 juillet 1940, le maréchal Pétain prononce une allocution radiodiffusée le 9 octobre 1940 dans laquelle il vante le bilan des trois premiers de son action avant d'annoncer que la presse du lendemain publiera un message dans lequel il exposera son projet pour la France :
"Dans le message que les journaux publieront demain, et qui sera le plan d'action du gouvernement, je montrerai ce que doivent être les traits essentiels de notre nouveau régime : national en politique étrangère, hiérarchisé en politique Intérieure, et par dessus tout social, dans son esprit et dans ses institutions.
Vous y reconnaitrez les grandes lignes de cette révolution nationale qu'ensemble nous accomplissons, qu'ensemble nous poursuivons."
Le 10 octobre, comme annoncé la veille, la presse de la zone non occupée publie l'intégralité du "message du chef de l'Etat". Un exemple : Le Figaro. Ce texte fondamental est aussi reproduit dans le Journal officiel du jour.
Dans son message, le maréchal Pétain expose les conditions du relèvement de la France dans trois parties distinctes :
1) "Politique extérieure :un régime national".
2) "Politique intérieure : un régime hiérarchique et sociale".
3) "Politique économique : l'économie coordonnée et la monnaie au service de l'économie".
Les relations avec l'Allemagne sont évoquées dans la première partie :
Dans son message, le maréchal Pétain expose les conditions du relèvement de la France dans trois parties distinctes :
1) "Politique extérieure :un régime national".
2) "Politique intérieure : un régime hiérarchique et sociale".
3) "Politique économique : l'économie coordonnée et la monnaie au service de l'économie".
Les relations avec l'Allemagne sont évoquées dans la première partie :
"ll [Le régime nouveau] remettra en honneur le véritable nationalisme celui qui, renonçant à se concentrer sur lui-même, se dépasse pour atteindre la collaboration Internationale.
Cette collaboration, la France est prête à la rechercher dans tous les domaines, avec tous ses voisins. Elle sait, d'ailleurs, que quelle que soit la carte politique de l'Europe et du monde, le problème des rapports franco-allemands, si légèrement traité dans le passé, continuera de déterminer ton avenir.
Sans doute l'Allemagne peut-elle, au lendemain de sa victoire sur nos armes, choisir entre une paix traditionnelle d'oppression et une paix toute nouvelle de collaboration.
A la misère, aux troubles, aux répressions et sans doute aux conflits que susciterait une nouvelle paix faite « à la manière du passé », l'Allemagne peut préférer une paix vivante pour le vainqueur, une paix génératrice de bien-être pour tous.
Le choix appartient d'abord au vainqueur; il dépend aussi du vaincu.
Si toutes les voies nous sont fermées, nous saurons attendre et souffrir.
Si un espoir, au contraire, se lève sur le monde, nous saurons dominer notre humiliation, nos deuils, nos ruines. En présence d'un vainqueur qui aura su dominer sa victoire, nous saurons dominer notre défaite."
Ne voyant dans la France qu'un pays vaincu, le chef de l'Etat plaide pour la "collaboration" avec l'Allemagne.
Dans son éditorial du 12 octobre 1940, Henri Jeanson approuve avec ferveur le projet pétainiste tant sur le plan extérieur qu'intérieur.
Cette adhésion enthousiaste se manifeste :
1) dans le titre de l'article :
Cette adhésion enthousiaste se manifeste :
1) dans le titre de l'article :
"Le Maréchal Pétain nous fait de belles promesses
A nous de les tenir."
2) dans le chapeau du texte :
"Le maréchal Pétain a trente ans.
Son message est l'œuvre d'un homme jeune, intelligent, averti, subtil, téméraire et terriblement clairvoyant.
En un mot comme en dix le maréchal Pétain nous promet la révolution.
Nous la donnera-t-il ?
Et s'il ne nous la donne pas, aurons-nous le courage de la lui prendre ?
Les propos qu'il tient aujourd'hui lui eussent valu, il y a un an, les rigueurs du tribunal militaire. En effet, il n'est pas une phrase de ce message qui ne tombe sous le coup des décrets Daladier.
Comme le temps passe !
Voilà que le maréchal Pétain s'exprime comme un encyclopédiste, et cet apparent retour en arrière constitue un prodigieux bond en avant.
Souhaitons que le maréchal retombe sur ses pieds !"
3) dans cette prescription à la fin de l'édito :
"Lire page 3 le texte in extenso du message du Maréchal Pétain dont « Aujourd'hui » publia hier matin - SEUL DE TOUS LES QUOTITDIENS DE PARIS - les extraits les plus marquants".
4) dans le corps du texte :
"Le maréchal Pétain se tournant vers la porte dit à l'avenir :
— Entrez donc.
Cet avenir nous pouvons le regarder en face.
Tel que le maréchal nous le présente, il nous plait, car c'est celui dont précisément nous rêvions."
Aujourd'hui du 28 octobre 1940
Le 24 octobre 1940, le maréchal Pétain rencontre Hitler dans la ville de Montoire-sur-le-Loir. Sont présents à cette rencontre Pierre Laval, le dauphin du régime, et Joachim von Ribbentrop, le ministre des Affaires étrangères allemand.
Aujourd'hui du 26 octobre 1940 annonce cet événement avec un titre barrant toute la une : "Une entrevue historique".
La rencontre et sa signification sont décrites dans un article titré "Le maréchal Pétain et le Führer Hitler se sont serré la main" et sous-titré "De l'entretien auquel ont pris part M. VON RIBBENTROP et M. Pierre LAVAL dépendent la situation et l'avenir de la France".
Cet article est complété par un second dont le titre témoigne de l'émotion du journal : "Un émouvant récit de l'entrevue des deux Chefs d'Etat".
Revenant sur la rencontre du 24 octobre, l'éditorial du 28 octobre 1940 signé Aujourd'hui célèbre le mot... "Collaboration" :
La rencontre et sa signification sont décrites dans un article titré "Le maréchal Pétain et le Führer Hitler se sont serré la main" et sous-titré "De l'entretien auquel ont pris part M. VON RIBBENTROP et M. Pierre LAVAL dépendent la situation et l'avenir de la France".
Cet article est complété par un second dont le titre témoigne de l'émotion du journal : "Un émouvant récit de l'entrevue des deux Chefs d'Etat".
Revenant sur la rencontre du 24 octobre, l'éditorial du 28 octobre 1940 signé Aujourd'hui célèbre le mot... "Collaboration" :
COLLABORATION
C'est un mot qui évoque l'idée de compétence
Lorsque M. Pierre Laval est arrivé à Paris au début du mois de juillet, il apporta avec lui dans ses bagages l'idée de collaboration et il nous plait de reconnaitre que tous ses efforts durant ces quatre derniers mois ont été tendu vers ce seul but qu'il semble avoir atteint aujourd'hui.
Rendons hommage au résultat obtenu bien que nous n'en connaissions ni les modalités, ni les conditions.
Mais il convient, par contre, d'avertir les Français de leurs devoirs et de leurs obligations au lendemain d'un accord qui semble être le point de départ d'une politique nouvelle.
Chaque collaborateur doit apporter à la tâche commune sa part d'idées créatrices et sa part d'action constructive. [...]
On notera que le texte fait de tout Français un collaborateur : "chaque collaborateur".
Aujourd'hui du 6 novembre 1940
Dans une allocution radiodiffusée le 30 octobre 1940, le maréchal Pétain rend compte de sa rencontre avec le chancelier Hitler et annonce qu'il "entre, aujourd'hui, dans la voie de la collaboration" :
"J'ai rencontré, jeudi dernier, le chancelier du Reich. [...]
Cette première rencontre entre le vainqueur et le vaincu marque le premier redressement de notre pays.
C'est librement que je me suis rendu à l'invitation du Führer. Je n'ai subi, de sa part, aucun diktat, aucune pression. Une collaboration a été envisagée entre nos deux pays. J'en ai accepté le principe. Les modalités en seront discutées ultérieurement. [...]
Celui qui a pris en mains les destinées de la France a le devoir de créer l'atmosphère la plus favorable à la sauvegarde des intérêts du pays. C'est dans l'honneur et pour maintenir l'unité française, une unité de dix siècles, dans le cadre d'une activité constructive du nouvel ordre européen que j'entre, aujourd'hui, dans la voie de la collaboration.
Ainsi, dans un avenir prochain, pourrait être allégé le poids des souffrances de notre pays, amélioré le sort de nos prisonniers, atténuée la charge des frais d'occupation. Ainsi pourrait être assouplie la ligne de démarcation et facilités l'administration et le ravitaillement du territoire.
Cette collaboration doit être sincère. Elle doit être exclusive de toute pensée d'agression. Elle doit comporter un effort patient et confiant. [...]
Cette politique est la mienne. Les ministres ne sont responsables que devant moi. C'est moi seul que l'Histoire jugera."
Nouvelle réaction enthousiaste de Henri Jeanson dans son éditorial du 6 novembre 1940 dans lequel il appelle les Français à "se ranger loyalement aux côtés du maréchal Pétain, lorsque celui-ci nous dit : « Collaborons ! »" :
"Qu’il n’y ait pas de paix possible en Europe sans un accord entre la France et l’Allemagne, c’est là une évidence vieille de plusieurs siècles et que nul ne songe à contester.
Cet accord, nous l’avons toujours souhaité parce que nous avons mis la paix au-dessus des partis et parce que nous savons qu’en temps de guerre, la liberté perd ses droits.
Et c’est pourquoi le devoir de tout pacifiste véritable, de tout Européen authentique est de se ranger loyalement aux côtés du maréchal Pétain, lorsque celui-ci nous dit : « Collaborons ! »"
Comme les texte précédents, cet appel symbolise parfaitement la volonté de Henri Jeanson et de ses camarades... d'être indépendant du régime de Vichy.
Ajoutons qu'il est postérieur à la promulgation le 18 octobre de la loi du 3 octobre 1940 "portant statut des Juifs". Loi intégralement reproduite dans... Aujourd'hui du 19 octobre 1940.
Terminons en rappelant la thèse de Retronews : le journal Aujourd'hui s'est engagé dans la voie de la collaboration après l'arrivé du "futur collaborateur Georges Suarez"...
Ajoutons qu'il est postérieur à la promulgation le 18 octobre de la loi du 3 octobre 1940 "portant statut des Juifs". Loi intégralement reproduite dans... Aujourd'hui du 19 octobre 1940.
Terminons en rappelant la thèse de Retronews : le journal Aujourd'hui s'est engagé dans la voie de la collaboration après l'arrivé du "futur collaborateur Georges Suarez"...